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une impatience inexprimable, les heures s'écoulaient et je ne voyais personne; je jugeai qu'ils m'avaient trompé et qu'il ne voulaient plus me revoir. Je résolus de les prévenir, j'allai d'abord chez Audouin, qui logeait dans la rue de Tournon à un quatrième étage, dans un misérable galetas. Quel fut mon étonnement, lorsque je le trouvai entouré de ces députés que j'attendais, Audouin prit le premier la parole, et me dit qu'ils se disposaient à partir pour le rendez-vous. « Hé bien! leur dis-je, >> restons ici; ce sera dans notre vie une époque >> remarquable, que celle où, assis sous ce toit >> modeste, nous aurons à délibérer sur le sort » d'une tête couronnée ; Qu'avez-vous

» décidé ? » leur demandai-je d'une voix trem= blante, me doutant déjà de la réponse qu'ils allaient me faire.

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«La mort; puis sursis jusqu'à la paix....,

je respirai...

>> Mais sous condition que Vous voterez

» comme nous!...

Je vous le jure! m'écriai-je, me rappelant ces paroles de Lanjuinais, en politique le lende➡ main n'arrive presque jamais.

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ENFIN arrive le jour fixé pour entendre l'acte d'accusation. Dès dix heures les députés vont prendre leurs places, dans un silence solennel. A onze heures Barrère occupe le fauteuil du président. On remarque que sa figure porte l'empreinte d'une altération profonde. Les députés se montrent, les uns aux autres, ces signes extraordinaires, que chacun interprète suivant son opinion. A midi s'ouvrent les portes de l'Assemblée, et les tribunes sont sur-le-champ envahies par une foule d'hommes et de femmes à

mines sinistres, à demi-nus pour la plupart, ou qui portent sur leurs vêtements les traces de la lutte qu'ils ont eu à soutenir pour pénétrer dans l'enceinte, et sur leur visage celle des boissons enivrantes qu'ils ont bues pour passer les longues heures d'attente aux portes de l'Assemblée. Pendant une demi-heure le président réclame en vain le silence, sa voix se perd au milieu des chuchottements, des cris, des ris, des conversations de cette multitude, qui cherche parmi les députés ceux dont la figure lui est connue, et qu'elle désigne du doigt, et de la main.

A une heure on annonce l'arrivée du roi.

Alors un mouvement universel a lieu dans la salle. Les députés se parlent à l'oreille, penchent la tête, se lèvent de leur siége et dirigent leurs regards vers la porte par où doit entrer le mo= narque déchu. Tous les spectateurs des tribunes s'agitent sur leurs banquettes; les gardes de l'ex= térieur se mettent sous les armes ; c'est à qui le premier se rassasiera les yeux du spectacle d'un roi dans les fers. A ce tumulte, précurseur de l'arrivée du prisonnier, se mêlent au dehors les hennissements des chevaux, les pas égaux des soldats, les cris de la foule, les bruits confus des voix humaines, des tambours, du canon.

En ce moment un député s'agite et fait signe qu'il veut parler. Tout rentre dans le silence. Legendre se lève.

« C'est le boucher, s'écrient plusieurs voix!» « Je demande, dit aussitôt Legendre, que >> l'interrogatoire ne soit interrompu par au>> cun murmure, aucun cri; il faut que le si» lence des tombeaux effraie le coupable. »

Barrère se tournant vers les tribunes, ajoute: « Les citoyens de Paris ne laisseront pas échap>> per cette nouvelle occasion de montrer le pa>> triotisme et l'esprit public dont ils sont animés. » Ils n'ont qu'à se souvenir du silence terrible » qui accompagna Louis, ramené de Varennes, » silence précurseur du jugement des rois par >> les nations. >>

Comme il achevait, paraît Louis XVI, accom= pagné du maire de Paris et de deux officiers municipaux. La vue de ce prince, le désordre de ses vêtements, sa barbe qui n'était pas faite depuis plusieurs jours, excitent une sorte de pitié mêlée de stupeur.

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On lui indique un fauteuil, et il va se placer à la barre en face du duc d'Orléans, qui, armé d'une lorgnette, semble se repaître de la vue du royal prisonnier.

Tous les regards se fixent à l'instant sur Louis. Ce prince est calme. Son œil impassible se promène lentement sur ses juges. Il salue l'Assem= blée....

<< Louis, dit alors Barrère d'une voix altérée, >> se tournant vers le roi, la nation vous accuse. La Convention a décrété, le 3 décembre, que »vons seriez jugé par elle; le 6 décembre elle

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>>

a décrété que vous seriez aujourd'hui traduit » à sa barre. Vous allez entendre la lecture de >> l'acte énonciatif des faits qui vous sont im» putés. Vous pouvez vous asseoir. »

Le roi s'assied, et un secrétaire donne lecture de l'acte entier. Puis le président, récapitulant chaque grief, interpelle l'accusé de répondre aux charges qu'il énonce.

« Louis, dit-il, le peuple français vous ac= »cuse d'avoir commis une multitude de crimes >> pour établir votre tyrannie, en détruisant sa » liberté; vous avez, le 20 juin 1789, attenté » à la souveraineté du peuple, en suspendant » les assemblées de ses représentants, et en les >> repoussant, par la violence, du lieu de leurs » séances; qu'avez-vous à répondre ?

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>> Il n'existait alors aucune loi qui me l'empêchât. »>

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