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téresser à lui sincèrement. Je vis aussi Maximi= lien avec moins de répugnance, et je finis même par répondre aux avances dont il ne cessait de m'accabler.

Le jour de l'élection arriva. Les électeurs s'as= semblèrent pour procéder au choix de leurs re= présentants. Par surabondance de précautions,

pour ne rien négliger dans une affaire aussi importante, le prudent candidat mit de nouveau son frère en campagne, et le chargea de se rendre avec leurs amis dans les auberges où les électeurs étaient descendus, d'y faire retentir son nom et son éloge, et de parler à chacun le langage le plus propre à capter sa bienveillance. II pensa aussi qu'il serait bon de transiger avec quelques-uns de ses concurrents. Il les vit, et leur fit offre de seconder leur élection de tous les suffrages dont il pouvait disposer, à charge de réciprocité.

Mais quel fut l'étonnement de Robespierre lorsque, tout étant ainsi disposé, au lieu de se voir nommer député le premier et par accla= mations, comme sa vanité s'en était flatté, il vit successivement sortir les noms de plusieurs candidats, et le sien toujours oublié, quelque= fois même repoussé avec une sorte d'acharne=

ment. C'est alors que, le désespoir dans le cœur, il accourt chez ma tante raconter son hu= miliation et ses chagrins. Madame Rozier, toujours bonne, toujours obligeante, l'exhorte à ne point perdre courage tant qu'il restera un député à nommer.

M. Briois de Beaumez, nommé député la veille par la ville d'Arras, était venu faire une visite à ma tante. Cet homme recomman= dable jouissait d'une grande influence parmi ses concitoyens. Madame Rozier l'invite, le presse de faire quelque chose pour Robespierre. M. de Beaumez refuse d'abord ; il hésite; je joins mes instances à celles de ma tante; je me porte garant des bonnes intentions de Maximilien; ce= lui-ci jure qu'il ne fera rien que par les avis de M.de Beaumez à l'assemblée des États-Généraux. M. de Baumez consent enfin à lui prêter son crédit auprès des votants. Robespierre entrevoit une lueur d'espérance; il ne s'en tient pas là: il nous quitte, il court chez Buissart. Là il tient conseil, il passe en revue divers expédients, et s'arrête à celui de faire une dernière tentative auprès des villageois par un discours qu'il croit propre à les séduire. Buissart écrit sur-le-champ le nom du candidat sur quatre cents carrés

de papier, et les remet aux amis de Robespierre, avec injonction de les distribuer aux électeurs, au moment même où ils s'apercevront que la harangue du Cicéron artésien fera impression sur eux. Les choses ainsi convenues, on se rend à la séance. Robespierre y était déjà arrivé; il s'empare de la tribune, il commence par annoncer emphatiquement : « Qu'il va éclairer le » peuple sur de grands intérêts, et lui révéler >> des mystères d'iniquités opérés à son préju= ;) dice >>.... Aussitôt il se met à déclamer contre la tyrannie des levées militaires qui ont eu lieu dans l'Artois, il attaque les autorités, il inculpe l'intendant de la province, il inculpe les États, il accumule d'hypocrites doléances sur le sort du malheureux habitant des campagnes; au moment où les villageois attentifs s'extasient, la bouche ouverte, devant le candidat, Buissart et ses affidés leur glissent dans la main le nom de celui que tant de zèle pour eux leur rend cher: Robespierre descend de la tribune, on va au scrutin... il est élu.

Robespierre, à peine nommé, ne parla plus que du prochain nivellement des fortunes. Il assurait chaque jour la classe infime du peuple, qu'avant peu ce serait elle qui occuperait les

places de la magistrature, et qui ferait la loi dans toute la France. Informé de ces propos, M. de Fosseux, président de l'académie d'Ar= ras, et qui, plus tard, devint le complice du dictateur, dit que : « Sans doute, par le crédit de » M. de Robespierre, l'on verrait avant peu » l'Antillette siéger à la tête du corps muni»cipal d'Arras. » Ce l'Antillette était un save= tier, connu de toute la ville pour son adresse à pêcher les seaux tombés dans les puits. Piqué de l'ironie, Robespierre ne l'oublia pas, et, pour venger ses assertions et leur donner plus de publicité encore, la veille de son départ, au milieu d'un dîner que lui offraient ses amis, il fit venir l'Antillette, et lui dénonça l'insulte qu'un noble avait faite en sa personne à la majesté du peuple, et lui dit : « Sou» viens-toi, mon cher ami, de ce que je vais » te dire tout va changer en France; oui, » avant peu, ce pauvre l'Antillette, que mé»prise tant Ferdinand de Fosseux, n'aura >> plus qu'à se reposer. Les l'Antillette de» viendront maïeurs (maires), et les maïeurs >> seront des l'Antillette. » Ce trait de charla= tanisme acheva de gagner à Robespierre la faveur de la dernière classe du peuple, qui

comblait de bénédictions l'homme admirable qui allait lui assurer tant de bonheur et de gloire.

TOME 1.

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