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qu'il y pouvait trouver pour lui-même, paraissait leur offrir une dernière ressource.

Celui-ci comprit en un instant tout le parti qu'il y avait à tirer de cette situation, soit qu'il réussît, soit qu'il échouât pour Anne Boleyn; et, déterminé à faire ou à défaire, selon sa propre expression, il écrivit au roi pour lui demander une audience. Il sentait bien, lui disait-il avec toute son adresse accoutumée, toute son incapacité à donner des avis ; mais ni son affection ni son devoir ne lui permettaient de garder le silence quand il apercevait l'inquiétude de son souverain. Il pouvait y avoir quelque présomption à lui à se prononcer; mais il pensait que toutes les difficultés qui embarrassaient le roi ne venaient que de la timidité de ses conseillers, égarés par les apparences extérieures ou par les opinions

du vulgaire.

Le roi lui accorda aussitôt sa demande, quoiqu'il préférât ordinairement demeurer seul lorsque son caractère violent le transportait ainsi hors de lui-même. Il espéra que les opinions de Cromwell, que ce dernier lui faisait pressentir avec habileté, feraient diversion aux chagrins qu'il éprouvait.

Cromwell parut donc devant lui, les yeux affectant un air triste et contraint.

baissés, et

Sire, dit-il en l'abordant, hier, hier encore..... j'étais heureux; oui, heureux de la pensée de me présenter devant Votre Majesté: car il me semblait que je devais apporter quelque soulagement aux contrariétés qu'elle

éprouve, en lui rappelant que rien ne devait l'arrêter quand il s'agit du bien du royaume et de l'État... Mais aujourd'hui..., en paraissant devant elle, je ne sais plus lui dire. Ce matin lady Boleyn, ayant appris que j'aurais le bonheur de voir Votre Majesté, m'a envoyé chercher pour me charger de demander pour elle la permission de quitter la cour...

que

- Quoi ! dit Henri, se levant avec précipitation, elle veut me quitter!... elle, tout mon bonheur, toute ma joie! jamais!...

– Je l'ai trouvée, poursuivit Cromwell, sans paraître remarquer le trouble qu'il venait de jeter dans l'ame du roi, je l'ai trouvée plongée dans une douleur sans pareille; elle était comme sans vie ; ses beaux yeux étaient fatigués de larmes; ses longs cheveux noués sans art, et ses joues pâles et transparentes, la faisaient ressembler à une rose blanche penchée par un orage violent sur sa faible tige. << Allez, mon cher Cromwell, allez, m'a-telle dit d'une voix tremblante, mais douce et sonore comme une lyre dont le son harmonieux expire, allez dire à mon roi, à mon seigneur, que je lui demande la permission de me retirer dès aujourd'hui dans les terres de mon père. Je savais que j'étais environnée d'ennemis ; mais, tant que sa bonté a daigné me protéger, je n'ai point redouté leur méchanceté. Maintenant je sens, sans pouvoir en douter, que je vais devenir leur victime, puisqu'ils sont parvenus à irriter contre moi mon souverain jusqu'au point de refuser même d'entendre ma

Que peut-elle craindre ici ? s'écria le roi. Qui oserait l'offenser dans mon palais ?

– Et qui pourrait la défendre si Votre Majesté l'abandonne? reprit Cromwell d'un ton hautain, et feignant d'oublier l'air humble qu'il avait pris d'abord : car il s'applaudissait intérieurement du succès de son stratagème. Cependant n'a-t-elle pas tout oublié pour vous ? Chaque jour elle a blessé par ses refus les plus grands seigneurs du royaume, qui tous briguaient à l'envi son cœur et sa main; jamais elle n'a voulu écouter que l'amour qu'elle avait pour vous! Elle a toujours préféré l'incertitude de vous appartenir un jour aux brillans avantages des riches partis qu'on la pressait d'accepter... Mais aujourd'hui où son honneur est attaqué, où vous paraissez la bannir de votre présence, elle sent qu'elle n'aurait pas le courage de supporter près de vous un tel malheur, et elle demande à s'en éloigner pour toujours.

Pour toujours! répéta le roi. Cromwell, ella a pu dire cela! L'avez-vous bien entendu ? Cromwell, vous me trompez! dit Henri VIII: je la connais aussi bien que Et il porta sur les yeux de Cromwell un œil

vous.

scrutateur et pénétrant.

Mais rien ne pouvait troubler l'audace de cet homme. - Elle l'a dit ainsi que je vous le répète, reprit le fourbe avec assurance, en relevant fièrement la tête. Oserais-je le dire si je ne l'avais entendu ?.... Et Votre Majesté peut juger que mon dévoûment a pu seul m'engager à me charger d'un message si pénible pour tous :

car je ne pouvais croire que Votre Majesté eût cessé de l'aimer.

Jamais! dit le roi, jamais je n'ai cessé un moment de l'adorer! Mais écoute, cher Cromwell, et sache combien je suis malheureux! Hier encore j'ai reçu de Rome les nouvelles les plus affligeantes. J'avais fait écrire au pape une lettre signée d'un grand nombre de seigneurs de ma cour et d'évêques du royaume, par laquelle ils lui exposaient leurs craintes de voir un jour la guerre civile se rallumer dans ce pays si je mourais sans héritiers mâles, et qu'on pût disputer le trône à ma fille Marie, en contestant sa légitimité. Mais rien ne peut l'ébranler!

- Ici le roi se leva, plein de colère. - Il leur a répondu, cria-t-il en marchant avec violence, que!... ma foi, je n'en sais plus rien..., qu'il leur pardonne les termes qu'ils ont employés dans leur lettre, les attribuant à l'affection qu'ils ont pour moi; ensuite qu'il m'a encore de plus grandes obligations qu'ils ne disent; après, qu'il n'a pas tenu à lui que l'affaire du divorce ne fût jugée; après, qu'il a envoyé des légats en Angleterre, que la reine n'a point voulu les reconnaître, qu'elle en appelle de tout ce qu'ils ont fait ; qu'il a différé le plus qu'il a pu d'attirer la cause à lui, sous prétexte qu'il ne pouvait le faire que dans un consistoire; qu'il a tenté inutilement toutes sortes de voies pour terminer cette affaire à l'amiable; encore : << Peut-être voulez-vous dire qu'ayant autant d'obligations au roi que je lui en ai, je devrais passer sur toutes

...

considérations pour lui accorder absolument tout ce qu'il demande; » que, quoique cela serait souverainement injuste, on ne peut conclure autre chose de leur lettre ; qu'ils ne réfléchissent donc pas que la reine lui représente que toute la chrétienté est scandalisée qu'on revienne sur un mariage accompli depuis un grand nombre d'années, à la requête de deux grands rois, avec une dispense du pape ! d'un mariage confirmé par la naissance de plusieurs enfans! que sais-je encore? que, si je m'appuie sur le sentiment de quelques docteurs et de quelques universités, elle allègue, de son côté, la loi de Dieu sur la sainteté et l'unité du mariage, et les plus grandes autorités tirées des écrivains hébreux et latins; que les décisions des universités que je présente ne sont appuyées d'aucune preuve ; qu'il ne peut juger enfin sur cela, et que, s'il précipitait son jugement, on ne pourrait plus prévenir les maux dont ils disent l'Angleterre menacée; qu'il souhaite encore plus qu'eux-mêmes que je puisse avoir des enfans mâles, mais qu'il n'est pas Dieu pour m'en donner; qu'il n'a pas de plus grand désir que de me faire plaisir tant qu'il le pourra, sans toutefois violer les droits de la justice et de l'équité ; et enfin... qu'il les conjure de cesser de lui demander des choses qui sont opposées à sa conscience, afin de n'avoir pas le chagrin de les leur refuser!.... Entendstu bien, Cromwell, le chagrin de les leur refuser !!! Ainsi, tu le vois, après avoir tout tenté, tout employé, tout usé, que peut-il me rester à espérer maintenant ?...

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