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propres doivent s'effacer pour atteindre aux proportions générales. (1)

Mais les protestants, privés d'un régulateur suprême, tout en cherchant le vrai de toute leur âme, reconnaissent-ils encore un ordre surnaturel, certain et souverain? N'ont-ils pas été entraînés, par la force de la logique, à une dissolution doctrinale? Ne voit on pas leurs divergences et leurs divagations sans mesure? L'interprétation libre des écritures est une formule, un texte abstrait, mais non l'effet d'une société religieuse ni l'adhésion à ce que la raison a jugé vrai. Nul ne s'y tient. L'on monte plus haut : on s'élève à l'illuminisme, au mysticisme le plus extravagant et le plus superstitieux; ou l'on descend l'échelle des négations jusqu'au néant. (2)

Une fois le protestantisme arrivé à ce point, il est aisé de prévoir quels égarements suivront. Sous l'empire d'une religion où le principe d'autorité, incertain et presque nul, n'oppose qu'une impuissante digue aux erreurs qu'enfantent des imaginations exaltées, les esprits grossiers deviennent des fanatiques. Dès-lors, aucune folie, aucun excès ne sauraient surprendre, on entre de

(1) Le pasteur Puaux a donc tort de dire qu'il est dans la certitude que ses adversaires ne voudront pas jeter les points qui nous divisent dans le creuset d'une discussion publique. Nous ne sommes pas habitués à traiter dans l'ombre, et comme à huis clos, des affaires qui sont de l'humanité entière. Ouvrez donc toutes les portes, appelez le public à la connaissance du procès. (2) Voyez Discussion critique, par M. Lamennais, p. 121.

plein pied dans le domaine du délire. En Amérique, des hommes et des femmes, réunis dans des assemblées apocalyptiques, prophétisent, parlent toutes les langues, montrent enfin au monde étonné le navrant spectacle d'âmes qui cherchent Dieu sans Dieu. (')

Sans doute, les savants du protestantisme et quelque chose aussi de religieux dans la nature humaine, atténuent ce mal d'autant plus effrayant qu'il ôte à ceux qui en sont atteints jusqu'au désir de la guérison; mais il n'en est pas ainsi des médiocrités. Le protestantisme, en masse, ne présente plus que l'aspect d'une terre mouvante, décomposée, sans consistance, sans nom. >> Les hommes qui professent la certitude absolue du canon, dit M. Agenor de Gasparin, se comptent aujourd'hui aisément chez les protestants. Ceux qui professent les droits de la critique et qui reconnaissent des erreurs dans la bible abondent partout. Quant aux écoles de théologie, d'où sortiront ceux qui prêcheront demain l'évangile, il est impossible de n'être consterné lorsqu'on considère l'opinion qui y règne. J'ai lu une centaine de thèses de Montauban et de Strasbourg, et j'ai frémi de voir qu'à peu d'exceptions près, ces futurs pasteurs se rattachaient aux diverses tendances de l'Allemagne. En général, Léander est leur modèle. «<

pas

(1) Locke avait déjà sous les yeux le triste spectacle des extravagances de l'enthousiasme presbytérien ou puritain. Voyezl'histoire complète des Mormons, publiée par M. Hachette.

A l'aide de ce qu'on appelle l'exégèse biblique, c'est-à-dire, d'une critique sans frein, on a tout nié, non seulement les dogmes et les sacrements, la Trinité, l'Incarnation, la divinité du Verbe, l'existence même de Jésus-Christ, le péché originel, mais encore les vérités de l'ordre naturel qui regardent Dieu et les destinées de l'homme.

Le moyen de concilier ces négations avec l'affirmation du pasteur Albaric » que la bible prouve son inspiration par elle-même, parce qu'il y a dans l'esprit qui y domine et dans le ton avec lequel elle est écrite, quelque chose d'indéfinissable qui est plus que la clarté, plus que la force, plus que l'éloquence: quelque chose qui saisit l'esprit et le cœur, qui fait vibrer les cordes les plus sensibles de notre âme....? Car le quelque chose qui fait vibrer le cœur n'a pas empêché que toute l'Écriture, au jugement de doctes interprètes, ne soit devenue un tissu d'allégories, ou pour parler leur langage, de mythes ou de fables.

Déjà Rousseau disait que »les réformés de son temps, du moins les ministres, ne connaissaient ou n'aimaient plus leur réligion. «< (1) M. de Haller s'étonnait en 1821 » du changement déplorable qui s'était opéré parmi les protestants, seulement depuis 30 à 40 ans! Il n'y a plus, ajoutđit-il, de croyances communes, chacun se fait une réligion à part, ou n'en reconnaît aucune; chacun explique

(1) Lettres écrites de la montagne. V. lettre, p. 70.

la bible selon sa fantaisie, ou n'y croit pas du tout, nos ministres mêmes sont divisés entre eux et ne savent plus ce qu'ils croient ni ce qu'ils doivent enseigner l'un affirme le matin ce que l'autre refute l'après-dinée. « (1)

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Les protestants sont donc conduits, en creusant une erreur, à les creuser toutes, jusqu'à ce que leur intelligence épuisée s'abîme enfin sous ses propres ruines. (2) Ils professent, disent-ils, une religion fondée sur le libre examen, et de là il devient aisément jusqu'à une croyance peu définie, vague et élastique. Sur cette pente, il est fort difficile de fixer des points d'arrêt. Les esprits qui ont une fois proclamé leur émancipation conçoivent aisément, dans le secret de leurs pensées, cet idéal de la foi philosophique auquel aspire la raison, qui veut, comme dit Platon, se conformer à Dieu. Peuà-peu le dogme s'efface des esprits et disparaît même du langage. Un effort agressif a été tenté contre les principes fondamentaux du christianisme. Ce travail s'est fait particulièrement en Allemagne, dont l'analogie ne se rencontrerait dans les mêmes proportions à aucune époque de l'histoire, et il a eu pour but, souvent pour effet, de renverser les données de toute religion, en intervertissant cellesmêmes des facultés de l'âme. La hardiesse des opinions fait de tels progrès que la religion natu

(1) Lettre de M. de Haller à sa famille, etc. 1821.

(2) Voyez le VIe avertissement aux Protestants, par Bossuet, 3o partie, no 3.

relle s'affaiblit. Le matérialisme pratique s'est peu

à

peu transformé en une doctrine tour-à-tour sociale ou cosmologique, qui sanctifie la passion du bien-être en profanant le sentiment du droit et rabaisse l'homme en effaçant Dieu.

C'est la marche de l'erreur. Elle est forcée de s'appuyer sur des princes, de soumettre à la loi civile les questions organiques de l'Église, (1) de se traîner même sous les chaînes rivées par les autocrates, et perd aussitôt de son élévation comme idée, de sa profondeur comme sentiment. Elle dégénère en formulisme légal, et son empire sur les âmes s'affaiblit. Elle ne conserve tout au plus que son royaume de ce monde. Le foyer intérieur se refroidit; l'esprit de conservation, inhérent à ce qui existe, la soutient seul; la foi du cœur ne l'anime plus. Au milieu de cet attiédissement, le piétisme a rallumé la torche de la haine contre l'Églisé catholique. (2) Cette secte ne cherche plus

(1) >>Dans le principe des Protestants, il n'y a point d'autre Église que l'État, et point d'autre législateur que le souverain. « Rousseau, lettres écrites de la montagne, p. 185. >> Nous ne concevons plus la puissance civile exerçant en son nom la puissance religieuse, et ce n'est pas le moindre déshonneur du Protestantisme que d'avoir fait du prince le chef extérieur du christianisme chez les nations diverses.<< Lacordaire.

(2) Voyez la brochure de M. Puaux : Rome a-t-elle les caractères de l'Église de Jésus-Christ? Cette brochure, feu roulant de calomnies et de sarcasmes qui y règnent d'uu bout à l'autre, est le contrepied des paroles de Jésus-Christ : >> En ceci, tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l'amour l'un pour l'autre. « M. Burckardt, dans sa lettre à l'abbé Cacheux du 4 novembre 1853, disait » avoir cru de son devoir de parler publiquement contre le catholicisme.« Quand le pur amour du vrai dirige un écrivain, il doit toujours pouvoir dire avec l'apôtre : charitas manet.

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