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sister au vent, on alluma un nombre prodigieux de torches et de flambeaux de cire blanche. C'est au milieu de cette illumination extraordinaire que le palais d'Alcine montra ses enchantements à la cour, et finit par vomir un magnifique feu d'artifice qui éclaira sa destruction.

Les plaisirs de l'ile enchantée furent terminés à ce point; mais le roi voulut prolonger encore les fêtes, et il retint la cour. Le lendemain, qui était samedi, 10 mai, il fit courir la teste, sorte de jeu nouveau qui était venu d'Allemagne : la lice fut placée dans la cour de marbre; la reine elle-même fournit le prix, qui était une rose de diamant. Les dames se mirent au balcon, et, appuyées sur la balustrade de fer doré qui faisait alors le tour du palais, elles jugèrent des coups. Au premier assaut le roi fut vainqueur; il proposa de nouveau le prix qu'il avait remporté ; le marquis de Coaslin le gagna au marquis de Soyecourt.

La matinée du dimanche se passa en causerie; on parla des coups de la veille, et on fit un pari pour le lendemain; puis on alla, avec le roi, visiter la ménagerie qui était située à une extrémité du parc, dans un endroit où Louis XIII élevait ses chiens et ses oiseaux de chasse; on y admira des bêtes de toutes les façons. Le soir on eut le divertissement d'une comédie que les fêtes de Vaux avaient rendue célèbre; Molière joua les Fâcheux, et on jugea que la scène du chasseur était la plus belle, parce qu'on savait que le roi en avait donné l'idée.

Le lundi, les dames tirèrent une grande loterie, après quoi on vida les paris de la veille. Ce fut le duc de Saint-Aignan qui gagna. Le soir, le roi fit jouer les trois premiers actes de Tartufe,

que Molière n'avait pas encore achevé. Quoique la cour fùt alors livrée tout entière à la galanterie, on trouva bien grande la hardiesse du poëte. Les vers furent jugés très beaux et les scènes admirablement conduites; mais Louis XIV, tout en prodiguant ses éloges à Molière, défendit de donner au public la représentation qu'il venait de voir, « parce que, dit-il, il est fort difficile de faire la différence des vrais et des faux dévots. » Pauvre Molière! s'il avait composé la Princesse d'Elide, s'il avait fait l'éloge du prince, s'il avait justifié son amour, s'il avait divinisé sa maîtresse, s'il avait pris lui-même dans la pièce un rôle de bouffon et d'entremetteur, c'était pour faire passer Tartufe sous la protection des bonnes grâces royales. Il vit donc toute sa peine perdue, et toute l'humiliation à laquelle il s'était soumis inutile. Il ne se découragea pas néanmoins et n'abandonna pas l'oeuvre capitale de sa vie et de son siècle; il compta sur son génie et sur son habileté pour vaincre les répugnances du roi.

Le mardi fut employé à courre les testes, dont le roi remporta encore le prix. Et Molière fournit encore les divertissements de la soirée; il représenta le Mariage forcé, comédie-ballet, dans laquelle le roi avait dansé le 29 janvier de la même année. Ainsi Louis XIV et Molière étaient les héros de ces fêtes. Pendant le jour c'était le roi qui faisait l'admiration de sa cour par son grand air de noblesse, par ses travestissements somptueux, par ses habits de parade chargés d'or et de diamants, par ses triomphes sans contestation, par tout l'éclat de sa personne et de son rang. Mais le soir cette majesté faisait place à un autre; elle se couchait avec le soleil auquel les poëtes la comparaient sans cesse;

un astre non moins éblouissant montait à l'horizon: Molière faisait briller la lumière et la raison de son génie; c'était la splendeur de l'esprit qui succédait à celle de la puissance. Dieu, par une compensation admirable, avait attaché ces deux hommes l'un à l'autre, et il avait mis à côté du roi qui voulait emprisonner la société dans une forme irrévocable, le poëte qui sapait les fondements sur lesquels elle reposait; à côté du souverain absolu, le philosophe qui propageait par ses ironies la liberté de penser, d'où est sortie la liberté politique.

Mademoiselle de La Vallière présida à l'époque la plus brillante du règne de Louis XIV. Ce déploiement inouï de luxe auquel nous venons d'assister était l'expression du plus haut ét: t de grandeur auquel la monarchie soit parvenue. Sans troubler la paix le roi avait fait courber toutes les nations devant la France. Il avait forcé le roi d'Espagne et le pape lui-même à lui faire réparation et à envoyer leurs ministres s'humilier devant son trône. En attendant qu'il trouvât une occasion grande et utile de faire la guerre, il avait songé à acquérir toute la gloire que la paix peut donner; il laissait donc Colbert exécuter, à l'ombre de l'autorité royale, les plans qu'il avait conçus pour la prospérité intérieure de la nation. Les finances étaient réformées, les impôts diminués, les dépenses réglées. On donnait des encouragements aux arts, aux lettres, à cette civilisation élégante qui a toujours eu en France son foyer le plus vif; on créait du même coup deux puissances presque inconnues chez nous, la marine et l'industrie; on fondait toutes les manufactures qui font aujourd'hui notre richesse; on joignait les deux mers par un premier travail de

canalisation; le génie humain domptait la nature sur tous les points, et contraignait la matière à devenir un instrument d'intelligence.

L'éclat de la victoire ne manqua pas non plus à cette époque. Le roi n'était pas encore content de la position que le traité de Westphalie et la paix des Pyrénées faisaient à la France; il rêvait pour elle des limites plus étendues et voulait les pousser jusqu'au Rhin. Il avait tout préparé pour réaliser son projet; il avait disposé dans ce but ses ressources et ses armées. En 1666, la mort de Philippe IV, roi d'Espagne, donna le signal qu’il attendait; aussitôt il entre en campagne à la tête de ses troupes, ayant pour lieutenants Turenne, Vauban et Louvois; il donne pour motif de la guerre les indemnités qui lui étaient dues pour la dot de Marie-Thérèse, et, sous ce prétexte, il envahit la Flandre et la Franche-Comté. Tout était si bien prévu qu'une campagne suffit à la conquête de chacune de ces deux provinces. Mais la Hollande, voyant approcher de sa frontière une puissance si redoutable, cherche contre elle des alliés en Europe et intervient dans la guerre. La paix se signe à Aix-la-Chapelle, le 2 mai 1668. Louis XIV garde la Flandre et cède la Franche-Comté, après avoir démantelé ses principales places de manière à pouvoir s'en ressaisir à toute heure. Puis, la guerre finie, il fait bâtir l'hôtel des Invalides pour les soldats qu'elle a mutilés, et couronne ainsi ses conquêtes par un admirable monument qui, du haut de son dôme étincelant, parle tout à la fois de gloire et d'humanité.

C'est par ces grandes choses que l'amant de mademoiselle de

La Vallière se manifestait à l'Europe; mais déjà son esprit tournait vers d'autres pentes, vers des grandeurs moins élevées, vers de moins nobles amours. La naissance du comte de Vermandois avait détruit les charmes de La Vallière. Sa figure s'était couverte d'une grande pâleur, et la tristesse, qui avait toujours été au fond de son cœur, avait presque entièrement fait disparaître son enjouement. Le roi, dans le haut de ses triomphes, avait besoin de sensations plus vives; il rencontra bientôt, dans une femme plus éclatante, des émotions au niveau de sa fortune. La Vallière contribua elle-même, sans s'en douter, à donner au roi une nouvelle maitresse; et c'est parmi ses amies que sa rivale se déclara. Elle supporta avec une grande douceur, d'abord les tiédeurs et les inconstances du roi, et ensuite ses duretés; car Louis XIV montra à celle qu'il avait tant aimée cette froide cruauté dont on trouve d'autres exemples dans sa vie. Il avait un petit chien épagneul que l'on nommait Malice, et, comme il fallait qu'il passât par l'appartement de la duchesse de La Vallière pour aller dans celui de madame de Montespan, il prit un jour ce chien et le jeta à l'ancienne favorite en lui disant : « Tenez, madame, voilà votre compagnie; c'est assez! » Et sans rien ajouter, il entra chez madame de Montespan qui l'attendait.

Depuis 1669 que madame de Montespan devint la maîtresse du roi jusqu'en avril 1674, La Vallière eut le courage de vivre avec elle. Lauzun voulut l'épouser; le duc de Longueville lui offrit son amour, elle les refusa tous les deux ; en 1672 elle se retira une seconde fois à Chaillot, d'où Colbert l'alla retirer par l'ordre du roi. Elle revint à la cour et y endura encore pendant deux ans

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