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modérés se gardera, comme Duhem le lui a suggéré, (le Duhem de la seconde manière), « des folles ambitions du dogmatisme comme des désespoirs du pyrrhomisme », pour se maintenir ainsi « en cet état de parfait équilibre, d'où il peut sainement apprécier l'objet et la structure de la théorie physique» (1).

Laplace avait déjà adressé le même avertissement à ses contemporains un siècle plus tôt, quand il écrivait ces lignes « Le philosophe vraiment utile au progrès des sciences est celui qui, réunissant à une imagination. profonde une grande sévérité dans le raisonnement et dans ses expériences, est à la fois tourmenté par le désir de s'élever aux causes des phénomènes et par la crainte de se tromper sur celles qu'il leur assignerait » (2).

Pour ce philosophe-savant, l'expérience reste le critérium de la vérité, mais elle n'en est point la source unique.

Pour lui, la crainte de se tromper sur les causes qu'il est tenté d'assigner aux phénomènes est le prudent correctif du désir de s'élever à ces causes mais ce scrupule ne le fera pas renoncer à ses plus nobles ambitions.

Pour lui, hypothèses et théories sont avant tout des instruments de travail, des outils de recherche; il y voit un objectum quo plutôt qu'un objectum quod; il n'oublie pas que, d'après la formule classique, l'objet est dans le connaissant, selon le mode d'être du sujet connaissant, et que son esprit déforme plus ou moins ce qu'il saisit; que notre manière de nous figurer les choses n'est pas une superposition exacte du jugement

(1) Duhem s'inspirait de Pascal : « nous avons une impuissance de prouver invincible à tout le dogmatisme; nous avons une idée de la vérité, invincible à tout le pyrrhonisme ».

(2) Ces paroles de l'illustre astronome ont été rappelées par Biot dans ses Mélanges scientifiques et littéraires, t. II, p. 209; elles se lisent dans l'Exposition du Système du Monde, et ont été citées dans les Lectures scientifiques de M. Gay, à la p. 767.

à l'objet, une adæquatio rei et intellectus, une égalité. Il voit et sait tout cela. Mais la connaissance plus ou moins exacte que nous acquérons des choses de la nature est une connaissance quand même. La représentation que l'on s'en fait n'est pas une photographie, c'est un portrait; pourquoi ce portrait ne réaliserait-il pas une certaine conformité avec l'objet représenté, et serait-il nécessairement dénué de toute ressemblance? Pourquoi n'y aurait-il pas là un reflet de vérité? Est-ce que nous ne lisons pas dans le spectre de la lumière renvoyée par une planète la constitution du Soleil dont le rayon est parti?

Les choses, a-t-on dit sentencieusement, peuvent se représenter de bien des façons, mais elles ne se passent que d'une seule manière. C'est vrai; mais ce n'est pas à dire que cette unique manière ne pourra jamais coincider avec notre concept. Le nombre de manières n'est pas infini, et la science ne fait que débuter; le temps travaille avec elle et pour elle. On découvrira beaucoup de choses, au cours des siècles, dont nous n'avons en ce moment pas la moindre idée.

L'hypothèse n'est donc point réduite au rôle d'objet purement symbolique et fantaisiste, ne possédant aucune conformité de nature avec la réalité ! C'est non seulement un moyen de connaître, mais encore de comprendre, dont il ne faut pas mésuser, mais dont il serait coupable de ne pas user.

<< La certitude de ne jamais atteindre l'absolu ne doit pas nous décourager de serrer de près la réalité », a dit très justement A. de Lapparent (1).

(1) Loc. cit. p. 240. Notre éminent collègue des Facultés catholiques de Paris se riait agréablement, au même endroit, des physiciens qui « jongleraient trop audacieusement avec les idées représentatives » ; mais le conditionnel employé et le contexte montraient bien qu'il ne traitait pas de jonglerie l'usage rationnel de ces représentations, auquel son brillant esprit recourait à l'occasion, et dont il savait tirer le meilleur parti.

<< Si dans le passé on a eu trop de confiance dans la puissance du génie humain, se croyant très près de découvrir la raison suprême des choses, on tombe à présent dans l'excès contraire c'est l'avis de » ; M. Righi. Il l'énonce au début d'une étude très documentée des plus récentes théories des phénomènes électriques (1). L'excès consisterait à ne voir dans ces merveilleuses théories que des chimères.

M. J. J. Thomson y voit bien autre chose: « En fait, déclare-t-il, le fluide électrique nous est actuellement mieux connu que d'autres fluides, tels que l'air et l'eau » (2). Relevons ce propos, car nous savons pas mal de choses sur l'air et sur l'eau. Les hypothèses et les théories de l'électricité correspondent par conséquent en quelques points à la réalité, et il est permis de croire que ces correspondances deviendront de plus en plus nombreuses et de plus en plus étroites: nous ne prétendions pas démontrer autre chose avant de nous engager dans ces études.

Nous devions le faire : c'est fait !

Parmi ces théories, il en est une qui, après avoir acquis droit de cité dans la science, en avait ensuite été bannie, parce qu'elle avait cessé de s'harmoniser avec des faits, ultérieurement découverts; d'autres lui ont succédé, qui ont subi le même sort, pour la même raison. Mais les théories meurent rarement tout entières. Le mouvement de la science se poursuit avec logique et avec suite; on l'a comparé au progrès de la vie dont chaque état subsiste dans l'état suivant, et on peut lui appliquer le jugement de Paul Bourget, que

(1) Righi La Théorie Moderne des phénomènes physiques (Traduction Neculcea; Paris, 1906), p. 6.

(2) J. J. Thomson, Electricity and Matter, p. 89; citation en exergue de - M. Drumaux, dans la Théorie corpusculaire de l'Électricité (Paris, GauthierVillars, 1911).

l'on ne s'attendait peut-être pas à entendre citer dans un travail scientifique : « Vivre, c'est évoluer, mais c'est aussi durer».

Pour devenir acceptable, il suffit souvent à une doctrine de quelques modifications ou corrections, qui lui permettent de reprendre plus étroitement contact avec la réalité.

C'est ce qui est arrivé.

Et l'on se prend à augurer que la science pénétrera de plus en plus profondément dans la connaissance de l'électricité, cette chose si pleine d'énigmes, si grande et si puissante, que l'on soupçonne d'être, avec l'éther, le principal d'entre les matériaux de l'Univers.

AIME WITZ

Correspondant de l'Institut,
Doyen honoraire de la

Faculté catholique des Sciences de Lille.

LA NOTION PSYCHOLOGIQUE

DE

SUBCONSCIENCE O

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Vous souvient-il de ce valet de comédie — le valet d'Harpagon, je crois qui endosse tour à tour, avec une gravité burlesque, la livrée de tous les offices d'une grande maison: tantôt laquais, tantôt intendant, tantôt cocher, tantôt maître-queux ?...

Eh bien ! la subconscience joue un peu, aujourd'hui, ce rôle de « valet à tout faire ». On la sonne de dix côtés à la fois... Le psychologue, dans ses promenades à travers les phénomènes conscients, rencontre-t-il une lacune, un fossé trop large? qu'à cela ne tienne : le « subconscient » jettera la passerelle... Le critique d'art prétend-il, devant un chef-d'œuvre, pénétrer le secret de l'inspiration géniale?« élaboration subconsciente », « irruption magnifique de la subconscience dans la conscience claire »... L'historien des religions, naïvement incrédule trop souvent, se pique-t-il d'enlever tout mystère aux origines du sentiment religieux, aux mobiles des conversions, ou bien, à ces phénomènes si délicats à définir que sont les « états mystiques»? c'est encore le « subconscient » qui

(*) Cet article reproduit une conférence prononcée devant un auditoire de jeunes gens à peine initiés aux recherches psychologiques. Aux amis qui nous ont demandé la publication d'une causerie aussi dénuée de toute prétention savante, nous laissons, devant le lecteur bénévole, l'entière responsabilité de leur initiative. Ils ont pensé que les pages qu'on va lire pourraient servir d'introduction facile à quelques études plus techniques, que nous écrirons peut-être pour cette Revue.

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