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de l'archevêque, déclarant que, si on ne lui rendait justice, il confirmerait les censures que ce prélat avait prononcées 1.

Le prince Édouard d'Angleterre, étant encore en Palestine, y vit arriver avec grande joie un personnage renommé pour sa piété et sa prudence. C'était Thébald ou Théobald, alors archidiacre de Liége. Il était né à Plaisance, de la noble famille des Visconti. On remarqua en lui, dès sa jeunesse, une vertu peu commune et une application extraordinaire à l'étude ; il acquit surtout une connaissance parfaite du droit canon. Ayant entendu parler de la sainteté de Jacques de Pécoraria, cardinal-évêque de Préneste, il alla le trouver et se mit humblement à son service. Il en eut d'autant plus de joie, que le cardinal lui parut encore plus saint que ne disait la renommée. Il le suivit dans la légation de France, l'an 1239, sous le pape Grégoire IX. Il y fut successivement chanoine de Lyon et archidiacre de Liége. Il refusa l'évêché de Plaisance, que lui offait le pape Innocent IV. Il revenait de Rome, quand l'archevêque de Lyon, Philippe, le supplia instamment de rester auprès de lui pendant le concile général, afin de lui apprendre comment se conduire à l'égard du Pape et des cardinaux. Le pieux archidiacre de Liége passait une partie de son temps à l'université de Paris, pour s'y perfectionner dans les sciences convenables à son état. Le saint roi Louis lui témoignait une affeetion et une vénération si grandes, que beaucoup s'étonnaient qu'un si excellent roi honorât tant un ecclésiastique qui n'occupait point une haute dignité. Mais le saint roi savait bien ce qu'il faisait. Il avait appris de lui et vu lui-même tant de choses merveilleuses, qu'il le regardait comme un temple de Dieu et un sanctuaire de l'EspritSaint. Le cardinal-légat Ottobon, passant en Angleterre pour rétablir la paix entre le roi et les barons, emmena l'archidiacre Théobald avec lui, à cause de son grand amour pour la paix et de sa grâce particulière pour y amener les autres.

Saint Louis et les barons de France s'étant croisés pour la seconde fois, le pieux Théobald regarda comme une honte pour les clercs et les prélats de ne pas suivre l'exemple des laïques. Il prit donc la croix avec beaucoup de dévotion, et se rendit en Palestine. Le prince Édouard d'Angleterre et sa sœur Béatrix, comtesse de Bretagne, l'y reçurent avec beaucoup de joie. Et de fait sa présence n'y fut pas inutile. Il ranima le courage des pusillanimes, apaisa les différends, et confirma un grand nombre dans leur sainte résolution 2.

C'était en 1271. Tout à coup l'on apprit en Palestine que le saint

1 Raynald, 1264, n. 66. Italic., t. 3, p. 599 et seqq.

• Vita Gregor. X. Apud Muratori. Scriptor. rer.

archidiacre de Liége avait été élu Pape. Il y avait près de trois ans que la Chaire apostolique était vacante, les cardinaux assemblés à Viterbe n'ayant pu s'accorder sur le choix d'un pontife. Ennuyés à la fin de ne pouvoir rien terminer, ils eurent recours à un compromis, et les six cardinaux auxquels tous les autres avaient remis leur pouvoir élurent unanimement notre saint, le 1er septembre 1271. Le nouveau Pape reçut l'acte de son élection à Ptolémaïde ou SaintJean d'Acre, y acquiesça le 27 d'octobre, et prit le nom de Grégoire X. La nouvelle de son élection donna bien de la joie aux Chrétiens de la terre sainte, espérant qu'il leur enverrait un grand secours. Et lui-même, dans un sermon qu'il fit au moment de partir, s'écria avec le Psalmiste: Si je t'oublie, ô Jérusalem ! que ma main droite soit mise en oubli ! Que ma langue s'attache à mon palais, si je ne te garde pas dans mon souvenir, si je ne mets pas Jérusalem au commencement de toutes mes joies 1.

Un fait des plus curieux, mais ignoré ou négligé des historiens modernes, c'est que la première chose que le nouveau Pape, saint Grégoire X, eut à faire, ce fut de répondre, comme chef de l'Église catholique, et d'envoyer des nonces au grand khan des Tartares, à l'empereur de la Chine, Koublaï ou Chi-Tsou. Ce puissant monarque, de l'avis de ses princes, envoya au Pape les deux frères vénitiens Polo, avec un seigneur de l'empire chinois, nommé Gogak. Ces trois ambassadeurs devaient demander au Pontife romain cent hommes savants et bien instruits dans la loi chrétienne, qui pussent montrer que la foi des Chrétiens doit être préférée à toutes les sectes diverses, qu'elle est l'unique voie du salut, et que les dieux des Tartares étaient des démons qui en imposaient aux Orientaux. Car l'empereur, ayant beaucoup entendu parler de la foi catholique, mais voyant avec quelle témérité les savants de la Tartarie et de la Chine soutenaient leur créance, ne savait de quel côté pencher, ni quelle voie embrasser comme la véritable. Il pria, de plus, les ambassadeurs de lui rapporter un peu d'huile de la lampe qui brûlait à Jérusalem devant le Seigneur, persuadé qu'elle ne lui serait pas peu utile si le Christ était le Sauveur du monde.

Après trois ans de voyage, le seigneur tartare étant demeuré en route pour maladie, les deux autres ambassadeurs arrivèrent à SaintJean d'Acre. Y ayant appris la mort du pape Clément IV, ils s'adressèrent à l'archidiacre Thébald, qui faisait les fonctions d'internonce apostolique en Palestine. Il leur conseilla d'attendre qu'il y eût un nouveau Pape. Dans l'intervalle, ils allèrent à Venise, leur

1 Psalm. 136.

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De 1270 patrie, et, après deux ans d'attente, repassèrent à Saint-Jean d'Acre, avec le fils de l'un d'eux, le célèbre Marc Paul, qui a écrit l'histoire de leur voyage. Le nonce Thébald leur donna des lettres avec une exposition de la foi chrétienne. A peine s'étaient-ils mis en route, que l'archidiacre Thébald, devenu le pape Grégoire X, les rappela, leur donna d'autres lettres pour le suprême empereur des Tartares, et leur adjoignit deux frères Prêcheurs, Nicolas et Guillaume de Tripoli, pour éclairer les Tartares de la vérité de l'Évangile. Ils furent reçus avec une extrême bienveillance par l'empereur des Tartares et de la Chine. Ils lui présentèrent les lettres du nouveau Pape, ainsi que l'huile de la lampe du Saint-Sépulcre, qu'il fit placer dans un lieu honorable. C'est ce que témoigne Marc Paul, qui était présent 1.

Saint Grégoire X s'embarqua au milieu de l'hiver, à Ptolémaïde. Le prince Édouard d'Angleterre le fournit abondamment de toutes choses. L'empereur grec, Michel Paléologue, se plaignit amicalement de ce qu'il n'avait point passé à Constantinople, où il eût été reçu avec la pompe et la joie les plus grandes 2. Enfin, il arriva heureusement au port de Brindes, le 1er janvier 1272. Son arrivée répandit la joie dans toute l'Italie et dans toute la chrétienté. A Bénévent, le roi Charles de Sicile vint à sa rencontre, l'accompagna par tout son royaume, et lui servait d'écuyer. A Cépérano, il trouva plusieurs cardinaux qui venaient au-devant, entra avec eux à Viterbe, le 10 février, y revêtit le manteau papal, et prit solennellement le nom de Grégoire, tant à cause de sa dévotion pour saint Grégoire le Grand que parce que sa fête était proche 3.

Étant encore sur les terres du roi de Sicile, il reçut une députation des plus grands de Rome, qui le priaient instamment d'y venir. Mais il considéra qu'à Rome il pourrait trouver d'autres affaires qui le détourneraient de celle de la terre sainte, à laquelle il voulait donner ses premiers soins. Il alla donc droit à Viterbe, où résidaient les cardinaux et la cour de Rome. Là, sans se donner le temps de se reposer après un si long voyage, et fermant la porte à toutes les autres affaires, il travailla uniquement pendant huit jours au secours de la terre sainte, qu'il avait laissée réduite à l'extrémité. Il engagea Pise, Gênes, Marseille et Venise, à fournir chacune trois galères armées, douze en tout; et, pour subvenir aux frais de la guerre, il donna ordre au recouvrement des legs pieux destinés à cet effet, qui étaient considérables. Le cardinal Raoul, évêque d'Albane,

1 Marc Paul, 1. 1, c. 4. Apud Raynald, 1271, n. 20. epist. 37.3 Vita Greg. X. Apud Muratori, t. 3.

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mort devant Tunis, avait laissé mille onces d'or; Richard, élu roi des Romains, en avait laissé huit mille. L'once d'or peut s'estimer à cinquante francs. Le roi Richard était mort l'année précédente, le second jour d'avril 1.

Le saint pape Grégoire envoya en France l'archevêque de Corinthe, avec une lettre au roi Philippe, où il parle avec effusion de saint Louis, qu'il témoigne avoir aimé de tout son cœur ; il rappelle au fils le zèle de son père pour la délivrance de la terre sainte. Il ajoute : Quand nous y étions, nous avons conféré avec les chefs de l'armée chrétienne, avec les Templiers, les Hospitaliers et les grands du pays, sur les moyens d'en empêcher la ruine totale. Nous en avons encore traité depuis avec nos frères les cardinaux, et nous avons trouvé qu'il faut y envoyer à présent une certaine quantité de troupes et de galères, en attendant un plus grand secours, que nous espérons lui procurer par un concile général. La lettre est du 4me de mars 1272. Et comme le Pape n'était pas encore sacré, son nom n'était pas à la bulle, c'est-à-dire au sceau qui y pendait. Les Templiers avaient ordre d'engager au roi Philippe les terres qu'ils possédaient en France, pour sûreté des deniers qu'il avancerait jusqu'à la somme de vingt-cinq mille marcs d'argent, que le roi prêta en effet; il était même près d'aller en personne au secours de la terre sainte, si le Pape ne l'eût prié de différer jusqu'à ce que les préparatifs de l'expédition fussent achevés 2.

Saint Grégoire X fut sacré à Rome, dans la basilique de SaintPierre, le 27me jour de mars, qui, cette année 1272, était le troisième dimanche de carême. Il fut reconduit avec pompe de la basilique de Saint-Pierre au palais de Latran; le roi Charles de Sicile marchait à sa droite, faisant les fonctions d'écuyer; au repas qui eut lieu ensuite, le même prince voulut servir au Pape le premier plat. A la fin de la solennité, le roi fit au Pape l'hommage et le serment de fidélité qu'il devait, pour le royaume de Sicile 3. Ce sont les paroles du biographe contemporain de Grégoire X.

Deux jours après, le Pape fit expédier une lettre circulaire à tous les évêques, pour leur donner part de son ordination, suivant la coutume. Cette lettre fut suivie de près d'une autre, également adressée aux évêques, pour la convocation d'un concile général. Le saint Pape en marque principalement trois causes : le schisme des Grecs, le mauvais état de la terre sainte, dont il était témoin oculaire, les vices et les erreurs qui se multipliaient dans l'Église. Voulant donc,

1 Raynald, 1272, n. 2. — 2 Ibid., n. 5-8. p. 602.

- Vita Greg. X. Apud Muratori, t. 3,

dit-il, remédier à tant de maux par un conseil commun, nous vous demandons de vous trouver, le 1er de mai de l'an 1274, au lieu que nous vous indiquerons dans le temps convenable. Nous voulons qu'en chaque province demeurent un ou deux évêques pour exercer les fonctions épiscopales ; et que ceux qui demeureront envoient des députés au concile, aussi bien que les chapitres, tant des cathédrales que des collégiales. Cependant vous examinerez et mettrez par écrit ce qui a besoin de correction, pour l'apporter au concile. La bulle est du dernier jour de mars 12721.

Pour prendre soin du spirituel dans la terre sainte, le pape Grégoire donna le nom de patriarche de Jérusalem à frère Thomas de Léontine en Sicile, de l'ordre des frères Prêcheurs, qui avait été évêque de Bethlehem, et que le pape Clément IV avait transféré à Cosence en Italie, l'an 1267. On l'avait postulé pour le siége de Messine, mais le pape ne voulait pas confirmer l'élection, et le fit patriarche de Jérusalem, le 21 d'avril 1272. Il y joignit l'administration de l'évêché d'Acre, déjà unie par Urbain IV au patriarcat de Jérusalem, dont les revenus étaient possédés par les infidèles. Saint Grégoire X choisit Thomas pour ce siége, comme un homme d'un mérite singulier et qui avait grande connaissance des affaires de la terre sainte, par le séjour qu'il y avait fait étant évêque de Bethlehem et légat du Saint-Siége. Il le fit encore son légat en Arménie, en Chypre, dans la principauté d'Antioche, les îles voisines et toute la côte d'Orient; il lui recommanda surtout de travailler à la conversion des mœurs des chrétiens latins de ces provinces. Voici comme il lui en parle dans une de ses lettres: Vous savez par vous-même les crimes énormes qui s'y commettent, et que les malheureux esclaves de la volupté, s'abandonnant aux mouvements de la chair, ont attiré la colère de Dieu sur Antioche et tant d'autres lieux que les ennemis ont détruits. Il est étonnant que nos frères soient si peu touchés de ces exemples, qu'ils continuent dans les mêmes désordres, sans s'en repentir, jusqu'à ce qu'ils périssent eux-mêmes. Ainsi parle le saint pape Grégoire X. Nous avons vu le légát Eudes de Châteauroux tenir au sire de Joinville le même langage sur les habitants de Saint-Jean d'Acre, et prévoir dès lors leur ruine totale.

Avant que le patriarche Thomas partît pour la terre sainte, le Pape le chargea de l'argent qu'il avait reçu du roi de France, pour lui procurer du secours, et lui donna ordre de voir en passant le roi de Sicile, pour concerter avec lui la manière de l'employer. Le patriarche, en arrivant à la terre sainte, y amena cinq cents hommes,

1 Raynald, 1272, n. 9, etc.

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