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aussi réciproquement? Ses fidèles serviteurs lui disent avec le Psalmiste: « Nous voilà tout prêts, ô Seigneur, d'accomplir constam» ment votre volonté : » Ecce venio ut faciam, Deus, voluntatem tuam'. Vous voyez les hommes qui servent Dieu; mais écoutez le même Psalmiste: « Dieu fera la volonté de ceux qui le craignent: » Voluntatem timentium se faciet2. Voilà Dieu qui leur rend le change, et les sert aussi à son tour. Vous servez Dieu, Dieu vous sert; vous faites sa volonté, et il fait la vôtre: Si ideò times Deum ut facias ejus voluntatem, ille quodam modo ministrat tibi, facit voluntatem tuam. Pour nous apprendre, Chrétiens, que Dieu est un ami sincère, qui n'a rien de réservé pour les siens, et qui, étudiant les désirs de ceux qui le craignent, leur permet d'user de ses biens avec une espèce d'empire: Voluntatem timentium se faciet.

Mais encore que cette bonté s'étende généralement sur tous ses amis, c'est-à-dire, sur tous les justes, les paroles de mon texte nous font bien connoître, que ces justes persévérants, ces enfants qui n'ont jamais quitté sa maison, ont un droit tout particulier de disposer des biens paternels; et c'est à ceux-là qu'il dit dans son Evangile ces paroles, avec un sentiment de tendresse extraordinaire et singulier: «< Mon fils, vous avez toujours été avec moi, et tout ce qui » est à moi, est à vous: » Fili, tu semper mecum es, et omnia mea tua sunt. Pourquoi me reprochez-vous que je ne vous donne rien? usez vous-même de votre droit, et disposez, comme maître, de tout ce qu'il y a dans ma maison.

C'est donc en vertu de cette innocence, et de cette parole de l'Evangile, que le grand saint François de Paule n'a jamais cru rien d'impossible. Cette sainte familiarité d'un fils, qui sent l'amour de son père, lui donnoit la confiance de tout entreprendre : et un prélat de la cour de Rome, que le pape lui avoit envoyé pour l'examiner, lui représentant les difficultés de l'établissement de son ordre si austère, si pénitent, si mortifié, fut ravi en admiration d'entendre dire à notre grand saint, avec une ferveur d'esprit incroyable, que tout est possible quand on aime Dieu, et qu'on s'étudie de lui plaire; et qu'alors les créatures les plus rebelles sont forcées, par une secrète vertu, de faire la volonté de celui qui s'applique à faire celle de son Dieu. Il n'a point été trompé dans son attente son ordre fleurit dans toute l'Eglise avec cette constante régularité qu'il avoit si bien établie, et qui se soutient sans relâchement depuis deux cents ans.

Ce n'est pas en cette seule rencontre que Dieu a fait connoître à son serviteur, qu'il écoutoit ses désirs. Tous les peuples où il a 1 Psal. XXXIX. 8, 9. —2 Psal. CXLIV. 19. — 3 Enar, in Psal. cxLiv. n. 23. tom. iv. col. 1624.

passé ont ressenti mille et mille fois des effets considérables de ses prières; et quatre de nos rois successivement lui ont rendu ce glorieux témoignage, que dans leurs affaires très-importantes ils n'avoient point trouvé de secours plus prompt, ni de protection plus assurée. Presque toutes les créatures ont senti cette puissance si peu limitée, que Dieu lui donnoit sur ses biens; et je vous raconterois avec joie les miracles presque infinis que Dieu faisoit par son ministère, non-seulement dans les grands besoins, mais encore, s'il se peut dire, sans nécessité, n'étoit que ce détail seroit ennuyeux, et apporteroit peu de fruit. Mais comme de tels miracles, qui se font particulièrement hors des grands besoins, sont le sujet le plus ordinaire de la raillerie des incrédules, il faut qu'à l'occasion du grand saint François je tâche aujourd'hui de leur apprendre, par une doctrine solide, à parler plus révéremment des œuvres de Dieu. Voici donc ce que j'ai vu dans les saintes Lettres, touchant ces sortes de miracles.

Je trouve deux raisons principales, pour lesquelles Dieu étend son bras à des opérations miraculeuses la première, c'est pour montrer sa grandeur, et convaincre les hommes de sa puissance; la seconde, pour faire voir sa bonté et combien il est indulgent à ses serviteurs. Or je remarque cette différence dans ces deux espèces de miracles, que lorsque Dieu veut faire un miracle pour montrer seulement sa toute-puissance, il choisit des occasions extraordinaires. Mais quand il veut faire encore sentir sa bonté, il ne néglige pas les occasions les plus communes. Cela vient de la différence de ces deux divins attributs. La toute-puissance semble surmonter de plus grands obstacles; la bonté descend à des soins plus particuliers. L'Ecriture nous le fait voir en deux chapitres consécutifs du quatrième livre des Rois. Elisée guérit Naaman le lépreux, capitainegénéral de la milice du roi de Syrie, et chef des armées de tout son royaume voilà une occasion extraordinaire, où Dieu veut montrer son pouvoir aux nations infidèles. « Qu'il vienne à moi, dit Elisée, » et qu'il sache qu'Israël n'est point sans prophète : » Veniat ad me, et sciat esse prophetam in Israel. Mais, au chapitre suivant, comme les enfants des prophètes travailloient sur le bord d'un fleuve, l'un d'eux laisse tomber sa cognée dans l'eau, et aussitôt crie à Elisée : Heu! heu! heu! Domine mi, et hoc ipsum mutuò acceperam : « Hélas! » cette cognée n'étoit pas à moi; je l'avois empruntée. » Et encore qu'une rencontre si peu importante semblât ne mériter pas un miracle, néanmoins Dieu, qui se plaît à faire connoître qu'il aime la simplicité de ses serviteurs, et prévient leurs désirs dans les moindres choses, 44 Reg., V. 3.2 Ibid., VI. 5.

fit nager miraculeusement ce fer sur les eaux, au commandement d'Elisée, et le rendit à celui qui l'avoit perdu. Et d'où vient cela, Chrétiens, si ce n'est que notre grand Dieu, qui n'est pas moins bon que puissant, nous montrant sa toute-puissance dans les entreprises éclatantes, veut bien aussi, quand il lui plaît, montrer dans les moindres la facilité incroyable avec laquelle il s'abandonne à ses serviteurs, pour justifier cette parole: Omnia mea tua sunt?

Puisque le grand saint François de Paule a été choisi de Dieu en son temps, pour faire éclater en sa personne cette merveilleuse communication qu'il donne de sa puissance à ses bons amis, je ne m'étonne pas, Chrétiens, si les fidèles de Jésus-Christ ont eu tant de confiance en lui durant sa vie, ni si elle dure encore, et a pris de nouvelles forces après sa mort. Je ne m'étonne pas de voir sa mémoire singulièrement honorée par la dévotion publique, son ordre révéré par toute l'Eglise, et les temples qui portent son nom, et sont consacrés à sa mémoire, fréquentés avec grand concours par tous les fidèles.

Mais ce qui m'étonne, mes Frères, ce que je ne puis vous dissimuler, ce que je voudrois pouvoir dire avec tant de force que les cœurs les plus durs en fussent touchés, c'est lorsqu'il arrive que ces mêmes temples, où la mémoire de François de Paule, où les bons exemples de ses religieux, enfin, pour abréger c ediscours, où toutes choses inspirent la dévotion, deviennent le théâtre de l'irrévérence de quelques particuliers audacieux. Je n'accuse pas tout le monde, et je ne doute pas, au contraire, que cette église ne soit fréquentée par des personnes d'une piété très-recommandable. Mais qui pourroit souffrir sans douleur, que sa sainteté soit déshonorée par les désordres de ceux qui, ne respectant ni Dieu ni les hommes, la profanent tous les jours par leurs insolences? Que s'il y avoit dans cet auditoire quelques-uns de cette troupe scandaleuse, permettez-moi de leur demander, que leur a fait ce saint lieu qu'ils choisissent pour le profaner par leurs paroles, par leurs actions, par leurs contenances impies; que leur ont fait ces religieux, vrais enfants et imitateurs du grand saint François de Paule: et leur vie a-t-elle mérité, au milieu de tant de travaux que leur fait subir volontairement leur mortification et leur pénitence, qu'on leur ajoute encore cette peine, qui est la seule qui les afflige, de voir mépriser à leurs yeux le maître qu'ils servent ?

Mais laissons les hommes mortels, et parlons des intérêts du Sauveur des âmes. Que leur a fait Jésus-Christ qu'ils viennent outrager jusque dans son temple? Pendant que le prêtre est saisi de crainte, dans une profonde considération des sacrements dont il

est ministre; pendant que le Saint-Esprit descend sur l'autel pour y opérer les sacrés mystères, que les anges les révèrent, que les démons tremblent, que les âmes saintes et pieuses de nos frères qui sont décédés attendent leur soulagement des saints sacrifices: ces impies discourent aussi librement, que si tout ce mystère étoit une fable. D'où leur vient cette hardiesse devant Jésus-Christ? est-ce qu'ils ne le connoissent pas, parce qu'il se cache; ou qu'ils le méprisent, parce qu'il se taît? Vive le Seigneur tout-puissant, en la présence duquel je parle ce Dieu qui se tait maintenant, ne se taira pas toujours; ce Dieu qui se tient maintenant caché, saura bien quelque jour paroître pour leur confusion éternelle. J'ai cru que je ne devois pas quitter cette chaire, sans leur donner ce charitable avertissement. C'est honorer saint François de Paule que de travailler, comme nous pouvons, à purger son église de ces scandaleux ; et je les exhorte, en Notre-Seigneur, de profiter de cette instruction, s'ils ne veulent être regardés comme des profanateurs publics de tous les mystères du christianisme.

Mais après leur avoir parlé je retourne à vous, Chrétiens, qui venez en ce temple pour adorer Dieu, et pour y écouter sa sainte parole. Que vous dirai-je aujourd'hui, et par où conclurai-je ce dernier discours? Ce sera par ces beaux mots de l'apôtre : Deus autem spei repleat vos gaudio et pace in credendo, ut abundetis in spe et virtute Spiritûs sancti1: « Que le Dieu de mon espérance vous rem» plisse de joie et de paix, en croyant à la parole de son Evangile; >> afin que vous abondiez en espérance, et en la vertu du Saint>> Esprit. » C'est l'adieu que j'ai à vous dire : nos remercîments sont des vœux; nos adieux, des instructions et des prières. Que ce grand Dieu de notre espérance, pour vous récompenser de l'attention que vous avez donnée à son Evangile, vous fasse la grâce d'en profiter. C'est ce que je demande pour vous demandez pour moi réciproquement, que je puisse tous les jours apprendre à traiter saintement et fidèlement la parole de vérité; que, non-seulement je la traite, mais que je m'en nourrisse et que j'en vive. Je vous quitte avec ce mot; et ce ne sera pas néanmoins sans vous avoir desiré à tous, dans toute l'étendue de mon cœur, la félicité éternelle, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Amen.

1 Rom., xv. 13.

II PANÉGYRIQUE

DE SAINT FRANÇOIS DE PAULE,

PRÊCHÉ A METZ.

Combien la pénitence est nécessaire à tous les chrétiens quelle en doit être l'étendue. Avec quel courage saint François l'a pratiquée. Sa conduite admirable à la cour de Louis XI. Comment l'amour divin étoit-il le principe de la joie qu'il ressentoit parmi ses grandes austérités. Efficace de cet amour dans nos cœurs. Exhortation à la pénitence, pour honorer dignement les saints.

Charitas Christi urget nos.

La charité de Jésus-Christ nous presse. 2 Cor., v. 14.

Rendons cet honneur à l'humilité, qu'elle est seule digne de louange. La louange en cela est contraire aux autres choses que nous estimons, qu'elle perd son prix étant recherchée, et que sa valeur s'augmente quand on la méprise. Encore que les philosophes fussent des animaux de gloire, comme les appelle Tertullien '. Philosophus animal gloriæ, ils ont reconnu la vérité de ce que je viens de vous dire; et voici la raison qu'ils en ont rendue : c'est que la gloire n'a point de corps, sinon en tant qu'elle est attachée à la vertu dont elle n'est qu'une dépendance. C'est pourquoi, disoient-ils, il faut diriger ses intentions à la vertu seule : la gloire, comme un de ses apanages, la doit suivre sans qu'on y pense. Mais la religion chrétienne élève bien plus haut nos pensées : elle nous apprend que Dieu est le seul qui a de la majesté et de la gloire, et par conséquent que c'est à lui seul de la distribuer, ainsi qu'il lui plaît, à ses créatures, selon qu'elles s'approchent de lui. Or, encore que Dieu soit très-haut, il est néanmoins inaccessible aux âmes qui veulent trop s'élever, et on ne l'approche qu'en s'abaissant de sorte que la gloire n'est qu'une ombre et un fantôme, si elle n'est soutenue par le fondement de l'humilité, qui attire les louanges en les rejetant. De là vient que l'Eglise dit aujourd'hui dans la collecte de saint François : « O Dieu, qui êtes la gloire des humbles : » Deus, humilium celsitudo. C'est à cette gloire solide qu'il faut porter notre ambition. Monseigneur, la gloire du monde vous doit être devenue en quelque façon méprisable par votre propre abondance. Certes, notre histoire ne se taira pas de vos fameuses expéditions; et la postérité la plus éloignée ne pourra lire sans étonnement toutes les merveilles de votre vie. Les peuples, que vous conservez, ne perdront jamais la mémoire d'une si heureuse protection: ils diront à leurs descendants jusqu'aux dernières générations, que sous le grand maréchal de Schomberg, dans le déréglement des affaires, et au milieu de la

▲ De animâ, n. 1.

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