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à Dieu; autrement tout périt et tout passe avec le monde qui passe lui-même, et enveloppe tout dans sa ruine : c'est pourquoi il faut tout donner à Dieu. Saint Paul possédé de cette pensée disoit : « Je >> donnerai tout: » Ego autem impendam. Ce n'est pas assez; aussi ajoute-t-il : « Et je me livrerai moi-même pour le salut de vos » âmes » Superimpendar ipse pro animabus vestris 1.

SERMON

POUR LA FÊTE DES SAINTS ANGES GARDIENS. Bienheureuse société que nous avons avec les saints anges. Caractère particulier de leur charité envers les hommes, dans le commerce qu'ils ont avec eux. Miséricordieuse condescendance que cette charité leur inspire. Quelle marque de reconnoissance nous leur devons. Témoignage qu'ils rendront contre nous au dernier jour, et vengeance qu'ils exerceront sur nous, si nous n'avons pas profité de leurs bons offices.

Amen dico vobis, videbitis cœlum apertum, et angelos Dei ascendentes et descendentes.

Je vous dis en vérité, vous verrez les cieux ouverts, et les anges du ciel montants et descendants. Paroles du Fils de Dien à Nathanaël en S. Jean, ch. 1. y. 51.

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Il paroît par les saintes lettres, que Satan et ses anges montent et descendent. «Ils montent, dit saint Bernard, par l'orgueil, et ils >> descendent contre nous par l'envie : » Ascendit studio vanitatis, descendit livore malignitatis. Ils ont entrepris de monter, lorsqu'ils ont suivi celui qui a dit : Ascendam. « Je m'élèverai et je me rendrai » égal au Très-Haut. » Mais leur audace étant repoussée, ils sont descendus, Chrétiens, pleins de rage et de désespoir, comme dit saint Jean dans l'Apocalypse : « O terre, ô mer, malheur à vous; » parce que le diable descend à vous, plein d'une grande colère ! » Væ terræ, et mari, quia descendit diabolus ad vos habens iram magnam 3 ! Ainsi son élévation présomptueuse est suivie d'une descente cruelle; et quoique Dieu l'ait banni de devant sa face, n'ose-t-il pas encore s'y présenter pour se rendre notre accusateur, selon ce qu'écrit le même apôtre? N'est-ce pas pour cela qu'il est appelé l'accusateur des fidèles, qui les accuse nuit et jour en la présence de Dieu : Accusator fratrum nostrorum, qui accusabat illos die ac nocte"? Et en effet, ne lisons-nous pas qu'il s'est trouvé avec les saints anges pour accuser le fidèle Job? Adfuit cum illis etiam Satan 5. Mais étant monté devant Dieu pour le calomnier avec artifice, il est aussi bientôt descendu pour le persécuter avec fureur : tellement que toute sa vie c'est un mouvement éternel, par lequel il monte et descend méditant toujours en lui-même le dessein de notre ruine.

1 2 Cor., XII. 15. - 2 In Ps. Qui habitat, Serm. xi. n. 2. tom. 1. col. 361.- 3 Apoc., x11. 12. -4 Ibid., 10.- 5 Job, 1. 6.

Que si cet esprit malfaisant se remue continuellement avec ses complices pour persécuter les fidèles, Chrétiens, les saints anges ne sont pas oisifs, et ils se remuent pour les secourir : c'est pourquoi vous les voyez monter et descendre, ascendentes et descendentes; et j'espère vous faire voir aisément que tout cela se fait pour notre salut, après que nous aurons imploré l'assistance du Saint-Esprit par l'intercession de la sainte Vierge. Ave.

Si vous n'avez pas assez entendu la dignité de notre nature, et la grandeur de nos espérances, vous le pourrez connoître aisément par la sainte solennité que nous célébrons en cette journée. C'est ici qu'il vous faut apprendre, par la sainte société que nous avons avec les saints anges, que notre origine est céleste, que l'homme n'est pas ce que nous voyons; et que ces membres, que cette figure, et enfin tout l'extérieur de ce corps mortel nous le cache, plutôt qu'il ne nous le montre. Car puisque nous voyons ces esprits bienheureux, destinés à notre conduite, venir converser avec les hommes, et se faire leurs compagnons et leurs frères ; puisque l'amour chaste qu'ils ont pour les hommes leur fait quitter le ciel pour la terre, et trouver leur paradis parmi nous, ne devons-nous pas reconnoître qu'il y a quelque chose en l'homme qui l'approche de ces esprits immortels, et qui est capable de les inviter à se réjouir de notre alliance? C'est ce que le grand Augustin nous explique admirablement par cette excellente doctrine 1, sur laquelle j'établirai ce discours : c'est qu'encore que les saints anges soient si fort au-dessus de nous par leur dignité naturelle, il ne laisse pas d'être véritable que nous sommes égaux en ce point que ce qui rend les anges heureux fait aussi le bonheur des hommes; que nous buvons les uns et les autres à la même fontaine de vie, qui n'est autre que la vérité éternelle; et que nous pouvons tous chanter ensemble, par un admirable concert, ce verset du divin Psalmiste: Mihi autem adhærere Deo bonum est2: «Tout mon bien, c'est d'être uni à mon Dieu » par de chastes embrassements et de mettre en lui mon repos.

Sur ce fondement, Chrétiens, il est bien aisé d'établir la société de l'homme et de l'ange: car c'est une loi immuable, que les esprits qui s'unissent à Dieu se trouvent en même temps tous unis ensemble. Ceux qui puisent dans les ruisseaux, et qui aiment les créatures, se partagent en des soins contraires, et divisent leurs affections. Mais ceux qui vont à la source même, au principe de tous les êtres, c'està-dire au souverain bien, se trouvant tous en cette unité, et se rassemblant à ce centre, ils y prennent un esprit de paix et un saint ▲ In Joan., Tract, xx111. n. 5. tom, 111. part. 1. col. 474.-2 Ps. LXXII. 28.

amour les uns pour les autres; tellement que toute leur joie, c'est d'être associés éternellement dans la possession de leur commun bien ce qui fait, dit saint Augustin, qu'ils font tous ensemble un même royaume et une même cité de Dieu : Habent et cum illo cui adhærent et inter se societatem sanctam, suntque una civitas Dei1. D'où il est aisé de conclure que les hommes, non moins que les anges, étant faits pour jouir de Dieu, ils ne composent les uns et les autres qu'un même peuple et un même empire, où l'on adore le même prince, où l'on est régi par la même loi : je veux dire par la charité, qui est la loi des esprits célestes, et la loi des hommes mortels; et qui, se répandant du ciel en la terre, fait une même société des habitants de l'un et de l'autre. C'est, mes Frères, de cette alliance que j'espère vous entretenir, et vous en montrer les secrets dans le texte de mon Evangile.

Car quel est ce nouveau spectacle que le Sauveur nous y représente? d'où vient que les cieux sont ouverts? et que veulent dire ces anges qui montent et descendent d'un vol si léger, de la terre au ciel, du ciel en la terre? Chrétiens, ne voyez-vous pas que ces esprits pacifiques viennent rétablir le commerce que les hommes avoient rompu en prenant le parti rebelle de leurs séditieux compagnons? La terre n'est plus ennemie du ciel; le ciel n'est plus contraire à la terre : le passage de l'un à l'autre est tout couvert d'esprits bienheureux dont la charité officieuse entretient une parfaite communication entre le lieu de pèlerinage et notre céleste patrie.

C'est, Messieurs, pour cette raison que vous les voyez monter et descendre ascendentes et descendentes. Ils descendent de Dieu aux hommes, ils remontent des hommes à Dieu; parce que la sainte alliance qu'ils ont renouvelée avec nous, les charge d'une double ambassade. Ils sont les ambassadeurs de Dieu vers les hommes, ils sont les ambassadeurs des hommes vers Dieu. Quelle merveille! nous dit saint Bernard; Chrétiens, le pourrez-vous croire : ils ne sont pas seulement les anges de Dieu, mais encore les anges des hommes Illos utique spiritus tam felices, et tuos ad nos, et nostros ad te, angelos facis : « Oui, Seigneur, nous dit ce saint homme, ils » sont vos anges, et ils sont les nôtres ; » anges, c'est-à-dire, envoyés : ils sont donc les anges de Dieu, parce qu'il nous les envoie pour nous assister; et ils sont les anges des hommes, parce que nous les lui renvoyons pour l'apaiser : ils viennent à nous, chargés de ses dons; ils retournent chargés de nos vœux ils descendent pour nous conduire, ils remontent pour porter à Dieu nos désirs et nos

1 S. Aug., de Civit. Dei, lib. x11. cap. 9. t. vII. col. 308.-2 In Ps. Qui habitat, Serm. XII. n. 3. t. 1. col. 862.

bonnes œuvres? Tel est l'emploi et le ministère de ces bienheureux gardiens c'est ce qui les fait monter et descendre, ascendentes et descendentes. Vous voyez en ce mouvement la double assistance que nous recevons par leur entremise; et vous voyez les deux points qui partageront ce discours. Dans le texte que j'ai rapporté, la descente est précédée par l'élévation; mais permettez-moi, Chrétiens, que, pour suivre l'ordre du raisonnement, je laisse un peu l'ordre des paroles, et que je parle avant toutes choses de leur descente mystérieuse.

PREMIER POINT.

Il ne suffit pas, Chrétiens, que nous remarquions aujourd'hui que les anges descendent du ciel en la terre: si vous n'entendez rien par ce mouvement sinon qu'ils passent d'un lieu à un autre, vous n'avez pas encore compris le mystère. Il faut élever nos pensées plus haut et concevoir dans cette descente le caractère particulier de la charité des saints anges, qui la rend différente de celle des hommes. Je m'explique, et je dis, Messieurs, qu'encore que la charité soit la même dans les anges et dans les hommes, qu'elle soit dans tous les deux de même nature, qu'elle dépende d'un même principe; toutefois elle agit en eux par deux mouvements opposés. Elle élève les hommes mortels de la terre au ciel, de la créature au Créateur; au contraire elle pousse les esprits célestes du ciel en la terre, et du Créateur à la créature. La charité nous fait monter, la charité les fait descendre: Chrétiens, c'est un grand mystère que vous comprendrez aisément si vous savez faire la distinction de l'état des uns et des autres.

Où sommes-nous, et où sont les anges? quelle est notre vie, et quelle est la leur? Misérables bannis, enfants d'Eve, nous sommes ici relégués bien loin au séjour de misère et de corruption pour eux, ils se reposent dans la patrie, à la source même du bien, dans le centre même du repos qu'ils possèdent par la claire vue. Nous pleurons et nous soupirons sur les fleuves de Babylone: ils boivent à longs traits les eaux toujours vives de ce fleuve qui réjouit la cité de Dieu.

Etant donc dans des états si divers, que ferons-nous les uns et les autres? Les hommes demeureront-ils liés aux biens périssables dont ils sont environnés et les anges seront-ils toujours occupés de leur paix et de leur repos, sans penser à secourir ceux qui travaillent? Non, mes Frères, il n'en est pas ainsi la charité ne le permet pas. Elle nous fait monter, elle fait descendre les anges; elle nous trouve au milieu des biens corruptibles, elle trouve les es

VII.

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prits célestes unis immuablement au bien éternel: elle se met entre deux, et tend la main aux uns et aux autres. Elle nous dit au fond de nos cœurs: Vous qui êtes parmi les créatures, gardez-vous bien de vous arrêter aux créatures; mais dans cette bassesse où vous êtes, faites qu'elles vous conduisent au Créateur: vous qui êtes au bord des ruisseaux, apprenez à remonter à la source. Elle dit aux anges célestes: Vous qui jouissez du Créateur, jetez aussi les yeux sur ses créatures; vous qui êtes à la source, ne dédaignez pas les ruisseaux. Ainsi vous voyez, Chrétiens, qu'une même charité, qui remplit les anges et les hommes, meut différemment les uns et les autres.

Ce que voient les hommes mortels, doit leur faire chercher ce qu'ils ne voient pas, tel doit être le progrès de leur charité. C'est pourquoi l'apôtre saint Jean, le disciple chéri de notre Sauveur, le docteur de la charité, a dit ces beaux mots : « Celui qui n'aime pas » son frère qu'il voit, comment pourra-t-il aimer Dieu qu'il ne voit >> pas? » Qui non diligit fratrem suum quem videt, Deum quem non videt quomodo potest diligere '? Par où il avertit l'âme chrétienne, que le mouvement naturel que le saint amour lui doit inspirer c'est de s'exercer sur ce qu'elle voit, pour tendre à ce que les sens ne pénètrent pas. Aussi est-ce pour cela que nous avons dit, que son propre c'est de s'élever: Ascensiones in corde suo disposuit. Comme elle se trouve en bas, mais se dispose toujours à monter plus haut, elle regarde la terre non pas comme un siége pour se reposer, mais comme un marchepied pour s'avancer, scabellum pedum tuorum 3. Le degré pour aller au trône, ce n'est pas le siége, c'est le marchepied. Elevezvous sur le marchepied, et tàchez d'arriver au trône. Il n'en est pas ainsi des saints anges: unis à la source du bien et du beau, comme nous avons déjà dit, ils ne peuvent pas s'élever, parce qu'il n'y a rien au-dessus de ce qu'ils possèdent. Mais la charité officieuse qui nous fait monter pour aller à eux, les rabaisse aussi pour venir jusqu'à nous par une miséricordieuse condescendance; et voilà quelle est la descente dont il est parlé dans notre évangile.

Réjouissons-nous, Chrétiens, de cette descente bienheureuse, qui unit le ciel et la terre, et fait entrer les esprits célestes dans une sainte société avec les hommes. O bonheur ! ô miséricorde! Car, mes Frères, qui le pourroit cr oire, que ces intelligences sublimes ne dédaignent pas de pauvres mortels; qu'étant au séjour de la félicité et au centre même du repos, elles veulent bien se mêler parmi nos continuelles agitations, et lier une amitié si étroite avec des créatures si foibles, et si peu proportionnées à leur naturelle grandeur? O Dieu, que peuvent-elles trouver en ce monde, que 11 Joan., IV. 20.-2 Ps. LXXXII. 6.-3 PS. CIX. 2.

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