Sayfadaki görseller
PDF
ePub

a très-judicieusement observé que les filles dont la jeunesse est entourée de tant de devoirs et de tant de gêne, n'ont pas besoin d'être invitées au mariage, ni d'être détournées de tout genre de vie qui peut leur faire soupçonner la continuation de leur servitude sous de nouvelles formes.

Il importe, sans doute, qu'il y ait de bonnes mères de famille, mais toutes les personnes du sexe ne le deviennent pas, et ne sont pas même propres à le devenir. Le tableau de la société nous offre, dans presque toutes les familles, quelques personnes du sexe qui n'ont jamais eu l'occasion ou la volonté de trouver un époux.

L'existence des associations religieuses n'est donc pas l'unique cause du célibat libre ou forcé dans lequel vivent tant de personnes du sexe; on n'entre au contraire dans ces associations que quand on n'a aucune vocation pour l'état du mariage; et il est utile qu'il y ait des asiles honorables dans lesquels on puisse chercher le bonheur que l'on n'espère pas rencontrer dans les autres situations de la vie.

:

Nous ajouterons que, sans être mère de famille, on peut bien mériter de l'humanité et de la patrie: certainement le service des pauvres et les soins de l'éducation publique sont dignes d'occuper une âme vertueuse et sensible; il n'est pas nécessaire d'avoir des enfants pour être capable d'en élever c'est quand on n'en a point soi-même qu'on est moins distrait des soins que l'on doit à ceux dont l'éducation nous est confiée. Le service des pauvres exige des travaux et une assiduité qui sont incompatibles avec les embarras d'un ménage. Si on devient mère par le mariage, on le devient aussi par la charité, et cette autre maternité, qui est l'ouvrage de la religion et de la vertu, a même des effets plus étendus que celle qui n'est que l'ouvrage de la

nature.

Nous conviendrons sans peine que le gouvernement ne

doit pas approuver indifféremment toute association religieuse; chaque siècle a ses idées dominantes et ses institutions favorites; les monastères ont donné leur fruit dans le temps de nos jours, on n'y retrouverait plus la ferveur des premiers âges. On leur reprochait d'avoir cessé d'être un objet d'édification pour l'Église et de dégénérer en surcharge pour l'État. Les établissements monastiques avaient été insensiblement minés par les changements plus ou moins rapides survenus dans les opinions et dans les mœurs, par la tendance de l'esprit général vers les professions industrieuses, et par une multitude de causes connues qui avaient donné une nouvelle direction aux pensées des hommes; aucun motif ne pourrait nous engager à faire revivre des institutions usées, qui ne sont point en harmonie avec les besoins de la société, et qui ne tiennent point aux intérêts essentiels de la religion.

Mais la France respirait à peine, dans les premiers moments du règne immortel de Votre Majesté, que, par une sorte d'instinct, par un mouvement national et spontané, la voix publique rappela les sœurs de la Charité dans la capitale. Les humiliations dont elles avaient été abreuvées quelques mois avant les troubles révolutionnaires peuvent être comparées à l'éclair qui précède la tempête; leur retour, antérieur au rétablissement du culte, a été comme le signe heureux de la prochaine alliance du ciel avec la terre.

Les sœurs de la Sagesse, moins nombreuses et plus éloignées du foyer de la révolution, avaient constamment fait, pendant la révolution même, le service de nos principaux hospices militaires.

Les associations des sœurs du Refuge, des sœurs hospitalières, des sœurs de Nevers, des Dames ursulines, des Dames de la Visitation, de Saint-Maur, de Saint-Thomas et quelques autres associations semblables, avaient plutôt été dispersées que dissoutes; les membres de ces associations

fuyaient de ville en ville, en faisant du bien partout où elles pouvaient reposer leurs têtes; elles exerçaient encore des actes de miséricorde; on les voyait errer dans l'empire, comme, après un grand naufrage, on voit flotter des débris épars sur une mer orageuse.

Par un effet de votre puissant génie, Sire, tout rentra dans l'ordre, et la paix publique fut rétablie. Alors, des associations auxquelles se rattachaient tant de souvenirs touchants furent recommandées à la bienfaisante sollicitude de Votre Majesté par la reconnaissance des peuples. L'expérience parle hautement en faveur des décrets impériaux qui ont autorisé ces associations. Il n'y a donc point à balancer entre les vaines théories d'un sophiste qui déraisonne et les douces consolations et les secours réels que la charité administre à l'humanité qui souffre.

Certains hommes, plus jaloux de leur propre pensée que du bien public, croient entrevoir un abus dans tout établissement qui n'est pas leur ouvrage; ils dédaignent le bien dans l'espoir de rencontrer le mieux; ils imaginent que tout est uniquement promis au calcul, et qu'avec deux ou trois maximes générales on peut reconstruire le monde. Avec de telles idées, on désorganise les États: on se montre fort pour détruire, on est impuissant pour édifier.

L'office principal de l'autorité est de profiter du bien qui s'offre à elle, de le faire prospérer en le protégeant : il est rare qu'elle puisse le créer. Nous n'avons point encore remplacé, sur une foule d'objets, les institutions qui ont été renversées; l'expérience nous ramène tous les jours à des principes que nous avions trop légèrement abandonnés. On a dit avec raison que les lois ne peuvent rien sans les mœurs; c'est donc sur les mœurs qu'il faut étayer la puissance des lois, c'est-à-dire qu'il faut étudier la disposition des esprits, qu'il faut connaître ce qui remue les âmes; il faut démêler les affections communes du cœur humain et ne pas

régir par des abstractions métaphysiques ou soumettre à de froides combinaisons des choses qui ne peuvent être que le résultat du zèle, du dévouement et de la vertu. Les lois donnent à un établissement qu'elles forment ou qu'elles autorisent tout ce qui peut le rendre légitime; mais ce souffle de vie qui seul peut l'animer, les lois ne le donnent pas il a son principe dans les motifs plus ou moins puissants par lesquels l'esprit et le cœur peuvent s'attacher à l'établissement autorisé. Aussi Votre Majesté, dans sa haute sagesse, a voulu laisser le service des pauvres sous la garde de la religion; elle a compris que ce service, qui est accompagné de tant de sacrifices et de dégoûts, ne pouvait être garanti que par les sentiments les plus élevés et les plus généreux; elle a écarté les faux systèmes des hommes qui voudraient jouir des grands biens que nous voyons s'opérer sous nos yeux, en tarissant avec autant d'imprudence que d'ingratitude la source qui les produit.

SUR LES ASSOCIATIONS RELIGIEUSES DE FEMMES.

3 AVRIL 1807 1.

AU PRÉFET DU PUY-DE-Dôme.

M. le préfet, votre lettre du 25 février dernier relative à l'association qui voudrait se former dans la petite ville de Billom, sous le titre de Sœurs de la Miséricorde, se divise en deux parties : dans la première, vous me donnez votre opinion particulière sur le projet d'association; dans la deuxième, vous faites des observations générales sur l'établissement des associations de femmes qui déclarent vouloir se consacrer au service des pauvres et à l'éducation gratuite des jeunes personnes du sexe qui appartiennent à des familles indigentes.

Je vois, par la première partie de votre lettre, que vous n'êtes point d'avis d'autoriser l'association des Sœurs de la Miséricorde de la petite ville de Billom.

Je partage entièrement votre avis, fondé sur l'inutilité de cette association et sur la nécessité d'arrêter, dans votre département, les mouvements d'un zèle outré qui tend à multiplier sans mesure les associations religieuses de femmes; ainsi cet objet est terminé entre nous; vous connaissez, mieux que personne, les localités et l'esprit public des contrées que vous administrez, votre opinion a entièrement fixé la mienne.

Mais permettez-moi, M. le préfet, de discuter un moment avec vous la question générale sur l'établissement des associations religieuses de femmes qui se vouent à l'éducation gratuite des jeunes filles et au service des pauvres. Cette

1 Inédit.

« ÖncekiDevam »