Sayfadaki görseller
PDF
ePub

Un second procédé consiste à disposer le paquet exactement de la même façon ; on tord alors légèrement le paquet entre les deux mains de manière que le plus grand côté de chaque carte s'incurve, la concavité en dessous; on fait glisser doucement le pouce gauche le long des bords gauches de chaque carte; la partie gauche de la carte supérieure se détache par son élasticité, pendant que l'on compte un; la carte immédiatement inférieure fait aussitôt de même pendant que l'on compte 2, puis la troisième, et ainsi de suite jusqu'à 20; alors, poussant légèrement le pouce à l'intérieur du paquet entre la 20e et la 21e carte, on n'a pas de peine à séparer avec la main droite les 20 cartes supérieures.

Reste à choisir entre les deux procédés. Le chronométrage d'évaluation nous y aide. Il prouve que la deuxième manière est au moins deux fois plus rapide que la première. Cette raison ne suffit cependant pas pour la préférer. Il faut encore tenir compte d'un élément de sécurité. Si cette sécurité a besoin d'être absolue, si les cartes sont trop minces et si leurs bords ne sont pas admirablement dressés, c'est le premier procédé qu'il faut employer, malgré sa lenteur relative. Dans le cas contraire, on choisira le second, dont d'ailleurs on pourra régler la vitesse en vue d'une sécurité plus grande.

Nous avons voulu entrer ici dans des détails minutieux que certains pourront regarder comme un peu puérils. Ils sont peut-être superflus dans un cas aussi simple que celui que nous avons pris pour exemple. Néanmoins c'est cette méthode rigoureuse qui, appliquée à des opérations qui se reproduisent des milliers ou des millions de fois, permet de faire les économies de prix de revient faute desquelles les concurrents seraient souvent irrésistibles.

IVe SÉRIE. T. II.

V. Chronométrage définitif.

Une fois le geste standardisé, reste à en connaître la durée. C'est ici qne le chronométrage doit jouer avec toute la précision dont il est capable.

Pour cela on fera des épreuves avec de « bons ouvriers moyens ». Pour avoir le résultat le plus général possible, on pourra prendre 2, 3, 4 ouvriers, et sur chacun faire une série de mesures; chaque série peut comprendre 50, 100, 150 chronométrages. On les multiplie, par séries de 10 mesures par exemple, jusqu'à ce qu'on trouve qu'une nouvelle série ne modifie pas sensiblement le résultat des premières. Les résultats sont inscrits sur une feuille de papier qui contient essentiellement autant de lignes horizontales qu'il y a d'opérations élémentaires marquées par leurs repères initiaux ou terminaux, et un nombre de colonnes verticales égal à 10, 15 ou 20, correspondant chacun à un chronométrage. A droite, d'autres colonnes verticales sont destinées à noter des résultats de calculs comme le temps moyen. La feuille devra, en outre, porter, avec les noms du chronométreur et du chronométré, différentes indications qu'on ne saurait trop détailler, relatives à l'heure de la journée, à l'état de l'atmosphère et à tout ce qui peut influer sur la durée du travail.

Cela fait, reste à calculer le temps que l'on allouera à l'ouvrier pour la besogne qu'on étudie. Pour cela, on commencera par éliminer les temps erratiques; nous entendons par là des temps exagérément courts ou exagérément longs, ces derniers étant d'ailleurs beucoup plus nombreux et beaucoup plus écartés de la moyenne que les premiers. Quelquefois la cause de l'erreur apparaît: par exemple, l'ouvrier s'est mouché pendants on travail, ou il y a eu un accident à son tour, ou, si c'est une dactylographe, elle a dû déchiffrer à grand peine un mot étranger. Mais bien souvent cette cause est inconnue. On induit son existence de l'anomalie du chronométrage.

Restent donc des chiffres différents les uns des autres et groupés entre deux limites qui ne sont pas trop éloignées. Quel chiffre de base adopter alors? On pourrait songer à prendre la moyenne. Quelques auteurs, notamment M. Bertrand Thompson, ont proposé un autre nombre. On range tous les chiffres par ordre croissant et on les divise en trois groupes; c'est le chiffre le plus faible du second groupe que l'on choisit. L'expérience prouve généralement que le bon ouvrier moyen peut sans peine s'y tenir. C'est lui qu'on appelle le minimum standard.

Cependant, pour éviter le surmenage, on accorde une tolérance de 5, 10, 20, 30 %. Elle est plus faible s'il s'agit de besognes mécaniques où l'imprévu est plus réduit, plus forte quand il s'agit d'opérations qui se font uniquement à la main et dont la durée peut être plus facilement troublée.

Le chronométrage d'étude est alors terminé. Des fiches d'instructions sont données aux ouvriers; elles comprennent la description des opérations standardisées qu'ils doivent accomplir pour remplir leur tâche le mieux possible, avec l'indication du temps qui leur est alloué et qui est le minimum standard augmenté de la tolérance que nous venons de fixer.

VI. Du rôle de la standardisation et du chronométrage dans la fixation des salaires et dans certains rapports des ouvriers et des patrons.

Il est temps à présent de tirer de ces indications techniques des conclusions plus générales. La première concerne la fixation des salaires. On sait l'échec lamentable, mais singulièrement instructif, du salaire aux pièces. Il y a 10 ou 20 ans, la plupart des patrons, comme des économistes, le vantaient comme constituant le meilleur excitant et le contrôle le plus automatique du travail d'un ouvrier. Malheureusement, le salaire aux pièces,

pour être équitable et par conséquent accepté, supposait que les prix unitaires étaient rigoureusement invariables. Or ils ne pouvaient pas l'être, tant qu'on n'avait pas standardisé scientifiquement le travail, fixé au petit bonheur par un contremaître. Ce système avait rapidement amené, suivant la qualité des ouvriers et même la nature des besognes, des différences de salaires considérables et imprévues. Dans telle industrie, où la moyenne des salaires journaliers était 10 francs, tel excellent ouvrier n'avait gagné que 12 francs, tel ouvrier médiocre dépassait la vingtaine. Force était de remanier les prix de base. On le faisait de manière à uniformiser et à ne pas exagérer les salaires. Dans tous les cas, et quel qu'en fût le motif, il y avait une sorte de rupture du contrat de travail et une véritable négation du salaire aux pièces. Les ouvriers s'en aperçurent vite, et ralentirent partout leur production pour forcer le patron à augmenter ses taux de base; on rompait le contrat en sens inverse, et, dans cette lutte dont on voyait mal l'issue, le salaire aux pièces était complètement discrédité.

Plus récemment, on a proposé d'autres modes de rémunération. On les nomme salaires avec primes. On connaît les primes de Halsey ou de Rowan. Le principe consiste à donner un minimum de salaire en échange d'un minimum de travail en quantité et en qualité, minimum auquel, en cas de production plus grande, on ajoute une prime dont la formule ne nous importe pas en ce moment. Néanmoins, le mot « prime », ou son aspect mathématique, a fait illusion à beaucoup. Ce qui importe en cette question, ce n'est pas la formule du salaire, mais les expériences sur lesquelles on l'appuie. Ces expériences sont précisément celles qui aboutissent à standardiser et à chronométrer, et il est clair qu'elles supporteraient tout aussi bien le salaire aux pièces que le salaire à primes. En effet, lorsqu'on a standardisé et chronométré un travail, l'ouvrier connaît la meilleure manière de le faire et

on connaît le temps qu'on peut exiger de lui. Si, par surcroît, le chronométrage a été rendu public, ce temps est tacitement admis par tout l'atelier. Il permet donc de fixer un salaire de base et il y a bien peu de chances que l'ouvrier improvise une standardisation nouvelle qui lui amène des profits exagérés. Dès lors, la standardisation et le chronométrage deviennent une sorte de charte, posée une fois pour toutes entre l'employeur et l'employé, et dont l'équité dépend de son caractère scientifique.

Le chronométrage, à la condition qu'il ne vienne qu'à la suite d'une standardisation, est de plus en plus accepté, désiré même, par beaucoup de syndicats ouvriers. Si le chronométrage a eu, il y a quelque temps, une très mauvaise presse dans les milieux syndicalistes, c'est qu'on le caricaturait de la façon la plus sotte et la plus odieuse ; d'abord on ne le faisait pas précéder de standardisation, mais on laissait chaque ouvrier inventer des méthodes qui auraient dû être établies par un bureau d'études; ensuite on chronométrait, non des ouvriers moyens, mais des ouvriers d'élite; enfin on était parfaitement décidé à diminuer les prix de base, si ces sortes de coups de cravache obtenaient un meilleur rendement. Cette méthode - est-il besoin de le prouver? - était presque exactement le contraire de la méthode scientifique que nous venons de décrire, et les ouvriers n'avaient point tort de dire qu'elle n'était, en somme, que l'organisation du surmenage.

Mais si les ouvriers acceptent un chronométrage et une standardisation fondés sur l'expérience, c'est un certain nombre de patrons qui se refusent à l'appliquer ; ces patrons, beaucoup plus capitalistes qu'industriels, trouvent en effet plus commode de laisser l'ouvrier deviner luimême les gestes les plus utiles que à monter, avec quelques dépenses d'argent et de grosses dépenses d'intelli

« ÖncekiDevam »