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contre tout excès. Elle se distingue par son objet de la sobriété qui règle, suivant les circonstances, l'usage du vin, des liqueurs, et de toute boisson enivrante. La gourmandise et l'ivresse sont opposées à la tempérance, la première comme contraire à l'abstinence, la seconde comme contraire à la sobriété. Mais l'abstinence dont il s'agit principalement ici, est cette vertu spéciale qui nous fait observer les jeunes et les privations que l'Église nous impose, comme moyens d'expier nos fautes et de mortifier nos sens.

ARTICLE I.

De la Notion et de l'Obligation du Jeúne.

293. Le jeûne ecclésiastique, que nous distinguons du jeûne eucharistique dont nous parlerons ailleurs, entraîne toujours par lui-même l'abstinence de la viande; mais l'abstinence de la viande n'entraîne pas toujours l'obligation du jeûne. Ainsi, les dimanches du carême, et généralement les vendredis et samedis de l'année, l'on ne jeûne pas, quoiqu'on soit obligé d'observer l'abstinence en faisant maigre. De même celui qui est dispensé pour le gras, soit en carême, soit aux quatre-temps, soit un jour de vigile, n'est pas dispensé pour cela de l'obligation de jeûner. On évitera donc de confondre, dans la pratique, l'obligation du jeûne avec l'obligation de l'abstinence: la première est plus étendue que la seconde.

294. En effet, le jeûne renferme trois choses; savoir, la défense de manger de la viande, la défense de faire plus d'un repas, et l'heure où il est permis de prendre ce repas. Premièrement, la loi du jeune comprend la défense de manger de la viande, c'est-à-dire de la chair des animaux qui naissent et vivent sur la terre, suivant la règle de saint Thomas : « Carnes animalium in terra quiescen« tium et respirantium (1). » Cette défense s'étend non-seulement à la chair proprement dite, mais encore au sang, à la moelle, à la graisse, au lard haché ou fondu. Il en est de même, mais seulement pour le carême, des œufs et du laitage, du beurre par conséquent, du fromage de quelque espèce qu'il soit, parce que les œufs et le laitage proviennent des animaux : « In jejunio quadragesimali « interdicuntur universaliter etiam ova et lacticinia,... quæ ex « animalibus procedunt (2). » Aussi, le pape Alexandre VII a condamné la proposition par laquelle on prétendait que la coutume de ne pas manger des œufs et du laitage en carême n'oblige pas évi

(1) Sum. part. 2. 2. quæst. 147. art. 8. — (2) Ibidem.

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demment en conscience. Voici cette proposition : « Non est evidens « quod consuetudo non comedendi ova et lacticinia in quadrage« sima obliget (1). ►

Mais il est permis, en carême et autres jours d'abstinence, de manger du poisson, des écrevisses, des grenouilles, des limaçons, de la tortue. Quant aux oiseaux aquatiques et aux animaux amphibies, ils sont généralement regardés comme étant compris dans la défense de manger de la chair les jours de jeûne. Cependant, sur cet article, comme sur plusieurs autres relatifs au jeûne, on doit suivre l'usage des lieux et des diocèses où l'on se trouve. « Circa « abstinentiam diversæ consuetudines existunt apud diversos, quas quisque observare debet, secundum morem eorum inter quos « conversatur (2). :

«

295. La seconde condition du jeûne est de ne faire qu'un seul repas. Celui qui est dispensé de l'abstinence, n'est pas pour cela dispensé de remplir cette condition (3). Le repas qui est permis aux jours de jeûne ne doit pas être divisé sans motifs; il n'est pas permis de l'interrompre, et de se remettre ensuite à table. Mais cela s'entend moralement; car on peut, après avoir terminé son repas, se remettre à manger, s'il arrive à l'instant des amis pour dîner, ou si l'on apporte sur la table quelque autre mets auquel on ne s'attendait pas. Le jeûne serait certainement rompu par un intervalle considérable et sans cause.

Mais quel intervalle faut-il pour cela? Il n'y a pas de règle fixe là-dessus; on convient communément qu'il faut avoir égard, et aux circonstances, et à la nature de la cause qui fait faire cette interruption; plus elle est urgente, plus elle demande de temps, plus aussi l'interruption peut avoir d'étendue. Ainsi, un curé qui est obligé d'interrompre son diner pour baptiser un enfant qui se meurt, pour administrer un malade qui est en grand danger, peut reprendre son dîner après l'interruption, quelque longue qu'elle ait été. Il en est de même d'un marchand qui quitte la table pour faire une vente, et qui est retenu pour plus ou moins de temps (4).

Quant à la durée du repas, elle n'est point déterminée; on pense communément qu'elle peut être de deux heures environ, un peu plus, un peu moins, suivant les circonstances. Mais on ne doit point le prolonger, dans l'intention d'éluder ou d'atténuer l'obligation du jeûne.

(1) Décret du 18 mars 1666. (2) S. Thomas, Sum. part. 2. 2. quæst. 147. art. 8; S. Jérôme, Epist. ad Lucinum. — (3) Benoît XIV l'a déclaré, Constit. In Suprema. — (4) Instructions sur le Rituel de Toulon, des Préceptes de l'Église.

296. Au repas qu'il est permis de faire les jours de jeûne, on peut, d'après un usage généralement reçu, ajouter une légère collation; mais elle doit être telle pour la qualité et la quantité des aliments, qu'on ne puisse la regarder comme un second repas. Pour ce qui regarde la qualité des mets, l'usage du poisson est permis dans plusieurs pays; dans d'autres on mange du fromage. quoique Clément XIII en condamne l'usage (1). En France, on est généralement plus sévère qu'ailleurs pour la qualité des aliments propres à la collation : ce qui est peut-être cause, en partie du moins, que la loi du jeûne est si peu observée parmi nous.

Quoi qu'il en soit, sans entrer dans un plus grand détail, on peut manger, à la collation, du pain, des fruits, des confitures, de la salade, des légumes cuits à l'eau et assaisonnés avec de l'huile, du vinaigre, et même du fromage dans les diocèses où l'usage le permet. Les curés doivent exhorter les fidèles tenus au jeûne à s'en tenir là, sans cependant les inquiéter, au tribunal de la pénitence, pour être allés un peu plus loin.

297. Quant à la quantité des aliments pour la collation, les auteurs ne s'accordent pas les uns permettent de prendre le quart de ce qu'on mange ordinairement à son repas; d'autres ne permettent que trois ou quatre onces de nourriture. Saint Alphonse de Liguori, d'après plusieurs docteurs, en accorde huit onces, et même dix (2). Mais il ne nous parait pas qu'on puisse donner ici aucune règle fixe et générale; on doit avoir égard au plus ou moins de force du tempérament, de la constitution physique, qui n'est certainement pas la même pour tous. Il est des personnes qui, en mangeant même la moitié plus que d'autres, feront cependant une collation plus pénible et plus méritoire. « Quantitas cibi non potest eadem omnibus taxari, propter diversas corporum com« plexiones, ex quibus contingit quod unus majori, alter minori « cibo indiget (3). » Il faut encore avoir égard à la continuité du jeûne; la collation des vigiles ou des quatre-temps doit être moins forte que celle du carême, parce qu'il est plus facile d'en soutenir la rigueur.

Ainsi, pour ce qui regarde la collation, les personnes tenues au jeûne prendront autant de nourriture qu'elles le jugeront nécessaire, pour éviter une indisposition qui les empêcherait de remplir convenablement leurs fonctions, eu égard à la force ou a la fai

(1) Lettres encycl. de l'an 1659. - (2) De Præceptis Ecclesiæ, no 1025. (3) S. Thomas, Sum. part. 2. 2. quæst. 147, art. 6.

blesse de leur constitution, aux fatigues qu'elles éprouvert, et aux occupations auxquelles elles sont obligées de se livrer. Un cure, par exemple, qui est chargé d'une paroisse considérable, peut certainement, sans être dispensé du jeune, prendre plus de nourriture qu'un autre qui travaille moins, toutes choses égales d'ailleurs.

298. Troisiemement, le précepte du jeune renferme encore la détermination de l'heure à laquelle on doit prendre son repas. Dans les premiers temps, on ne mangeait qu'après le coucher du soleil; au cinquième siècle, on commença par avancer l'heure du repas; du temps de saint Thomas, il était fixé à l'heure de none, c'est-à-dire à trois heures. Aujourd'hui, nous le prenons à midi, conformément à l'usage qui a force de loi. On est certainement libre de diner après midi, de renvoyer son repas jusqu'au soir, même sans raison, si l'on ne fait pas de collation. Mais il n'est pas permis d'anticiper l'heure de midi, ce qui cependant doit s'entendre moralement. « Ad jejunium requiritur hora determinata, non se« cundum subtilem examinationem, sed secundum grossam æsti<«<mationem; sufficit enim quod sit circa horam determinatam (1). » Ainsi, l'on peut, à volonté, diner à onze heures et demie. « Om«nibus licitum est anticipare infra horam, etiam sine causa (2). »

299. Ce serait s'écarter de l'esprit de l'Église que d'anticiper notablement, d'une heure, par exemple, le temps fixé pour le repas. Mais une anticipation notable, et sans motif, serait-elle une faute grave? Y aurait-il péché mortel? Les uns l'affirment; d'autres soutiennent qu'une anticipation notable, quelque notable qu'elle soit, ne peut constituer une faute grave; parce que, disent-ils, l'heure n'est point regardée comme étant de l'essence du jeune, elle n'est qu'une circonstance accessoire : « Hora non est de essen«tia jejunii; sed est circumstantia tantum accidentalis.» Ainsi s'est exprimé d'abord saint Alphonse de Liguori, qui regardait ce sentiment comme plus commun et plus probable : communior el probabilior (3); mais il s'est rétracté, en disant qu'il fallait s'en tenir au premier sentiment, qui est pour l'affirmative. Quoi qu'il en soit, une anticipation notable serait excusable si elle était fondée sur une cause raisonnable, comme la nécessité de faire un Voyage, une affaire pressante, la visite d'un ami qui a besoin de prendre de la nourriture avant l'heure ordinaire (4).

300. Quand on a quelqu'une de ces raisons ou autres sembla

(1) S. Thomas, Sum. part. 2. 2. art. 7. — (2) S. Liguori, de Præceptis Ee clesiæ, no 1016. (3) Ibidem. (4) Ibidem.

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bles, on peut intervertir l'ordre du repas et de la collation en colla tionnant à midi, ou à onze heures environ, et en dinant vers les cing ou six heures du soir. Il faut une raison moins forte pour ceux qui ont l'habitude de prendre leur repas principal sur la fin du jour; car alors le changement de l'heure entraîne par lui-même, ordinairement, l'in convénient plus ou moins grave de troubler le sommeil. Nous ajoute rons que cette interversion peut avoir lien pour tous ceux qui, à raison de leurs travaux ou de leurs fonctions, ne sont pas libres de diner à midi.

301. Les lois de l'Église sur le jeûne obligent sous peine de péché mortel. Le saint-siége a condamné la proposition contraire conçue en ces termes : « Frangens jejunium Ecclesiæ, ad quod te« netur, non peccat mortaliter, nisi ex contemptu vel inobedientia " hoc faciat; puta, quia non vult se subjicere præcepto (1). » L'abs tinence de la viande est d'obligation pour tous ceux qui ont l'usage de raison. Le jeûne n'est obligatoire que pour ceux qui ont vingt et un ans accomplis. On pèche contre l'abstinence en mangeant de la viande sans nécessité; et l'on commet autant de péchés qu'on en a mangé de fois dans un jour défendu, lorsqu'il y a une interruption morale entre les différentes reprises. Mais il peut y avoir ici légèreté de matière. Ainsi, par exemple, il nous parait que celui qui mangerait une portion ordinaire d'un plat de jardinage ou de légumes assaisonnés au lard ou à la graisse, s'il n'en mangeait qu'une fois dans la journée, ne pécherait que véniellement. Il en serait de même, à notre avis, pour celui qui mangerait de la soupe grasse. Mais, s'il en mangeait deux ou trois fois par jour, ou s'il mangeait de plusieurs mets préparés au gras, le péché pourrait facilement devenir mortel; car plusieurs matières réunies, quelque légères qu'elles soient, peuvent former une matiere grave.

302. Ce que nous disons de l'abstinence s'applique au jeûne. Celui qui plusieurs fois dans un mème jour prend un peu de nourriture, lors même qu'il n'en prendrait que très-peu chaque fois, arrive facilement à une matière suffisante pour le péché mortel. Le pape Alexandre VII a condamné la doctrine contraire, en condamnant cette proposition : « In die jejunii, qui sæpius modicum quid comedit, etsi notabilem quantitatem in fine comederit, non • frangit jejunium (2). »

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On demande si celui qui, par inadvertance, a fait deux repas an jour de jeùne, est obligé de s'abstenir de prendre d'autre nour

、1) Décret d'Alexandre VII, du 24 sept. 1665. — (2) Décret du 18 mars 1666.

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