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945. On n'est obligé de réparer un dommage qu'autant qu'on en est vraiment la cause physique ou morale. Il faut que l'action qu'on pose volontairement, en prévoyant, d'une manière au moins confuse, son funeste résultat, ait, par sa nature ou d'après les circonstances, une certaine connexion avec le dommage qui en résulte. Si l'action n'était que l'occasion du dommage, celui qui agit n'en serait point responsable. Exemple: Je vole une somme assez modique à un avare qui en meurt de chagrin ici mon action n'est point la cause réelle, cause efficace de sa mort, mais seulement l'occasion. De même, je donne à un autre un coup qui n'est point mortel; et, par l'ignorance du médecin qui le traite mal, il en meurt. Le coup que je lui ai porté n'est point la cause efficace de sa mort, mais bien l'ignorance du médecin; ce n'est donc point à moi qu'on doit imputer la mort dans les deux cas dont il s'agit. Mais si je mets sciemment le feu à la maison de mon voisin, je suis évidemment la cause de l'incendie, et je deviens responsable du dommage qui en est la suite. Je serais encore la cause efficace du dommage, quoique cause morale seulement, si j'avais déterminé quelqu'un, par mes conseils, à incendier cette maison: je me trouverais, par conséquent, solidairement obligé à la restitution.

946. Dans le doute si on a causé du dommage au prochain, est-on obligé de le réparer? Si le doute n'est pas fondé, on n'est obligé à rien; mais s'il est fondé, nous pensons qu'on doit le réparer au prorata du doute, du moins quand on a fait certainement et sciemment l'acte dont les suites ne sont devenues douteuses qu'à raison de certaines circonstances. Ainsi, par exemple, celui qui doute si l'enfant de Berthe, avec laquelle il a certainement consommé l'adultère, lui appartient ou non, est tenu, pro qualitate dubii, de réparer le dommage qui est peut-être le résultat de son fait. La maxime, In dubio melior est conditio possidentis, ne nous paraît point applicable ici; et cette autre maxime, Pater est quem nuptiæ demonstrant, ne regarde que le for extérieur. Un autre exemple: Pierre frappe dangereusement Alexandre, qui succombe quelque temps après: au jugement du médecin, il est douteux si la mort d'Alexandre est le résultat des coups qu'il a reçus, ou de la maladie dont il était atteint. Dans ce cas, il nous paraît que Pierre est responsable, en partie, des suites de la mort d'Alexandre.

947. Celui qui, par inadvertance, a fait un acte damnificatif de sa nature, est-il obligé d'en arrêter les suites? Il y est certainement obligé par toutes les lois divines et humaines. Mais si, pou

vant le faire, il ne le fait pas, se rendra-t-il coupable d'injustice! Il est plus que probable qu'il se rendrait coupable d'injustice; car, en négligeant d'òter la cause qu'il a posée lui-même, il est censé la ratifier, et vouloir effectivement le dommage qui s'ensuit. D'après ce principe, celui qui a mis involontairement le feu à la maisor de son voisin est tenu, par justice, de faire son possible pour éteindre l'incendie; le pharmacien qui, par inadvertance, a vendu du poison pour un remède, est également tenu, toujours par justice, d'avertir l'acheteur de sa méprise. De même, un confesseur qui, par inadvertance ou par une erreur invincible, donnerait une fausse décision en matière de restitution, serait obligé d'en instruire son pénitent autant que possible, sous peine de commettre une injustice (1).

948. Celui qui, voulant nuire à quelqu'un, nuit à un autre qu'il confond avec son ennemi, est obligé, suivant le sentiment qui nous paraît le plus probable, de réparer le dommage qui résulte de son fait; il en est la cause efficace et injuste. Ainsi, celui qui met le feu à la maison de Pierre croyant brûler la maison de Paul, ou qui donne un coup mortel à Pierre croyant frapper Paul, est responsable, lors même que sa méprise serait l'effet d'une erreur invincible (2).

CHAPITRE XXV.

De la Restitution pour cause de complicité.

949. Ce n'est pas seulement celui qui est l'auteur immédiat d'une injustice qui est obligé de la réparer; ceux qui en ont été complices sont solidairement tenus à la restitution. Mais on ne doit regarder comme complices que ceux qui ont coopéré à un acte injuste d'une manière efficace, soit positivement, soit négativement; il faut qu'ils aient été cause influente et efficace, positive ou négative, du dommage fait au prochain. « Tenentur omnes illi qui, quoquo modo, « sunt causa influens et efficax damni secuti; ac qui ex officio et « obligatione justitiæ obligati cavere damnum, non caverunt (3)..

(1) Voyez S. Alphonse de Liguori, lib. in. no 562.— (2) Le P. Antoine, Mg Bouvier, etc. (3) Mgr Bouvier, le P. Antoine, Volger, Sanchez, etc.

On peut contribuer comme complice au dommage fait au prochain, en neuf manières : 1o quand on le commande; 2° quand on le conseille; 3° quand on y consent; 4° quand on y porte par l'adulation ou la raillerie; 5° quand on favorise celui qui médite le crime; 6o quand on participe au délit ; 7° quand on se tait, étant strictement obligé de parler pour empêcher l'injustice; 8° quand on n'empêche pas le dommage, étant obligé, par justice, de l'empêcher; 9° enfin, quand on ne découvre pas l'auteur du dommage, étant obligé, d'office, de le dénoncer. Ces différentes manières de coopérer à une injustice sont renfermées dans ces deux vers:

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Participans, mutus, non obstans, non manifestans. »

ARTICLE I.

De Ceux qui commandent le dommage.

950. Un ordre peut être explicite ou implicite: il est explicite, lorsqu'on commande en termes exprès; il est implicite, lorsque, sans commander une chose injuste, un supérieur manifeste à un inférieur le désir d'être vengé d'une injure qu'il a reçue, promettant une récompense ou ses faveurs à celui qui le vengera. C'est ainsi qu'on a regardé Henri II, roi d'Angleterre, comme coupable de l'assassinat de saint Thomas de Cantorbéry. Or, celui qui a commandé à quelqu'un de faire tort à autrui, que le commandement soit exprès ou non, est tenu de le réparer préférablement à celui qui a exécuté ses ordres; il doit le réparer entièrement, comme s'il avait fait lui-même ce qu'il a commandé. Celui qui, par ses menaces ou par ses prières ou ses promesses, porte quelqu'un, inférieur ou non, à faire en son nom et pour lui complaire un dommage au prochain, est censé avoir commandé ce dommage, et doit en être regardé comme la cause principale. Mais celui qui approuve ou ratifie le mal qui a été fait en son nom et à son insu, ne peut en être regardé comme la cause efficace, ni par conséquent en être responsable.

Celui qui a ordonné de faire du tort à quelqu'un doit non-seulement réparer ce tort, mais encore celui qu'il a prévu, quoique d'une manière imparfaite ou confuse, comme devant résulter de l'exécution de ses ordres. Ainsi, le maître qui a ordonné à son domestique, qu'il connait pour un homme violent et emporté, de' bat

tre quelqu'un, répond de la mort de celui qui a été battu, si ce domestique lui donne un coup mortel. Mais si celui qui a été chargé de faire du mal à quelqu'un en a souffert lui-même du dommage, par exemple, s'il a été condamné à une amende, celui qui a donné cet ordre injuste est-il obligé de le dédommager? Il n'y est point tenu, si celui qui a exécuté l'ordre l'a fait librement, sans y avoir été forcé ni par les menaces de son supérieur, ni par la crainte d'encourir sa disgrâce; quiconque se charge spontanément d'exécuter un ordre, doit s'imputer à lui-même les désagréments qui en sont la suite. Mais si le supérieur a eu recours à des menaces pour déterminer son inférieur à faire ce qu'il lui a commandé, il devient responsable du dommage qu'a souffert le commissionnaire, à moins toutefois qu'il ne s'agisse d'un dommage qu'on ne pouvait prévoir, qui n'avait pas de connexion avec l'acte qui a été ordonné. Si, par exemple, le commissionnaire tombe de cheval et se casse un membre, celui duquel il a reçu l'ordre n'est point obligé de le dédommager (1).

951. Celui qui, ayant commandé de faire tort à quelqu'un, a révoqué son commandement, et en a fait connaître la révocation à celui qui l'avait reçu avant qu'il eût été mis à exécution, n'est point responsable du mal qui s'est fait ensuite nonobstant la révocation; ce mal ne doit s'attribuer qu'à la malice de celui qui l'a fait. Mais si la rétractation n'arrivait point au commissionnaire, quoique celui qui a donné l'ordre eût fait son possible pour la lui faire parvenir, celui-ci demeurerait obligé de réparer le dommage qui a été fait par le commissionnaire.

On peut révoquer un ordre, ou formellement en termes exprès, ou équivalemment, en contractant, par exemple, alliance avec celui contre qui cet ordre avait été donné, ou en se réconciliant avec lui; mais cette réconciliation doit être telle que le commissionnaire ne puisse douter de sa sincérité.

ARTICLE II.

De Ceux qui conseillent un dommage.

952. Il y a cette différence essentielle entre un ordre et un conseil, que celui qui exécute un ordre agit au nom et dans l'intérêt

(1) Vogler, Mgr Bouvier, Logerot, etc

de celui qui l'a donné; tandis que celui qui suit un conseil agit en son propre nom et pour son intérêt personnel.

Celui qui, par ses avis, ses conseils, ses décisions ou observations, ses prières ou ses promesses, détermine quelqu'un à faire une injustice, est obligé de la réparer; mais il n'y est tenu qu' défaut de celui qui a exécuté ses conseils. Pour qu'il y ait obliga tion de restituer de la part du conseiller, il est nécessaire que le conseil ait été la cause efficace du dommage; si celui qui a fait l'acte était déjà décidé à le faire quand on lui a donné conseil, le conseiller ne serait tenu à rien. De même, si quelqu'un étant déterminé à voler mille francs, on lui conseille d'en voler deux mille, celui qui lui donne ce conseil n'est tenu de restituer que la somme de mille francs.

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953. Dans le doute si le conseil peut être regardé comme cause efficace du dommage, à quoi obligera-t-on le conseiller? Si on doute que le conseil damnificatif ait été donné, ou que le dommage ait été porté, nous pensons qu'il n'y a pas d'obligation de restituer: « Commune est inter doctores, dit saint Alphonse de Liguori, quod in dubio an consilium datum sit, vel an damnum sit «< illatum, ad nullam restitutionem consulentem teneri (1). » Mais si le doute ne porte que sur l'influence ou l'efficacité du conseil, les uns obligent le conseiller à réparer le dommage, les autres le dispensent de toute obligation; d'autres enfin, dont l'opinion nous paraît plus probable, veulent qu'il soit tenu de restituer, mais seulement pro qualitate dubii.

Lorsqu'une personne a l'intention de commettre un dommage considérable, on peut lui conseiller d'en commettre un moindre, pourvu que le dommage que l'on conseille soit fait à la personne même qui est menacée (2). Car on ne peut pas conseiller un dommage, quelque peu considérable qu'il fût, s'il devait frapper sur une autre personne, soit qu'on la désigne, soit qu'on ne la désigne pas.

954. Ceux qui, par état, sont chargés de donner des conseils en matière de justice, comme les curés, les confesseurs, les jurisconsultes, les avocats, les notaires, se rendent coupables d'injustice, lorsque, par une ignorance crasse et gravement coupable, ou par une complaisance criminelle, ou par un défaut notable d'attention, ils donnent à ceux qui les consultent de fausses décisions

(1) Lib. m. no 562.- (2) S. Alphonse de Liguori, Mgr Bouvier, Viva, Sanchez, Bonacina, etc., etc.

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