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protection qu'il luy donne, et qu'elle reçoit d'une manière si chrétienne que je ne doute pas que les ennemis de sa gloire ne fussent en sûreté, quand ils seroient tous sous sa main, qui, par vertu, aimeroit mieux pardonner que de yaincre et de se venger. Et je suis persuadée que les personnes qui l'ont méprisée sont punies d'une manière que les hommes ne peuvent faire sentir. Les secrets remords que Dieu donne à ceux qu'il n'abandonne pas sont quelquefois des supplices rigoureux qui les font rentrer en euxmesmes et qui causent leur conversion; car qu'est-ce que la bonté de Dieu ne fait pas pour le salut des hommes? Je veux espérer que sa puissance, qui est infinie, estendra sa miséricorde sur tous ceux pour qui nostre grande reine prie en disant le Pater. Qu'on a de peine, Madame, à finir une lettre qui aura l'honneur de passer sous vos yeux, sans vous parler du plaisir que font celles de Vostre Altesse Électorale à sa sœur, et j'ose dire à madame Fagon et à moy, lorsqu'elle nous fait l'honneur de nous en faire part! car rien, Madame, n'est plus agréable que le tour que vous donnez aux choses. Je prie Dieu que vostre bel esprit vous soit encore meilleur qu'aux autres, et qu'il aide à Vostre Altesse Électorale à connoistre la vérité.

ST M. DE BRINON.

LXXXVI

LEIBNIZ A MADAME DE BRINON.

Original autographé inédit de la bibliothèque royale de Hanovre.

A Hanovre, ce 23 décembre 1698.

De peur d'estre importun, j'ay différé de vous escrire jusqu'au temps où c'est une espèce de devoir.

C'en est un de faire les souhaicts de la nouvelle année; mais je vous supplie de croire que, lorsque je m'en acquitte maintenant, je ne donne rien à la coustume, et tout à l'inclination que j'ay pour les personnes vertueuses et capables de faire du bien dans le monde, dont la conservation me tient au cœur plus que tout le reste de ce qui est hors de nous. Jugez par là, Madame, si je ne souhaicte la vostre encore pour de longues années; quand vous ne feriez que contribuer à la satisfaction de deux royales sœurs, dont l'une est près de vous et dont j'ay l'honneur d'approcher de l'autre royales, dis-je, moins par leur naissance que par les véritables qualités, et dont la longue vie fera la joye de la mienne.

Madame l'Electrice a leu avec la plus grande satisfaction du monde la lettre que vous lui avez escrite pour vous resjouir avec elle sur la nouvelle de la déclaration du mariage de la future reine des Romains. Pour moy, j'ay plus faict; car il y a des endroicts qui m'ont tellement pleu que je les ay envoyés à Vienne. Ce que vous dites de madame de Maubuisson est aussi grand que véritable; mais, quoyque je m'inté

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resse dans la gloire que la saincte vie de cette princesse luy donnera chez la postérité après sa mort, autant que pourroit faire un homme qui auroit l'honneur d'estre à la maison palatine, je ne voudrois pas que ses mortifications trop grandes nous la fissent perdre un moment plus tost pour cela.

Quant au poinct qui fait vostre contestation avec madame l'Électrice, je ne sçaurois dissimuler qu'il me semble qu'elle vous a admirablement bien respondu de sorte qu'ayant eu l'honneur de survenir quand elle estoit sur le poinct de faire cacheter sa lettre, je la suppliay de m'en accorder une copie auparavant. Vous voyez bien, Madame, qu'auprès des personnes esclairées il n'y a rien à faire sans bonnes preuves. Bien loin que ce soit une bonne action devant Dieu que de se rendre sans cela sous prétexte de foy, c'est une faute devant Dieu et devant les hommes.

Il n'y a rien de si beau que vos exhortations, supposé qu'elles soyent appuyées sur un fondement solide. C'est dommage que vous ne parliez ainsi pour la vérité. Je vous plains, Madame, et je plains encore l'Église de ce que nous n'avons pas de nostre costé bon nombre de personnes qui vous ressemblent. C'est une punition de Dieu que l'erreur a tant d'avantages, et entre autres, que nous n'avons pas un aussi grand théologien que M. de Meaux. Je ne sçay si c'est un bien ou si c'est un mal qu'il s'attache depuis quelques années à redresser les excès des mystiques cela dépend de la science moyenne. S'il estoit destiné sans cela à se déchaisner contre la doctrine épurée des nostres, c'est un bien que Dieu l'en

ait détourné. Mais, s'il avoit continué, sans madame de Guyon, de travailler aux voyes de pacification comme il l'avoit si bien commencé par sa communication avec M. l'abbé de Loccum, dont j'estois l'entremetteur, c'est un mal qu'il ait quitté la partie; car il la, quitta tout d'un coup sans vouloir dire ny ouy ny non sur des questions où il s'estoit engagé de nous faire entendre son sentiment. M. Pellisson l'auroit peut-estre détourné de cette rupture, mais l'incomparable Pellisson n'estoit plus. Je vous laisse penser quel mauvais effect cela a faict, et quel jugement en ont faict ces personnes fort relevées qui ne connoissoient pas autant que moy la merveilleuse pénétration aussi bien que la droiture de ce grand prélat: au lieu que, s'il avoit continué comme il avoit commencé, je puis asseurer en conscience que je crois qu'il auroit pu faire plus de fruict pour la réunion des esprits, que je n'ose dire.

Je ne sçay comment je suis tombé insensiblement sur cette plainte. Il est vray qu'elle me vient assez naturellement en vous escrivant; car c'est vous, Madame, qui estiez cause d'un commerce qui pouvoit faire tant de fruict. Vous nous aviez donné celuy de M. Pellisson, qui avoit attiré la communication avec M. de Meaux; mais le temps n'estoit pas encore venu. Dieu sçaura trouver le sien. Cependant nous avons icy la consolation de n'avoir rien obmis de ce qui estoit de nostre devoir, et qu'on ne nous sçauroit plus reprocher le schisme sans la dernière injustice.

Je suis avec zèle, Madame, vostre très humble et très obéissant serviteur,

LEIBNIZ..

LXXXVII

LEIBNIZ A MADEMOISELLE DE SCUDÉRY.

Original autographe inédit de la bibliothèque royale de Hanovre.

Mademoiselle,

Hanover, ce 26 décembre 1698.

Le respect que j'ay pour vostre éminent mérite m'a empesché de continuer à vous escrire. C'estoit bien assez que je me feusse hazardé de vous envoyer des vers francois, que vous receutes avec tant de bonté, et que l'excellent M. de Bétoulaud, dont ils regardoient. l'Adraste, digne suject des vostres et des siens, ne méprisa point, par cette bonté qu'on a chez vous pour les étrangers: mais il seroit téméraire d'y revenir.

Ainsi, vous escrivant, Mademoiselle, pour satisfaire présentement à une espèce de devoir, et pour vous marquer, à ce commencement de la nouvelle année, avec combien de passion je vous en souhaicte encore beaucoup pour estre l'ornement encore d'un autre siècleque le nostre j'y ay voulu joindre une épigramme latine sur la déclaration du mariage futur du roy des Romains avec la princesse Amalie de Brunswick, que Vous aurez conneue en France, et où apparemment vous prenez intérest, parce que je sçay combien vous avez l'estime de madame la duchesse d'Hanovre, mère de cette princesse.

Ce n'est pas que je prétende de mieux faire en latin, mais c'est que cette langue estant moins receue dans le grand monde, on y court moins de risques et la critique y est moins rigoureuse; les gens du

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