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à vostre jugement, et pour tascher d'apprendre, Monseigneur, selon vostre commodité, s'il a vostre approbation, de laquelle ce prince feroit presque autant de cas que si elle venoit de Rome mesme; m'ayant ordonné de vous faire ses complimens, et de vous marquer combien il honore vostre mérite éminent.

Le dessein de distinguer ce qui est de foy de ce qui ne l'est point paroist assez conforme à vos vues et à ce que vous appelez la méthode de l'exposition; et il n'y a rien de si utile, pour nous descharger d'une bonne partie des controverses, que de faire connoistre que ce qu'on dit de part et d'autre n'est point de foy. Cependant Son Altesse Sérénissime, ayant jeté les yeux sur ce livre, y a trouvé bien des difficultés car, premièrement, il luy semble qu'on n'a pas assez marqué les conditions de ce qui est de foy, ni les principes par lesquels on le peut connoistre ; de plus, il semble, en second lieu, qu'il y a des degrés entre les articles de foy, les uns estant plus importans que les autres.

Si j'ose expliquer plus amplement ce que Son Altesse Sérénissime m'avoit marqué en peu de mots, je diray que, pour ce qui est des conditions et principes, tout article de foy doit estre sans doute une vérité que Dieu a révélée; mais la question est, si Dieu en a seulement révélé autrefois, ou s'il en révèle encore, et si les révélations d'autrefois sont toutes dans l'Escriture saincte, ou sont venues du moins d'une tradition apostolique; ce que ne nient point plusieurs des plus accommodans entre les protestans.

Mais, comme bien des choses passent aujourd'huy pour estre de foy, qui ne sont point assez révélées par

l'Escriture, et où la tradition apostolique ne paroist pas non plus comme, par exemple, la canonicité des livres que les protestans tiennent pour apocryphes, laquelle passe aujourd'huy pour estre de foydans vostre communion, contre ce qui estoit cru par des personnes d'authorité dans l'ancienne Église; comment le peut-on sçavoir, si l'on admet des révélations nouvelles, en disant que Dieu assiste tellement son Église qu'elle choisit tousjours le bon party, soit par une réception tacite ou droict non escrit, soit par une définition ou loy expresse d'un concile œcuménique? où il est encore question de bien déterminer les conditions d'un tel concile, et s'il est nécessaire que le Pape prenne part aux décisions, pour ne rien dire du Pape à part, ni encore de quelque particulier qui pourroit vérifier ses révélations par des miracles. Mais, si l'on accorde à l'Église le droict d'establir de nouveaux articles de foy, on abandonnera la perpétuité, qui avoit passé pour la marque de la foy catholique. J'avois remarqué autrefois que vos propres autheurs ne s'y accordent point et n'ont point les mesmes fondemens sur l'analyse de la foy, et que le P. Grégoire de Valentia, Jésuite, dans un livre faict là-dessus, la réduit aux décisions du Pape, avec ou sans le concile; au lieu qu'un docteur de Sorbonne, nommé Holden, vouloit, aussi dans un livre exprès, que tout devoit avoir desjà esté révélé aux apostres, et puis propagé jusqu'à nous par l'entremise de l'Église; ce qui paroistra le meilleur aux protestans. Mais alors il sera difficile de justifier l'antiquité de bien des sentimens qu'on veut faire passer pour estre de foy dans l'Église romaine d'aujourd'huy.

Et quant aux degrés de ce qui est de foy, on disputa, dans le colloque de Ratisbonne de ce siècle, entre Hunnius, protestant, et le P. Tanner, Jésuite, si les vérités de peu d'importance qui sont dans l'Escriture sainte, comme, par exemple, celle du chien de Tobie, suivant vostre canon, sont des articles de foy, comme le P. Tanner l'assura. Ce qui estant posé, il faut reconnoistre qu'il y a une infinité d'articles de foy qu'on peut non-seulement ignorer, mais mesme nier impunément, pourvu qu'on croie qu'ils n'ont point esté révélés: comme si quelqu'un croyoit que ce passage: Tres sunt qui testimonium dant, etc. (I Joan. v, 7, 8), n'est point authentique, puisqu'il manque dans les anciens exemplaires grecs. Mais il sera question maintenant de sçavoir s'il n'y a pas des articles tellement fondamentaux qu'ils soient nécessaires, necessitate medii; en sorte qu'on ne les sçauroit ignorer ou nier sans exposer son salut, et comment on les peut discerner des autres.

La connoissance de ces choses paroist si nécessaire, Monseigneur, pour entendre ce que c'est que d'estre de foy, que monseigneur le Duc a cru qu'il falloit avoir recours à vous pour les bien connoistre, ne scachant personne aujourd'huy, dans vostre Église, qu'on puisse consulter plus seurement, et se flattant, sur les expressions obligeantes de vostre lettre précédente, que vous aurez bien la bonté de luy donner des esclaircissemens. Je ne suis maintenant que son interprète, et je ne suis pas moins avec respect, Monseigneur, vostre très humble et très obéissant servi

teur,

Leibniz.

1700

Nouvelle exposition des principes de l'Eglise catholique par Bossuet, et application de ces principes à la question des livres canoniques. — Rẻponses de Leibniz, concertées avec S. A. le duc Antoine Ulrich, en 124 points. Lettres de Leibniz antidatées. - Principes de la nouvelle exégèse. — Rôle diplomatique de M. du Héron.

CXIV

BOSSUET A LEIBNIZ.

Revu d'après l'original autographe de la bibliothèque royale de Hanovre (1).

A Meaux, ce 9 janvier 1700.

Monsieur,

Rien ne me pouvoit arriver de plus agréable que d'avoir à satisfaire, selon mon pouvoir, aux demandes d'un si grand prince que monseigneur le duc Antoine Ulrich, et encore m'estant proposées par un homme aussi habile et que j'estime autant que vous. Elles se rapportent à deux poincts: le premier consiste à juger d'un livret intitulé: Secretio, etc., ce qui demande du temps, non pour le volume, mais pour la qualité des matières sur lesquelles il faut parler seurement et juste. Je supplie donc Son Altesse

(1) C'est la réponse au no CXIII. N. E.

de me permettre un court délay, parce que, n'ayant receu ce livre que depuis deux jours, à peine ay-je eu le loisir de le considérer.

La seconde demande a deux parties, dont la première regarde les conditions et les principes par lesquels on peut reconnoistre ce qui est de foy, en le distinguant de ce qui n'en est pas; et la seconde observe qu'il y a des degrés entre les articles de foy, les uns estant plus importans que les autres.

Quant au premier poinct, vous supposeź, avant toutes choses, comme indubitable, que tout article de foy doit estre une vérité révélée de Dieu, de quoy je conviens sans difficulté; mais vous venez à deux questions, dont l'une est, « si Dieu en a seulement révélé autrefois, ou s'il en révèle encore; » et la seconde si les révélations d'autrefois sont toutes dans l'Escriture saincte ou sont venues du moins d'une tradition apostolique, ce que ne nient point plusieurs des plus accommodans entre les protestans. »

:

Je responds sans hésiter, Monsieur, que Dieu në révèle point de nouvelles vérités qui appartiennent à la foy catholique, et qu'il faut suivre la règle de la perpétuité, qui avoit, comme vous dites très bien, passé pour la règle de la catholicité, de laquelle aussi l'Église ne s'est jamais despartie.

Il ne s'agit pas icy de disputer de l'authorité des traditions apostoliques, puisque vous dites vous-mesme, Monsieur, que les plus accommodans, c'est-à-dire, comme je l'entends, non-seulement les plus doctes, mais encore les plus sages des protestáns, ne les pas; comme je crois, en effect, l'avoir remarqué dans vostre sçavant Calixte et dans ses disciples.

nient

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