Sayfadaki görseller
PDF
ePub

trement l'honneur des canons de Trente sur cet ar ticle.

:

Me voilà maintenant au bout de vostre lettre, Monseigneur, dont je n'ay pu faire une exacte analyse qu'en m'estendant bien plus qu'elle. Je suis bien fasché de cette prolixité, mais je n'y voy point de remède. Et cependant je ne suis pas encore au bout de ma carrière car j'ay promis plus d'une fois de monstrer en abrégé, autant qu'il sera possible, la perpétuité de la foy catholique conforme à la doctrine des protestans sur ce suject. C'est ce que je feray, avec vostre permission, dans la lettre suivante que je me donneray l'honneur de vous escrire; et cependant je suis avec zèle, Monseigneur, vostre très humble et très obéissant serviteur,

LEIBNIZ.

CXX

LEIBNIZ A BOSSUET.

Revu d'après l'original autographe de la bibliothèque royale de Hanovre (1).

A Wolfenbuttel, ce 24 may 1700.

Monseigneur,

Vous aurez receu ma lettre précédente, laquelle, tout ample qu'elle est, n'est que la moitié de ce que je dois faire. J'ay tasché d'approfondir l'esclaircissement que vous avez bien voulu donner sur ce que c'est d'estre de foy, et surtout sur la question, si l'Église en peut faire de nouveaux articles : et comme

(1) Cette seconde lettre, qui n'est qu'une suite de la première, ports quelques remarques en allemand à Hanovre. N. E.

j'avois douté s'il estoit possible de concilier avec l'antiquité tout ce qu'on a voulu définir dans vostre communion depuis la Réformation, et que j'avois proposé particulièrement l'exemple de la question de la canonicité de certains livres de la Bible, ce qui vous avoit engagé à examiner cette matière ; j'estois entré, avec toute la sincérité et docilité possibles, dans tout ce que vous aviez allégué en faveur du sentiment moderne de vostre party. Mais, ayant examiné non-seulement les passages qui vous paroissoient favorables, mais encore ceux qui vous sont opposés, j'ay esté surpris de me voir dans l'impossibilité de me sousmettre à vostre sentiment; et, après avoir respondu à vos preuves dans ma précédente, j'ay voulu maintenant représenter, selon l'ordre des temps, un abrégé de la perpétuité de la doctrine catholique sur le canon des livres du Vieux Testament, conforme entièrement au canon des Hébreux. C'est ce qui fera le suject de cette seconde lettre, qui auroit pu estre bien plus ample, si je n'avois eu peur de faire un livre; outre que je ne puis presque rien dire icy qui n'ait desjà esté dict. Mais j'ay tasché de le mettre en vue, pour voir s'il n'y a pas moyen de faire en sorte que des personnes appliquées et bien intentionnées puissent vider entre elles un poinct de faict, où il ne s'agit ni de mystères ni de philosophie, soit en s'accordant, soit en reconnoissant au moins qu'on doit s'abstenir de prononcer anathème làdessus.

LXII (1). Je commence par l'antiquité de l'Eglise

(1) On lit dans l'édition de Bossuet cette note, qui se trouve rectifiée, grâce à la découverte du concept original: « Leibnitz a voulu suivre les

"

judaïque. Rien ne me paroist plus solide que la remarque que fit d'abord Monseigneur le duc, que nous ne pouvons avoir les livres divins de l'Ancien Testament que par le tesmoignage et la tradition de l'Église de l'Ancien Testament; car il n'y a pas la moindre trace ni apparence que Jésus-Christ ait donné un nouveau canon là-dessus à ses disciples; et plusieurs anciens ont dict en termes formels que l'Église chrestienne se tient, à l'esgard du Vieux Testament, au canon des Hébreux.

LXIII. Or, cela posé, nous avons le tesmoignage incontestable de Josèphe, autheur très digne de foy sur ce poinct, qui dit, dans son 1er livre Contre Appion, que les Hébreux n'ont que vingt-deux livres de pleine authorité, sçavoir : les cinq livres de Moïse, qui contiennent l'histoire et les lois; les treize livres qui contiennent ce qui s'est passé depuis la mort de Moïse jusqu'à Artaxercès, où il comprend Job et les prophètes, et quatre livres d'hymnes et admonitions, qui sont sans doute les Psaumes de David, et les trois livres canoniques de Salomon, le Cantique, les Paraboles et l'Ecclésiaste.

LXIV. Josèphe adjouste que personne n'y a rien osé adjouster ni retrancher ou changer, et que ce qui a esté escrit depuis Artaxercès n'est pas si digne de foy. Et c'est dans le mesme sens qu'Eusèbe dit que,

numéros de sa lettre précédente; mais il s'est trompé, car ce numéro devrait être LXV au lieu de LXII. De même, plus bas, du nombre LXXXV il passe au nombre LXXXVIII. Comme ces erreurs sont peu importantes, nous laissons les numéros tels qu'ils sont dans son manuscrit original, parce que Bossuet les cite ainsi dans sa Réponse. » (Édit. de Paris.)

depuis le temps de Zorobabel jusqu'au Sauveur, il n'y a aucun volume sacré. »

LXV. C'est aussi ce que confessent unanimement les Juifs, que, depuis l'autheur du 1er livre des Machabées jusqu'aux modernes, l'inspiration divine ou l'esprit prophétique a cessé alors car il est dict, dans le le livre des Machabées (1x, 27), qu'il n'y a jamais eu une telle tribulation depuis qu'on n'a plus vu de prophète en Israël. Le Sepher olam, ou la Chronique des Juifs, avoue que la prophétie a cessé depuis l'an 52 des Mèdes et des Perses; et Aben-Ezra, sur Malachie, dit que, dans la mort de ce prophète, la prophétie a quitté le peuple d'Israël. Cela a passé jusqu'à sainct Augustin, qui dit « qu'il n'y a point eu de prophète depuis Malachie jusqu'à l'avénement de Nostre-Seigneur. » En conférant ces tesmoignages avec celuy de Josèphe et d'Eusèbe, on voit bien que ces autheurs entendent toute inspiration divine, dont aussi l'esprit prophétique est la plus évidente preuve. LXVI. On a remarqué que ce nombre de vingtdeux livres canoniques du Vieux Testament, que nous avons tous dans la langue originale des Hébreux, se rapportoit au nombre des lettres de la langue hébraïque. L'allusion est de peu de considération; mais elle prouve pourtant que les chrestiens qui s'en sont servis estoient entièrement dans le sentiment des protestans sur le canon; comme Origène, sainct Cyrille de Jérusalem et sainct Grégoire de Nazianze, dont il y a des vers, où le sens d'un des distiques est:

Fœderis antiqui duo sunt librique viginti,

Hebrææ quot habent nomina litterulæ.

LXVII. Ces vingt-deux livres se comptent ainsi chez les Juifs, suivant ce que rapporte desjà sainct Jérosme, dans son Prologus galeatus: cinq de Moïse, huit prophétiques, qui sont Josué, Juges avec Ruth, Samuel, Rois, Isaïe, Jérémie, Ézéchiel, et les douzepetits prophètes; et neuf hagiographes, qui sont Psaumes, Paraboles, Ecclésiaste, et Cantique de Salomon, Job, Daniel, Esdras et Néhémie pris ensemble; enfin Esther et les Chroniques. Et l'on croit que les mots de Nostre-Seigneur, chez sainct Luc, se rapportent à cette division; car il y a: Il faut que tout ce qui est escrit dans la loy de Moïse, dans les prophètes et dans les Psaumes, s'accomplisse (Luc. xxiv, 44).

LXVIII. Il est vray que d'autres ont compté vingtquatre livres mais ce n'estoit qu'en séparant en deux ce que les autres avoient pris ensemble. Ceux qui ont faict ce dénombrement l'ont encore voulu justifier par des allusions, soit aux six ailes des quatre animaux d'Ezéchiel, comme Tertullien; soit aux vingt-quatre anciens de l'Apocalypse, comme le rapporte sainct Jérosme, dans le mesme Prologue, disant Nonnulli Ruth et Cinoth (les Lamentations de Jérémie détachées de sa prophétie) inter hagiographa putant esse computandos, ac hos esse priscos legis libros viginti quatuor, quos sub numero viginti quatuor seniorum Apocalypsis Joannes inducit adorantes Agnum. Quelques Juifs devoient compter de mesme, puisque sainct Jérosme dit, dans son Prologue sur Daniel: In tres partes a Judæis omnis Scriptura dividitur, in Legem, in Prophetas et in Hagiographa; hoc est in quinque, et in octo, et in undecim libros. Ainsi il paroist que l'allusion aux six ailes des quatre animaux venoit des Juifs,

« ÖncekiDevam »