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Correspondance avec Fabricius

par l'esprit plus libéral qui l'animait; c'était presque en plein dix-septième siècle une académie de Puseytes; elle venait d'acquérir deux nouveaux professeurs, Fabricius et Schmidt, qui ne pouvaient qu'ajouter à son éclat. Leibniz lui-même avait été leur patron et leur introducteur à Helmstadt. « J'ai toujours cherché, écrit-il, à empêcher qu'on y appelât des professeurs de Wittemberg, et j'ai toujours recommandé cette famille aux princes et aux ministres et à l'incomparable Calixte, qui a tant fait pour la gloire des protestants de ce pays; et, comme le manque de professeurs s'était fait sentir, j'ai tant fait que l'on m'a autorisé à y appeler d'ici le docteur Jean-André Schmidt et Jean Fabricius d'Altdorf, le premier, disciple de Musæus, le second, qui avait fréquenté l'université d'Helmstadt. » Aussitôt après leur installation à Helmstadt, Leibniz s'y rendit et engagea le professeur Calixte le jeune à publier une seconde édition du traité De tolerantia reformatorum, sauf l'agrément de S. A. S. l'Électeur. Le commerce se continua entre Leibniz, Fabricius et Schmidt, de 1697 à 1712, et le nombre des lettres fut tel, à certaines époques, qu'en l'année 1698, dans le seul mois de février, nous comptons sept réponses de Leibniz à sept lettres que Fabricius lui adressa coup sur

coup.

La correspondance avec Schmidt avait été donnée Schmidt. par Veesenmeyer, en 1788, à Nuremberg, et comprenait quatre-vingt-seize lettres. Il s'exprime ainsi dans sa préface: « Elles sont toutes inédites, autant

que j'ai pu m'en assurer, à l'exception des lettres 45 et 66, dont j'ai indiqué la source (1). » Les autographes lui avaient été donnés par un ami, et portaient encore le cachet. Les copies avaient été tirées d'un livret manuscrit, mais mutilé au commencement et à la fin. Une mention, inscrite sur la liasse qui les contenait, en indiquait un plus grand nombre que celui qui s'est retrouvé : CXLIX epistolæ autographæ GG. Leibnizii ad A. Schmidium. L'état du manuscrit prouvait qu'elles avaient été arrachées pour servir aux usages les plus vils. Veesenmeyer regrette vivement cette perte. Mais la bibliothèque de Hanovre possédait les brouillons de plusieurs de ces lettres, et un amateur de livres dont le nom est devenu depuis trop fameux, M. Libri, en possédait des originaux qui viennent d'être acquis en vente publique, à Londres, par M. Philips. On verra que nous avons pu consulter les brouillons de Hanovre et les autographes de M. Philips avant la vente, et les conférer avec ceux déjà imprimés par Veesenmeyer. La correspondance avec Fabricius avait été donnée par.Kortholt et reproduite par Dutens; elle comprend CXVIII lettres. Hanovre en possédait d'autres que nous avons également mises à profit.

ce qui est de

et

droit divin

L'intérêt de cette double correspondance est de nous faire connaître l'opinion de deux célèbres théo- ce qui n'est logiens d'Helmstadt sur les principales questions l'autorité du

(1) Nulla earum adhuc fuit edita quantum quidem mihi indagare licuit, præter partem epistolarum no xLv et n° LXVI, quæ ubi reperiantur indicavi.

pas de droit divin, dans

Saint-Siége.

agitées entre les catholiques et les protestants. Elle nous permet de comparer les doctrines. Deux questions très-importantes y sont traitées entre protestants: celle du droit divin, que s'arrogent les papes, et que contestait Calixte, fut tranchée par une distinction qui rallia Molanus, Fabricius et Schmidt, entre le droit divin de l'autorité souveraine dans l'Église et son application au siége de Rome. C'est cette distinction qui permit à Leibniz, tout en admettant que les prérogatives du siége de Rome sont de droit humain, de reconnaître que sa direction générale de l'Église est de droit divin. Il accordait que le gouvernement monarchique est de droit divin dans l'Église, bien que son application soit soumise aux règles du droit humain profonde et habile distinction qui, si elle eût été rappelée de nos jours, eût épargné bien des flots d'encre qui ont coulé récemment pour la défense ou la ruine de ces prérogatives, en démontrant aux plus zélés, comme aux plus rebelles, que le gouvernement monarchique institué par Dieu pour son Église est autant au-dessus des orages qui ébranlent les trônes de la terre, fût-ce même celui de Rome, que des règles de droit humain qui peuvent varier suivant les temps, et augmenter ou restreindre les prérogatives de ce siége. Car Dieu, qui donne des lois à son Église, l'a constituée sous une forme et sur un plan monarchique; mais il a laissé les hommes maîtres d'en régler l'application plus ou moins libérale dans la pratique, et d'ajouter ou de retrancher à ces prérogatives qui

ne sont que de droit humain. L'Église est une hiérarchie, sans doute, et cette hiérarchie est établie de Dieu; mais c'est une société, et cette société doit vivre et se mouvoir dans le cercle des sociétés humaines et des droits civils. C'est ainsi que, divin dans son principe, humain dans l'application, le gouvernement de l'Église participe des deux natures et est réglé par deux droits; et il serait aussi absurde de nier l'un que de reconnaître à l'autre une prérogative absolue. Telle est la doctrine de Leibniz et de Fabricius, qui méritait mieux que l'indifférence et le dédain des modernes (1).

Une autre question qui s'agitait, non plus entre les catholiques et les protestants, mais entre les réformés et les luthériens, divisait alors les universités allemandes : c'était celle de la grâce ou de l'absolu décret, de la prédestination enfin. Dieu veut-il sauver

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(1) Il est aisé de faire l'application de ces maximes à la question controversée du pouvoir temporel, dont Leibniz, d'accord avec lui-même, faisait une question de convenance mondaine régie par les maximes de la prudence civile, et non par celles du droit divin. Ce qui est divin dans le gouvernement de l'Église, c'est l'institution monarchique, c'est la suprématie du chef de l'Église, mais non toutes les prérogatives qui ont été attachées successivement au siége de Rome; ce qu'il exprimait ainsi dans une addition célèbre à la lettre de Peina, malheureusement perdue: « Cum Deus sit Deus ordinis, et corpus unius Ecclesiæ catholicæ et apostolicæ uno regimine hierarchiâque universali continendum juris divini sit, consequens est ut ejusdem sit juris supremus in eo spiritualis magistratus terminis se justis continens (HÆC VERBA NUNC ADDO. L.) directoriá potestate, omniaque necessaria ad explendum munus pro salute Ecclesiæ agendi facultate instructus, tametsi locus et sedes hujus potestatis in metropoli christiani orbis Româ ex humanis considerationibus placuerit. » Lettre à Fabricius. Ed. Kortholt.

On peut voir un texte curieux de Leibniz sur le pouvoir temporel dans sa correspondance avec le landgrave de Hesse, cité par l'auteur dans un écrit intitulé: Le Pape et le Parti catholique. N. E.

tous les hommes? leur donne-t-il à tous une grâce égale pour se sauver ? Les réformés ou calvinistes, les jansénistes et même les thomistes le nient; les autres l'accordent ou du moins paraissent incliner vers ce sentiment. Telle est la position de la question qui divisait Calixte et ses collègues, et que Leibniz s'efforce de concilier. « J'ay communiqué à M. l'abbé Molanus, écrivait-il, ce que M. Calixte avoit mis par escrit ; il n'en a pas esté content, non plus que moy. »>

Cette controverse n'eût-elle d'autre mérite que de nous faire connaître la bibliothèque d'un controversiste protestant au dix-septième siècle, qu'il faudrait encore lui en savoir gré. Qui donc aujourd'hui aurait la patience de feuilleter tous ces livres de controverses ou de concordes, annotés par Leibniz et les théologiens d'Helmstadt, et dont les auteurs, fort oubliés de nos jours, alors célèbres, étaient Véronius (1), les frères de Walemburck (2), le jésuite Masen (3), Spanheim (4), Pictet (5), Forbes (6), Hottin

(1) Véronius, auteur d'un livre intitulé Secretio, dont il est question entre Leibniz et Bossuet, et qui parut sans nom d'auteur. (Voir t. II, p. 274.) (2) Adrien et Pierre de Walemburck, célèbres controversistes du parti de Rome. (Voir, sur eux, BUDDENS, In Isag. hist. theol., CVII, p. 1274, et JO. FABRICIUS, Hist. biblioth., pp. 11, 127-29.)

(3) Jac. Masen, jésuite, auteur du livre : Meditata concordia protestantium cum catholicis in und confessione fidei ex sacrâ scripturâ. Coloniæ, 1681. In-8°.

(4) Spanheim le jeune, auteur d'un Elenchus controvers. cum Lutheranis, sur la grâce ou l'absolu décret.

(5) Pictet, auteur de Theolog. christ., que Calixte fut dissuadé de réimprimer par Leibniz.

(6) Guill. Forbes d'Edinburgh: Considerationes controversarium, réédité par Jean Fabricius.

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