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Le dix-huitième siècle, déjà si riche en monuments littéraires, nous a laissé un livre qui nous le montre tout entier, s'il m'est permis de le dire. Ce livre, c'est l'Encyclopédie.

On peut citer de cette époque des ouvrages plus parfaits, ou plus voisins de cette perfection qui fut toujours le rêve des grands écrivains. Mais ce ne sont là que des œuvres individuelles; elles ne nous offrent, si achevées qu'elles soient, que l'image d'un homme. L'Encyclopédie, au contraire, nous présente le tableau d'un siècle, et d'un des siècles les plus grands qu'ait vus l'humanité. Un cataclysme peut survenir et plonger encore le monde dans les ténèbres : « Il suffit, disait Diderot, qu'un seul exemplaire de l'Encyclopédie soit

sauvé du naufrage, pour que tout ne soit pas

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Deux opinions contraires se sont produites, dès l'origine, au sujet de l'Encyclopédie. Les jésuites et les jansénistes, dont elle avait dédaigné le concours, la poursuivirent de leurs critiques, et, ce qui était encore plus facile, de leurs injures. Mais elle fut défendue contre eux et leurs amis par tous les esprits généreux de l'époque. Chose remarquable et qui pourrait bien surprendre quelques-uns de nos contemporains, il se rencontra des hommes d'État qui se mirent du côté des Encyclopédistes.

Cette querelle n'est pas encore épuisée, comme elle devrait l'être; que de fois même ne s'est-elle pas renouvelée dans ces derniers temps! Nous revenons toujours au dix-huitième siècle, dont nous sommes issus, et nous y rencontrons nécessairement l'Encyclopédie. Chaque écrivain, suivant sa tendance et suivant le parti auquel il se rattache, se croit obligé de l'attaquer ou de la défendre c'est

la forteresse du siècle; on se bat autour d'elle, mais on n'y met plus, il faut le reconnaître, la même ardeur et le même acharnement qu'autrefois. Ce n'est pas que nous soyons plus justes ou plus pacifiques, mais nous avons d'autres champs de bataille où l'humeur des plus belliqueux trouve de quoi se satisfaire.

On pourrait se demander quelquefois si ces écrivains, qui attaquent ou défendent l'Encyclopédie, ne se contentent pas d'être les échos affaiblis du dix-huitième siècle. Combien y en a-t-il qui aient pris le soin d'étudier ce grand monument? Ce n'est cependant qu'à cette condition que nous pouvons le juger, sans nous exposer aux erreurs les plus grossières.

Il ne faut pas croire que l'Encyclopédie ne vaille plus la peine d'être lue. Elle a cessé naturellement d'offrir l'intérêt qu'elle présentait au moment de sa publication; mais elle se recommande encore aujourd'hui, elle se recommandera même longtemps par un grand nombre de travaux et par les noms illustres que ces travaux nous rappellent. D'ailleurs,

quel que soit le jugement qu'on en porte, on ne saurait lui refuser une des premières places parmi les monuments de notre histoire littéraire et philosophique.

C'est ce qui m'a engagé à en faire l'objet d'une étude qui ne semblera peut-être pas inutile, et que j'offre au public dans cette espérance.

Turin, le 20 juin 1865.

PASCAL DUPRAT.

ENCYCLOPÉDISTES

I

COMMENT FUT CONÇU LE PROJET DE
L'ENCYCLOPÉDIE

Un écrivain d'outre - Manche, Éphraïm Chambers, avait publié à Dublin, en 1728, un dictionnaire des sciences et des arts, qui parut sous le titre de Cyclopedia, inconnu jusqu'alors dans la littérature anglaise (1). Cet ouvrage avait obtenu un grand succès au delà du Détroit. La traduction en fut proposée à un libraire de Paris par un Anglais, du nom de Mills, et un prospectus, imprimé en 1745, annonçait la prochaine publication du livre. Mais

(1) Cyclopedia, by E. Chambers. Dublin, 1728. 2 vol.

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