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niers temps, il consacra une partie de ses loisirs à une étude sur le Goût; on eût dit que cet heureux écrivain, qui sut toujours allier, quand il le voulut, la force à la grâce, songeait à finir, comme il avait commencé, en traitant un de ces sujets qui ne vont qu'aux esprits les plus délicats. L'étude sur le Goût n'était pas terminée quand il mourut. Ses héritiers l'envoyèrent à Diderot, c'est-à-dire à l'Encyclopédie, comme un legs du grand écrivain (1).

Montesquieu, comme Rousseau, et plus que Rousseau, inspire plus d'une fois les auteurs du Dictionnaire. Ils citent avec complaisance son Esprit des lois. S'il leur arrive quelquefois de le combattre, ce qu'ils font avec respect, ils l'invoquent presque toujours comme une autorité.

Il en fut de Buffon comme de Montesquieu, il ne fit non plus que paraître dans les rangs

(1) Les directeurs de l'Encyclopédie, qui ont consacré un éloge à Montesquieu, disent à ce sujet: « Il nous destinait un article sur le Goût, qui a été trouvé imparfait dans ses papiers; nous l'avons donné en cet état au public et nous l'avons traité avec le même respect que l'antiquité témoigna autrefois pour les dernières paroles de Sénèque. » V. le 8 volume.

des Encyclopédistes. Les trois premiers volumes de son Histoire naturelle étaient déjà publiés, et quoique l'ouvrage ne fût pas complet, il avait fallu faire coup sur coup trois éditions, pour répondre à la faveur et à l'enthousiasme du public. Il y avait un article du Dictionnaire qui semblait appartenir de droit à ce rival d'Aristote et de Pline : c'était l'article Nature. Buffon l'écrivit dans ce style éclatant et pompeux dont il revêtit toujours sa pensée. Il abandonna les autres articles, qui devaient en être le développement, à son collaborateur Daubenton, dont la forme était moins belle et moins brillante, mais qui était plus familiarisé que lui, on peut le dire, avec tous les détails de l'histoire naturelle.

C'est ainsi que nous rencontrons successivement dans ce grand ouvrage les représentants les plus illustres du dix-huitième siècle.

A côté de ce groupe radieux d'écrivains, il y en a un grand nombre d'autres qui méritent aussi de fixer les regards. Ils n'occupèrent pas la même place parmi leurs contemporains, et la figure de quelques-uns d'entre eux semble se dérober déjà à la postérité. Mais si leurs

noms furent moins éclatants, ils ne méritent pas de tomber dans l'oubli. Tels sont en particulier Duclos, Lenglet-Dufresnoy. Marmontel, Saint-Lambert, de Brosses, d'Holbach, Boucher d'Argis, Dumarsais, Barthez, Forbonnais, de Jaucourt, Quesnay, Turgot et Condorcet, sans parler de quelques autres.

Voyons aussi comment ils arrivèrent à l'Encyclopédie et ce qu'ils y apportèrent.

Le premier de ces écrivains, Duclos, avait déjà publié ses Considérations sur les mœurs, qu'on peut lire toujours et qui le classent parmi nos moralistes sur le même rang à peu près que Vauvenargues. Il appartient à l'Encyclopédie par quelques articles, tels que la Déclamation des anciens. De tous les hommes que je connais, disait d'Alembert, c'est celui qui a le plus d'esprit dans un temps donné. »

Si Duclos pouvait représenter l'esprit, tel que l'entendait le dix-huitième siècle, Lenglet-Dufresnoy, à son tour, était bien digne d'en représenter l'érudition, Il avait écrit depuis longtemps sa Méthode pour étudier l'histoire, sans parler de ses autres travaux. C'est comme historien qu'il prit part à l'oeuvre des Ency

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clopédistes. La vieillesse ne lui avait rien enlevé de l'indépendance de ses idées et de l'énergie de son caractère. Il eut à supporter toutes sortes de persécutions, mais il conserva toujours la même sérénité. C'est ce qui faisait dire à ses contemporains qu'il était chez lui à la Bastille.

Marmontel, qui était beaucoup plus jeune, puisqu'il débutait à peine, fournit un grand nombre d'articles littéraires, et il en forma plus tard ses Éléments de littérature. Ses Contes moraux, son Bélisaire et ses Incas, qu'on ne lit guère plus, parurent dans l'intervalle. Peu d'écrivains du dix-huitième siècle ont vieilli autant que Marmontel; il fut trop heureux de son vivant, et la postérité semble vouloir lui faire expier la faveur exagérée de ses contemporains. Il n'était pas dépourvu de tout mérite littéraire, mais il n'avait aucune de ces qualités fortes et solides, qui assurent la durée des livres et la mémoire de ceux qui les ont écrits.

Saint-Lambert donna quatre ou cinq articles, entre autres le mot Luxe, qui fut vivement critiqué par Grimm. On ne connaissait de lui jus

qu'alors qu'un petit nombre de poésies légères, qui ne manquaient pas de grâce, et dont Voltaire eut la bonté de se déclarer jaloux. Il avait déjà cependant une sorte de célébrité, mais il la devait à l'amour qu'il avait su inspirer à madame du Châtelet, l'une des femmes illustres du siècle. Son poëme des Saisons, qui fut son premier titre auprès de ses contemporains, ne vint que beaucoup plus tard. On y retrouve les idées philosophiques du temps, mais on y cherche en vain cette poésie vivante de la nature, que nous admirons dans Lucrèce comme dans Virgile, et qui peut seule donner aux œuvres de ce genre une longue jeunesse.

Le président de Brosses, connu par son livre sur le septième siècle de la république romaine, ainsi que par son Voyage en Italie, dont le mérite n'a pas entièrement disparu, écrivit sur les lettres comme Marmontel. Son premier ouvrage, le seul qui eût paru avant l'Encyclopédie, était une série de lettres sur Herculanum, qu'aucun écrit n'avait encore fait connaître. Il y avait en lui de l'érudit et du littérateur, mais la forme lui manquait. C'était aussi un homme

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