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place fixe aux hommes qui auront paru dans la carrière des affaires publiques, ou au milieu de l'arène ouverte à la rivalité des différentes ambitions. Hélas! je le dis à l'avance, malheur au plus grand nombre des noms dont l'Hiftoire perpétuera le fouvenir; car il en eft peu, ce me semble, destinés à fervir de signal à l'admiration ou à la reconnoiffance.

C'EST la progreffion morale de la Révolution Françoife que je veux prin→ cipalement décrire, & cependant je n'imiterai point ces Ecrivains philofophes, qui pour expliquer les caufes des événemens modernes, fe transportent aux âges les plus reculés. C'eft, en apparence, une manière de placer fon génie à une grande hauteur; & pourtant il eft vrai que plus on établit de distance entre les objets de fa méditation, plus il est aisé de les unir par des liens arbitraires; & il réfulte fi peu d'utilité de

ces rapprochemens fantastiques que nous fuivrons une autre méthode. Nous ne fuirons point les idées premières, nous ne rejetterons point les principes généraux ; mais nous nous y laifferons ramener fans effort, & de proche en proche, par les faits & par les réalités.

Je ne fais à quelle époque de l'Hiftoire de France on n'auroit pas su présenter une grande infurrection nationale, comme une conféquence inévitable des événemens antérieurs. On eût dit, après le Gouvernement Féodal, que le Peuple, justement irrité de fa longue fervitude, avoit dû reprendre toute fon énergie, & donner des loix à fon tour. On eût dit, qu'après les Croifades, laffé des facrifices dont les prédications monaftiques avoient imposé l'obligation, il avoit dû fecouer le joug de l'Eglife & briser jusques au frein des opinions religieufes. On eût dit, qu'après les funeftes fuites

de la démence de Charles VI, après l'appel des Anglois au fein du Royaume, ce même Peuple avoit dû fentir l'immenfité des hafards auxquels il étoit exposé par la tranfmiffion héréditaire du Trône & de la Couronne. On eût dit, qu'après les guerres civiles dont la France avoit été le théatre fous le règne des derniers Valois, la Nation n'avoit pu s'abstenir de reconnoître tous les dangers attachés à la Royauté, à ce rang unique & fuprême qui maintiendroit, éternellement les rivalités & les combats des hommes ambitieux de parvenir au commandement. Enfin, après l'épuisement abfolu d'hommes & d'argent où se trouvoit le Royaume à la mort de Louis XIV, on eût dit pareillement d'une Révolution Nationale, qu'elle devoit arriver néceffairement à la fuite des orgueilleux projets d'un Monarque entiérement occupé de lui-même, & qui avoit facrifié la fortune & le bonheur du Peuple au

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défir d'élever encore un des fiens au rang des Rois. Oui l'on peut, après tous les événemens & avec un efprit médiocre, trouver une caufe du présent dans le paffé.

Mais nous devons réduire à fa juste valeur cette affimilation au génie prophétique dont tant de gens fe décorent, en fe plaçant au-delà de notre âge & en remontant, s'il le faut, à plufieurs fiècles, pour nous donner le premier mot de tout ce que nous voyons.

J'AI occupé une grande place dans le Gouvernement & auprès du Roi, à peu d'années de diftance des Etats-Généraux : j'étois, par conféquent, dans une fituation où l'on peut découvrir les avantcoureurs d'une révolution, quand il en exifte de réels ou de prononcés. Voici tout ce que j'ai vu. D'abord la grande force de l'opinion publique. Elle m'avoit fingulièrement frappé, & ce n'est point

après fes triomphes que je le dis; car je me fuis étendu fur ce fujet dans mon Ouvrage fur l'Administration des Finances, composé immédiatement après ma fortie du Ministère en 1781.

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Louis XIV, pendant longtems, n'avoit connu de l'opinion publique que fes faveurs, & il ne craignoit point de la mettre en crédit. Elle ajoutoit à la gloire du Monarque une plus grande folemnité; & comme elle s'occupoit entiérement de lui, il crut, fur la foi de fa grandeur perfonnelle, que les Rois pourroient, dans tous les tems, en demeurer les maîtres & les régulateurs. Il fe trompa. Le mouvement des efprits, l'émulation des talens, le défir paffionné de la louange, toute cette agitation nouvelle, dont Louis paroiffoit l'aftre vivifiant, acquit infenfiblement une force qui lui devint propre; & lorfque ce grand Monarque s'éteignit, les idées & les fentimens qu'il avoit animés, qu'il avoit fait naître, devenus plus

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