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nisme, dans les ouvrages de Voltaire, d'Argens, de la Mettrie, de Toussaint, d'Helvétius, de Diderot, d'Alembert, de Rousseau, de Boulanger, d'Holbach, de Raynal, et des autres qui levèrent vers le milieu du dernier siècle l'étendard de l'irréligion? Seroit-ce par hasard que ces écrivains, dont la plupart étoient liés entre eux, auroient, à la même époque, écrit dans le même sens? Seroit-ce sans dessein qu'ils auroient tendu au même but, et qu'ils y auroient travaillé avec tant d'ardeur? Non, sans doute. Au reste s'il avoit pu rester quelque incertitude à cet égard, ils ont pris eux-mêmes la peine de la dissiper. Leurs correspondances dans lesquelles ils rendent compte si franchement de leurs vues, des moyens qu'ils employoient, du résultat qu'ils se proposoient d'obtenir, lèvent le voilé officieux dont on voudroit couvrir leurs projets. Avec quelle naïveté Voltaire expose à ses amis ses intentions, ses soins et ses efforts! Avec quelle ardeur il les exhorté à le seconder! De quoi d'Alembert et lui s'entretiennent-ils le plus souvent dans leurs lettres, sinon des moyens d'arriver à leur but? La correspondance de d'Alembert et de Voltaire avec Frédéric n'est-elle pas pleine du même objet? et dernièrement la correspondance de Grimm n'a-t-elle pas révélé encore quelques particularités nouvelles sur la guerre déclarée au christianisme dans le dix-huitième siècle? Enfin les incrédules eux-mêmes s'en sont vantés, non pas seulement dans leurs lettres particulières, mais encore dans des ouvrages publics; et un des plus ardens d'entre eux, Condorcet traçoit ainsi le plan et la marche des philosophes et de leurs disciples:

«Il se forma bientôt en Europe une classe d'hommes

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moins occupés encore de découvrir ou d'approfondir la vérité que de la répandre, qui, se dévouant à poursuivre les préjugés dans des asiles où le clergé, les écoles, les gouvernemens, les corporations anciennes les avoient accueillis et protégés, mirent leur gloire à détruire les erreurs populaires, plutôt qu'à reculer les limites des connoissances. En Angleterre, Collins et Bolinbroke; en France, Bayle, Fontenelle, Voltaire, Montesquieu, et les écoles formées par ces hommes, combattirent en faveur de la vérité, employant tour à tour les armes que l'érudition, la philosophie, l'esprit et le talent d'écrire peuvent fournir à la raison, prenant tous les tons, employant toutes les formes, depuis la plaisanterie jusqu'au pathétique, depuis la compilation la plus savante et la plus vaste, jusqu'au roman et au pamphlet du jour; couvrant la vérité d'un voile qui ménageoit les yeux trop foibles, et laissoit le plaisir de la deviner; caressant les préjugés avec adresse, pour leur porter des coups plus certains; n'en menaçant presque jamais plusieurs à la fois, ni même un seul tout entier; consolant quelquefois les ennemis de la raison, en paroissant ne vouloir dans la religion qu'une demi-tolérance, et dans la politique qu'une demi-liberté; ménageant le despotisme quand ils combattoient les absurdités religieuses, et le culle quand ils s'élevoient contre le tyran; attaquant ces deux fléaux dans leur principe, quand meme ils paroissoient n'en vouloir qu'à des abus révoltans ou ridicules; et frappant ces arbres funestes dans leurs racines quand ils sembloient se borner à en élaguer quelques branches égarées; tantôt en apprenant aux amis de la liberté que la superstition qui couvre le despotisme d'un bouclier impénétrable, est la première victime qu'ils doivent immoler, la première chaîne qu'ils doivent briser; tantôt au contraire la dénonçant aux despotes comme la véritable ennemie de leur pouvoir, et les effrayant du tableau de ses hypocrites complots et de ses fureurs sanguinaires; mais ne se lassant jamais

de réclamer l'indépendance de la raison, la liberté d'écrire, comme le droit et le salut du genre humaiu; prenant enfin pour cri de guerre, raison, tolérance, humanité. Telle fut cette philosophie nouvelle, objet de la haine commune de ces classes nombreuses qui n'existent que par les préjugés. Les chefs eurent presque tou jours l'art d'échapper à la vengeance, en s'exposant à la haine; de se cacher à la persécution en se montrant assez pour ne rien perdre de leur gloire ». (Esquisse d'un tableau de l'esprit humain, par Condorcet, époq. 9).

Ce passage si clair et si précis, qu'on pourroit appuyer de plusieurs autres aveux de la même espèce, dispenseroit, ce semble, de recourir à d'autres preuves. Mais puisque aujourd'hur même quelques disciples moins sincères que leurs maîtres veulent nier ce qui est plus clair que le jour, on a cru nécessaire de constater le fait qu'ils veulent obscurcir. C'est dans ce dessein que M. l'abbé Barruel a rédigé les Mémoires dont ceux-ci sont l'abrégé. Il a cherché daus la conduite et les écrits des philosophes du dernier siècle des témoignages irrécusables du dessein qu'ils avoient formé de détruire la religion et d'ébranler les gouvernemens. Le plan de son ouvrage est trop connu pour que nous l'analysions dans tous les détails. Ce pendant il convient d'en donner une idée.

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M. Barruel distingue trois conspirations; la première contre le christianisme, la secoude contre les rois, la troisième contre toute espèce de religion, de gouvernement et même de société. A la tête de la première, il compte Voltaire, d'Alembert, Frédéric et Diderot. Voltaire se montroit digne d'être le chef d'un parti, par la fécondité de sa plume, par la variété de ses attaques, et par son zèle à exciter ses amis, et

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à leur indiquer les moyens de réussir. L'auteur expose six de ces moyens principaux, et trace les progrès de la conspiration anti-chrétienne. Il en trouve les preuves dans l'histoire, ainsi que dans la correspondance et les livres des conjurés. Il faut convenir que les faits et les passages qu'il rapporte sont également concluans, et loin qu'on puisse l'accuser d'avoir exagéré dans cette partie, on seroit peut-être plutôt tenté de trouver qu'il n'a pas profité de tous ses avantages, sans doute parce qu'il a fait un choix dans le grand nombre de ses preuves, et qu'il s'est borné aux principales.

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Dans la liste des conjurés contre les rois, M. Barruel place Voltaire, d'Alembert, le marquis d'Ar~gens, Montesquieu, Ronsscau, Raynal. Il me semble que tous ces hommes ne devoient pas être mis sur la même ligne. Voltaire n'étoit sûrement pas républicain par goût comme Rousseau, et on cite bien peu de chose pour motiver l'insertion de d'Alembert sur cette liste. On eût pu aussi s'étendre davan- · tage sur les principes de rebellion étalés dans le Systême de la nature, et dans d'autres productions de cette époque, que l'on croit sorties de la société du baron d'Holbach. Et à propos de cette société, quẹ M. Barruel appelle club, et sur l'existence de laquelle il donne des renseignemens, nous remarquerons qu'il est fâcheux qu'il n'ait pas voulu ou qu'il n'ait pas pu citer les sources où il les avoit puisés. Il raconte une conversation de M. Leroy, lieutenant des chasses du Roi et académicien, avec un seigneur; mais il ne nomme pas ce seigneur, ni les vingt personnes qui lui ant confirmé le fait. Ces témoignages peuvent être authentiques pour M. Barruel qui connoissoit les

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sonnages; ils ne le sont pas de même pour le lecteur, qui ne sait de qui on veut parler; et quand on cherche à établir un fait peu connu, on ne sauroit trop multiplier les preuves. Quand on n'en a pas d'écrites, et qu'on est réduit à citer des conversations, il faut nommer toutes ses autorités; c'est le seul moyen d'inspirer de la confiance dans les récits. Car si l'on entreprenoit d'écrire l'histoire sur des ouï-dire, on auroit les relations les plus hasardées et les plus contradictoires. J'insiste sur ce point, parce que j'ai remarqué avec peine que M. Barruel négligeoit quelquefois une, précaution que je regarde comme importante, et cette omission a autorisé plusieurs personnes à révoquer en doute l'authenticité de quelques-uns des faits qu'il rapporte. Ainsi pour ce club même d'Holbach, l'auteur de l'article d'Holbach, dans la Biographie ancienne et moderne, n'a pas fait usage des révé→ . lations citées par M. Barrnel, parce que, dit-il, celui-ci ne nomme pas ses autorités. Il est vrai que l'auteur de article, et M. Barruel, eussent pu citer d'autres

témoignages écrits qui auroient confirmé les renseignemens verbaux. Rousseau avoit noté dans son Emile la société d'Holbach comme une société d'athées.

L'édition des OEuvres de Diderot, donnée par Nai

geon, les ouvrages de ce dernier, les Mémoires de Marmoutel, la Correspondance de Grimm, eussent fourni des lumières sur les membres de cette société, et sur l'esprit qui les animoit. On y voit que cette société s'appeloit la synagogue, et qu'elle étoit le rendez-vous des philosophes. Marmontel dit que Dieu et la morale n'y furent jamais mis en doute, du moins en sa présence; mais il ajoute que la carrière étoit encore assez vaste; et en effet elle comprenoit tout le christianisme, et

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