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II.

Jacques Leopardi, appelé par De Musset.. « le sombre amant de la mort» fait sentir son pessimisme dans tous ses petits ouvrages moraux et dans tous ses Dialoques; mais c'est dans ses vers surtout qu'il peint sur le vif son extrême douleur et ses angoisses. Toujours mécontent des hommes et des choses, toujours dévoré par les chagrins, toujours torturé par sa maladie, il fait passer dans ses poésies, son plus beau titre de gloire, et au plus haut degré, toutes les souffrances de son âme tourmentée. Aussi le pessimisme de Jacques Leopardi a une ressemblance frappante avec celui d' Arthur Schopenhauer, une ressemblance tellement évidente que le grand critique napolitain, F. de Sanctis, put s'autoriser à écrire: « presque en même temps l'un (Schopenhauer) « créait la métaphysique, l'autre (Leopar«di), la poésie de la douleur. »

Et le philosophe allemand déclarait aussi que personne n'avait traité jusqu'au fond le problème de l'existence, comme l'avait traité et épuisé Jacques Leopardi.

Selon Leopardi la conception malheureuse et désespérée de la vie commence dès son origine, c'est-à-dire quand elle apparaît sous la forme du besoin et de la nécessité. Ensuite un grand nombre de maux accompagnent l'homme jusqu'au tombeau, en le tourmentant sans cesse et en prenant mille formes diverses, selon les âges et les circonstances; et cela sans trève, sans soulagement!

Nasce l'uomo a fatica,

Ed è rischio di morte il nascimento.

Prova pena e tormento

Per prima cosa; ed in sul principio stesso
La madre e il genitore

Il prende a consolar dell'esser nato.

Poi che crescendo viene;

L'uno e l'altro il sostiene, e via pur sempre

Con atti e con parole

Studiasi fargli core,

E consolarlo dell' umano stato.

(CHANT NOCTURNE...)

Mais tout, cela ne sert en rien à lui donner le bonheur, ou du moins le calme nécessaire pour lui assurer une existence supportable: la douleur le poursuit con

stamment.

Et le poète continue:

perchè dare al sole,

Perchè reggere in vita.

Chi poi di quella consolar convenga?

Se la vita è sventura

Perchè da noi si dura?

(LE MÊME)

La vie et son but sont deux mystères pour les malheureux mortels.

L'inconnu domine dans tout l' Univers; par conséquent, combien les animaux ne sont-ils pas dignes d'envie!

Ne connaissant pas leurs misères, ils ne peuvent nullement éprouver les ennuis et les chagrins qui font tant gémir la nature humaine.

Au contraire:

io pur seggo sovra l'erbe, all'ombra,
E un fastidio m'ingombra

La mente, ed uno spron quasi mi punge
Si che, sedendo, più che mai son lunge
Da trovar pace o loco.

E pur nulla non bramo,

E non ho fino a qui cagion di pianto.

(CHANT NOCTURNE)

L'animal qui se promène ne s'ennuie pas: l'oisiveté est ce qu'il souhaite le plus.

L'homme, au contraire, présente un spectacle bien différent: dans l'oisiveté il n'est pas satisfait, il sent que la douleur se glisse dans son âme pour lui montrer qu'il est l'esclave inconscient de la nature, et pour lui rappeler sans cesse ces paroles de Voltaire: Le bonheur n'est qu'un << rêve et la douleur est réelle.... Il y a qua« tre-vingts ans que je l'éprouve. Je n'y sais « autre chose que me résigner, et me dire « que les mouches sont nées pour être man« gées par les araignées, et les hommes pour être dévorés par les chagrins. »

Voilà le spectacle que nous présente la vie, si du moins on ne se trompe pas sur le compte des bêtes, en les croyant heureuses dans leur oisiveté:

Forse in qual forma, in quale

Stato che sia, dentro covile o cuna,
É funesto a chi nasce il di natale.

(LE MÊME)

Leopardi a également chanté l'amour dans des vers admirables et d'une douceur infinie; mais dans ces vers on trouve toujours le découragement, l'ennui et l'illusion d'une félicité chimérique, d'un bonheur qui n'existe point.

Son opinion sur les femmes n'est pas toujours la même, mais elle est différente de celle de Schopenhauer, lorsque celuici applaudit à ces paroles de Chamfort: « Elles sont faites pour commercer avec nos « faiblesses, avec notre folie, mais non avec « notre raison. Il existe entre elles et les « hommes des sympathies d'épiderme, et « très peu de sympathies d'esprit, d'âme et « de caractère ».

Pour lui le beau sexe est quelque chose de plus élevé, d'un idéal supérieur, comme le prouvent quelques-unes de ses poésies; bien que souvent il tombe dans des contradictions évidentes, spécialement dans les dernières années de sa vie.

Il aima passionnément une jeune fille du pleuple, morte en 1818; et dix ans après il écrivit en mémoire de son amie chérie une de ses plus belles poésies,

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