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cédé aux apôtres, c'est une vérité dont il n'est pas permis de douter. On voit plusieurs de ces saints personnages être eux-mêmes les premiers évêques de divers lieux. Ainsi S. Jacques s'établit à Jérusalein en cette qualité, et fut remplacé par S. Siméon, fils de Cléophas, et ensuite par d'autres. S. Pierre occupa de même le siége d'Antioche, puis celui de Rome. Il eut pour successeurs, dans le premier, Evode, puis S. Ignace, et dans le second, S. Lin, S. Clet, S. Clément. D'autres apôtres établissaient des évêques pour les remplacer dans les lieux où ils avaient acquis des âmes à Dieu afin de continuer leurs courses apostoliques. C'est ainsi que S. Paul ordonna Tite et Thimothée, évêques de Crète et d'Ephèse, où ils furent les tiges d'une succession d'évêques. On connaît la suite des évêques de plusieurs Eglises depuis les apôtres. La tradition entière atteste cette succession. Je me contenterai de citer les constitutions apostoliques, (1) S. Irénée, (2) Tertullien, (3)

(1) De episcopis vero, qui a nobis, dum viximus, ordinati sunt, certiores vos facimus hos esse, Jacobuin episcopum Hierosolymitanum fratrem Domini, et huic post mortem secundum successisse Simonem Cleophæ filium, et huic rursus tertium, Judam, Jacobi filium, deinde Zachæum qui antea fuerat publicanus primum episcopum Cæsaria Palestina; huic successisse Cornelium, et huic rursus tertium episcopum Theophilum Evodium episcopum Antiochiæ a ine Petro ordinatum, cui successit Ignatius, a Paulo ordinatus: Annianum, Alexandriæ episcopum, quem primum Marcus Evangelista ordinavit, huic successisse Abilium, a Luca evangelista ordinatum ; Linum, Clunediæ filium, Ecclesiæ Romanorum episcopum primum, a Paulo ordinatum, post mortem vero Lini, Clementem quem ego Petrus secundum ordinavi : Thimothæum, Ephesi episcopum a Paulo ordinatum, cui successit Joannes a me Joanne ordinatus; Aristonem, primum episcopum Smyrna, hujus post mortem successorem fuisse Strateum Loidis filium, cui successit tertius episcopus alter Ariston; Gaium, Pergami episcopum, et Demetrium Philadelphia, quem ego Paulus ordinavi; Lucium, episcopum Cenchrensem; Titum Cretæ; Dionysium Atheniensem; Marthonem, episcopum Tripolitanum in Phoenicia; Archippum, episcopum Laodicensem in Phrygia; Philemonem, episcopum Colossensem; Onesimum qui fuit servus Philemonis, episcopum Bercensem in Macedonia; Crescentem, episcopum Galatia; Aquilam et Nicetum, episcopos parœciarum Asiæ; Crispum ecclesiæ Æginensis. Hi sunt quos parœciis Domini præfecimus (Const. Apos., lib. vii, c. 47).

(2) Habemus annumerare eos qui ab apostolis instituti sunt episcopi in ecclesiis et successores eorum usque ad nos qui nihil tale docuerunt..... sed quoniam valde longum est in tali volumine, maximæ et antiquissimæ et omnibus cognitæ a gloriosissimis duobus apostolis Petro et Paulo Rome fundatæ et constitutæ Ecclesiæ eam quam habet ab apostolis traditionem et annuntiatam hominibus fidem per successiones episcoporum, usque ad nos indicantes confundimus eos qui quoque modo præter quam oportet colligunt (S. Iræneus advers, hæres., lib. 1).

Quapropter eos qui in Ecclesia sunt presbyteros obaudire oportet his qui successionem habent ab apostolis sicut ostendimus, qui cum episcopatus successione charisma veritatis..... acceperunt (Ibid., ib. iv, c. 36).

(3) Edant ergo (hæretici) origines ecclesiarum suarum; evolvant ordinem episcoporum suorum ita per successiones ab initio decurrentem, ut primus le episcopus aliquem ex apostolis vel apostolicis

S. Firmilien, (1) S. Jérôme, (2) et S. Augustin (3). Il serait facile d'y ajouter bien d'autres témoignages. Mais si les évêques ont succédé au ministère des apôtres, il est évident que c'est au ministère que J.-C. a institué au moment de son ascension, et non pas à celui qu'il avait conféré lors de leur Vocation. Ils succèdent à la mission à laquelle J.-C. a promis la perpétuité et non pas à celle qui ne devait point avoir de suite. Ils succèdent à la mission qui a pour objet toutes les vérités, tous les préceptes de l'Evangile qu'ils sont chargés de prêcher, et non pas à celle qui se bornait à annoncer la venue du Messie. Ils succèdent à la mission qui s'étend à tout l'univers où ils sont répandus, et non pas à celle qui était resserrée dans les bornes de la Judée.

XIV. Les auteurs qui font succéder les prétres aux soixante et douze disciples, comme les évêques aux apôtres, n'ont pas fait attention à cette progression de pouvoirs donnés en différents temps par J.-C. à ses apôtres. Ils n'ont considéré que la première mission. Ils ont trouvé qu'elle ressemblait, en bien des points, à celle donnée aux soixante et douze disciples, qu'elle était cependant un peu plus étendue, et qu'elle paraissait d'un ordre supérieur. Ils ont vu que les apôtres avaient eu des successeurs dans leur ministère; ils ont jugé que les soixante et douze disciples avaient dû en avoir dans le leur ; et trouvant, dans l'Eglise, le ministère des prêtres inférieur à celui des évêques, de même que celui des soixante et douze disciples leur paraissait inférieur à celui des apôtres ils ont conclu que, de même que les évêques succédaient aux apôtres, de même les prétres succédaient aux soixante et douze disciples. Leur erreur vient de ce qu'ils ont cru que les évêques succédaient à la première viris, qui tamen cum apostolis perseveraverit, habuerit auctorem et antecessorem. Hoc enim modo Ecclesiæ apostolicæ census suos deferunt, sicut Smirnæorum ecclesia Polycarpum a Joanne conlocatum refert; sicut Romanorum Clementem a Petro ordinatum, itidem perinde utique et cæteræ exhibent quos ab apostolis in episcopatum constitutos apostolici seminis traduces habeant (Tertullianus, de Præscript., c. 32)

Ordo episcoporum ab apostolis succedentium Apocalypsim Joanni evangelista tribuit (Idem, contra Marcion, lib. IV).

(1) Potestas ergo remittendorum peccatorum apostolis data est et ecclesiis quas illi a Christo missi instituerunt, et episcopis qui eis ordinatione vicaria successerunt (Firmiliani epist. ad S. Cyprian. inter Epist. S. Cyprian., LXXV).

(2) Potentia divitiarum et paupertatis humilitas vel sublimiorem, vel inferiorem episcopum non facit; cæterum omnes apostolorum successores sunt (S. Hyeronymus, epist. 85, ad Evagrium).

(3) In Ecclesia catholica me tenet ab ipsa sede Petri apostoli cui pascendas oves post resurrectionem Dominus commendavit usque ad præsentem episeopatum successio sacerdotum (S. Augustinus, contra epist. fundam.).

Si enim ordo episcoporum sibi succedentium considerandus est, quanto certius et vere salubriter ab ipso Petro numeramus, cui totius Ecclesie figuram gerenti Dominus ait: Super hanc petram ædificabo Ecclesiam meam (Idem, epist. 53 ad Generosum).

mission des apôtres. Mais, en montrant que c'est à la dernière mission qu'ils succèdent, on fait disparaître cette analogie, et tout le système bâti sur ce fondement s'écroule. Si les apôtres n'avaient reçu du Sauveur d'autre mission que celle qu'ils reçurent lors de leur vocation, rien n'annonce qu'ils auraient eu des successeurs. Les soixante et douze n'en ayant en d'autre que ceile qu'on lit dans S. Luc, on ne voit pas qu'il y ait lieu de les remplacer.

XV. Mais, dira-t-on, à qui donc succèdent les prêtres ? Je répondrai d'abord: Est-il nécessaire qu'ils aient des prédécesseurs? On pourrait demander de même à qui succèdent les diacres et les autres ordres de la hiérarchie. Je répondrai ensuite que les prêtres succèdent aux apôtres, non pas dans la totalité, mais seulement dans une partie de leur pouvoir. Les apôtres ne leur ont pas transmis, comme aux évêques, la plénitude de l'ordre sacré et les siéges qu'ils occupaient, mais ils leur ont conféré cet ordre dans une mesure moindre. Ils leur succèdent dans la prêtrise que les apôtres avaient reçue dans la dernière cène. Ils succèdent à l'état où étaient les apôtres entre cette cène et leur dernière mission. On ne peut cependant pas dire des prêtres purement et simplement, comme on dit des évêques, qu'ils sont les successeurs des apôtres. Ce titre de successeur suppose un remplacement, une même place, une identité de ministère, une égalité de pouvoirs qu'on ne peut pas trouver dans les prêtres comme dans les évêques.

XVI. Pour confirmer les preuves par lesquelles nous venons d'établir que les prêtres ne succèdent pas aux soixante et douze disciples comme les évêques aux apôtres, il nous reste à examiner les arguments par lesquels on les combat. Je les tirerai d'un ouvrage de M. Maultrot, qui, de nos adversaires, est celui qui a traité le plus récemment et le plus amplement cette matière. Il a réuni les diverses réponses que donnent les théologiens à nos raisonnements. Il y a joint ses propres réflexions. Ainsi, en suivant ses objections, je n'ai pas à craindre d'en omettre aucune (1). XVII. Les théologiens, dit cet auteur, vont répondre pour moi. Habert dit que les soixante et douze disciples ont reçu de J.-C. leur juridiction, comme S. Mathias et S. Paul l'ont reçue sans avoir été ordonnés prêtres. Le pouvoir de juridiction ne suppose pas nécessairement le pouvoir d'ordre. On le voit dans un curé qui n'est encore ni prêtre, ni diacre, et qui, cependant, peut faire ce qui dépend de la juridiction. S. Paul avait déjà beaucoup travaillé pour l'Evangile, lorsqu'il fut ordonné évéque à Antioche, comme on le voit aux Actes des Apôtres, chapitre XIII. En vain Bellarmin dit, après S. Epiphane, que les apôtres ont ordonné diacres quelques-uns des soixante et douze disciples; en supposant le fait vrai, ces disciples ont pu et ont dû recevoir le diaconat et la prêtrise, comme un clerc nommé à une

(1) Ces raisonnements sont tirés de l'ouvrage de M. Maultrot, intitulé : l'Institution divine des curés, c. 5, art. 3, distinct. 1, tom. 1, p. 504 et suiv. DE LA LUZERNE. V.

cure, et ayant déjà, par là, la juridiction ordinaire, doit être promu aux saints ordres. Il est peu important, suivant Habert, que les disciples ne fussent pas présents, que J.-C. parlat aux seuls apôtres, lorsqu'il leur dit: Comme mon Père m'a envoyé, je vous envoie aussi de même. Car S. Thomas, S. Mathias, S. Paul, n'étaient pas présents, lorsque J.-C. a prononcé ces paroles, et cependant leur efficace s'est étendue jusqu'à eux, et par conséquent jusqu'à tous ceux que J-C. avait choisis pour ministres de l'Evangile (1).

XVIII. Juenin suppose de même que les soixante et douze disciples n'ont jamais reçu de J.-C. le pouvoir de lier et de délier, qu'il ne parle qu'aux seuls apôtres dans le chapitre XX de S. Jean, où il leur dit: Recevez le Saint-Esprit, etc. Juenin répond que, dans cet endroit de S. Jean, J.-C. a parlé aux apôtres et à tous ceux auxquels il devait, par la suite, conférer le sacerdoce, et qui devaient succéder aux soixante et douze disciples qu'il a choisis et envoyés immédiatement, et auxquels il a confié les fonctions paroissiales (2).

Voici la réponse du P. Drouin :

1° L'argument prouverait aussi que les évéques ne peuvent pas être appelés successeurs des apôtres. Car on ne peut pas étre évêque sans avoir été ordonné prêtre auparavant. Or Pierre, André et les autres n'étaient pas prêtres lorsqu'ils ont été appelés à l'apostolat, qu'ils ont exercé longtemps avant que J.-C. les eût ordonnés prêtres. Il est dit de S. Mathias qu'il a été revêtu du ministère et de l'apostolat, dont Judas était déchu, et on ne voit pas qu'il eût été ordonné prêtre alors. S. Paul a été apôtre longtemps avant d'avoir reçu, par l'imposition des mains, la prêtrise et l'épiscopat.

2° Pour que les curés soient dits succéder aux soixante et douze disciples, il suffit qu'ils aient la même juridiction que les soixante et douze disciples ont reçue de J.-C. Or les prétres, dans leur ordination, reçoivent la même juridiction que les disciples ont reçue de J.-C. lorsqu'il leur a dit: Allez, je vous envoie, etc. De là vient que les anciens auteurs donnent aux disciples le nom d'apôtres. Si donc les disciples n'ont pas été ordonnés prêtres dans le temps de leur élection, cela n'empêche pas que les curés ne soient regardés comme leurs successeurs, étant subrogés à leur place pour exercer la même autorité qu'eux (3).

XX. L'abbé de la Chambre se tait la même objection, et n'en est pas effrayé. On objectera peut-être, dit-il, qu'il n'est point prouvé que les soixante et douze disciples étaient prêtres, lorsqu'ils recurent de J.-C. l'ordre d'annoncer l'Evangile aux nations.... Cette observation est vraie jusqu'à un certuin point, mais elle est absolument fausse dans ses conséquences. Nous convenons qu'il n'est point prouvé que les soixante et douze disciples aient été

(1) Habert., Theol. dogmat., et moralis, tom. vi, Sacram. Ordinis, part. n, c. 6.

(2) Juenin, de Sacramentis, dissert. ix, quæst. 3, art. 3, § 2.

(3) Drouin, de Re sacramentaria, lib. vin, part. 1, sect. 5, art. 9.

(Sept.)

prêtres, mais nous nions que leur autorité ait
fini avec eux, et que les prêtres n'en aient.
point été établis dépositaires par J.-C. même.
La tradition de l'Eglise ne nous fournit
aucune lumière sur l'état foncier et intérieur
des soixante et douze disciples, et c'est ce qui
nous engage à respecter les ténèbres impé-
nétrables dont Dieu a voulu que ce point
fût environné. Mais en profitant des lumières
qu'il nous a communiquées sur la continuité
du ministère des soixante et douze disciples
dans la personne des prêtres, nous soutenons
que ce ministère n'est point disparu, et qu'il
subsiste encore aujourd'hui dans les pasteurs
du second ordre... Encore un coup, il ne
s'agit point ici de comparer les prêtres avec
les soixante et douze disciples, par rapport
au caractère sacré dont les premiers sont revé-
tus. puisqu'on ne peut savoir si les soixante
et douze disciples ont jamais été ordonnés
prêtres. Il est simplement question de les
comparer les uns aux autres par rapport au
caractère sacré de la parole. Les soixante et
douze disciples avaient l'autorité d'annon-
cer les vérités catholiques, de discerner les
bonnes doctrines d'avec les mauvaises,
d'interposer leur jugement sur les disputes
qui s'élevaient à cette occasion. Peut-on dire
que les prêtres aient la même puissance? Non-
seulement on est autorisé à prendre ce parti,
mais on est encore indispensablement tenu
de le soutenir. Sans cela on avilit l'ordre
des prêtres, et on dépouille le sacerdoce de
ses droits les plus sacrés. Car enfin, il est
constant, par la tradition unanime de tou-
tes les Eglises, que les fonctions des soi-
xante et douze disciples sont vraiment celles
que les prêtres sont en droit d'exercer....
Qu'est-ce que tenir la place d'un autre?
N'est-ce pas jouir de toute son autorité, de
tous ses droits, et de toutes ses prérogatives?
N'est-ce pas pouvoir prendre connaissance
des affaires dévolues à son tribunal
pouvoir en porter le jugement qu'il en au-
rait lui-même porté ? N'est-ce pas enfin avoir
le droit d'exercer tous les actes de juridiction
qu'il aurait lui-même exercés (1)?

et

et

XXI. Tournély a pris un autre parti pour ré pondre à l'objection. Il prétend que les disciples ont eu part à la mission dont parle S. Jean, parce qu'ils étaient présents à l'apparition de J.-C., qui leur a adressé la parole, ainsi qu'à ses apôtres. Tournély se fonde sur les versets 19 et 20 du vingt et unième chapitre de S. Jean, où on lit; Erant discipuli congregati... Gavisi sunt discipuli, viso Domino. Ce sont les mêmes disciples à qui J.-C. donna le pouvoir de remettre et de retenir les péchés.

XXII.A ces raisonnements des cinq docteurs M. Maultrot ajoute ses propres réflexions :

L'objection ne vaut pas la peine que les théologiens ont prise pour y répondre. Quand on dit que les curés ont succédé aux soixante et douze disciples, on n'entend pas qu'ils n'aient absolument que le même pouvoir que J.-C. avait donné aux disciples. (1) Continuation du traité de l'Église par l'abbé de la Chambre, tom. 1, pag. 313.

On fait un argument de comparaison pour
prouver que les curés mêmes ont été établis
sur le modèle des soixante et douze disciples,
comme les évêques sur le modèle des apôtres,
qu'ils représentent les soixante et douze disci-
ples comme les évêques représentent les apôtres.
que les curés tiennent la place des soixante et
douze disciples, comme les évêques celle des
apôtres. Voilà ce que disent presque tous les
textes. Or, en quoi consiste cette ressemblance
qui a fait regarder les curés comme succes-
seurs, en un sens très-véritable, des soixante et
douze disciples? C'est principalement en trois
choses: 1° en ce que les disciples avaient
reçu leur mission de J.-C., en personne,
aussi bien que les apôtres; 2° en ce que
les prêtres sont inférieurs aux évêques, com-
me les disciples étaient inférieurs aux apôtres;
3o en
ce que les curés sont les coopérateurs
et les aides des évêques dans l'œuvre du sa-
lut des hommes, comme les disciples aidaient
les apôtres dans la prédication de l'Evangile.
On a donc eu raison de dire, et il est exacte-
ment vrai, que les curés, non-seulement ont
été formés sur le modèle des disciples, mais
que les curés représentent ces disciples, qu'ils
les remplacent, qu'ils leur ont succédé. On
oppose que les curés sont prêtres, qu'ils ont
le pouvoir de remettre les péchés, d'offrir les
saints mystères, et que les soixante et douze
disciples n'étaient pas prêtres. Il résultera de
là que les curés ne ressemblent pas aux
soixante et douze disciples en ce qu'ils sont
prêtres. Ils leur ressembleront toujours en
tout le reste. La similitude n'est pas entière;
elle subsiste en plusieurs points. J.-C. en-
voie aujourd'hui des préires pour précher
l'Evangile, et remplir les autres fonctions
de l'ordre sacerdotal, sous l'inspection des
évêques, comme il a envoyé autrefois les dis-
ciples pour précher l'Evangile sous les apo-
tres. C'est singulièrement dans cette collation
de pouvoir, reçu de J.-C., immédiatement,
que
les curés ressemblent aux soixante et
douze disciples.

Il ne faut pas prendre le terme de succession en ce sens que les curés aient toute la puissance des soixante et douze disciples, et qu'ils n'en aient point d'autres. Il est vrai des évéques que sans avoir toutes les prérogatives des apôtres (telles que le don des miracles et l'infaillibilité personnelle), ils en ont toute l'autorité, et n'en ont pas davantage ; mais les curés succèdent aux soixante et douze disciples en ce sens qu'ils les représentent en plusieurs points, et singulièrement en ce que, comme eux, ils tiennent leur pouvoir immédiatement de Jésus-Christ.

Cette réponse à nos preuves présente un assez grand nombre de raisonnements. Comme ils sont de différents auteurs, il y en a qui se contredisent, il y en a aussi qui rentrent les uns dans les autres. Je vais les discuter successivement. Mais pour le faire avec plus de méthode, je ne suivrai pas l'ordre qu'a observé M. Maultrot dans leur exposition. Je commence par le raisonnement de Tournély, qui présente un système particulier et différent des autres.

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XXIII. Ce docteur prétend que les soixante et douze disciples furent présents à l'apparition du Sauveur, qui est rapportée au chapitre XX de S. Jean, et à laquelle manqua S. Thomas. Si cette proposition était vraie, il serait difficile de contester aux soixante et douze disciples la qualité de prêtres, puisque J.-C. donna aux assistants un pouvoir sacerdotal, un pouvoir qui ne pouvait être exercé que par des prêtres. Mais d'une part l'assertion ne repose sur aucun fondement, de l'autre ellé est contraire à toute la tradition. La seule raison que donne Tournély pour établir la présence des soixante et douze disciples à cette apparition, c'est que le texte sacré porte que les disciples étaient assemblés, que les disciples se réjouirent en voyant le Seigneur. Mais nous avons observé que le mot discipuli, dans l'Evangile, ne signifie pas les soixante et douze disciples. Saint Luc, même quand il en parle, ne leur donne pas le titre de disciples; il les appelle simplement les soixante et douze; à plus forte raison S. Jean, qui n'a parlé nulle part des soixante et douze, ne peut pas les désigner par un mot aussi vague que celui de disciples. Car qui est-ce qui, en lisant son Evangile, imaginerait que le mot discipuli s'applique à soixante et douze personnes, dont il n'a jamais dit un seul mot? Au contraire il est a remarquer que cet évangéliste désigne constamment les apôtres par le nom de disciples. Le mot apostolus ne se trouve qu'une fois dans son Evangile, et ce n'est pas comme un titre donné aux douze ministres de J.-C. Il est pris en cet endroit dans son acception primitive, et signifie simplement un envoyé. S. Jean dit que l'envoyé n'est pas plus grand que celui qui l'envoie (1).

XXIV. Si le texte de l'Ecriture ne favorise pas l'opinion de Tournély, la tradition ne lui fournit pas plus d'appui. Elle lui est même absolument contraire. Il ne cite et ne pourrait citer dans l'antiquité un seul docteur qui ait enseigné que les soixante et douze disciples étaient présents avec les apótres à l'apparition où J.-C. conféra le pouvoir de remettre les péchés. Au contraire l'abbé Corgne cite contre ce système beaucoup de passages où il est dit que c'est aux apôtres seulement que J.-C. adressa les paroles: Accipite Spiritum sanctum, etc. Il allègue entre autres les témoignages d'Origène (2), de S. Cyprien (3), de S. Firmi

(1) Non est servus major domino suo, neque apostolus major est eo qui misit illum (Joan. xii, 16).

(2) Si autem haberet in Evangelio secundum Joannem que de remissione apostolis concedenda scripta Sant: Accipite Spiritum sanctum, quorum remiserilis, etc. (Origines de Orat.).

(5) Et quamvis apostolis omnibus parem potestatem tribuat et dicat: Sicut misit me Pater et ego millo tos: accipite Spiritum sanctum, etc. Si cui remiseretis peccata, etc. (S. Cyprianus de Unit. Eccles.). Post resurrectionem quoque ad apostolos loquitar dicens: Sicut misit me Pater et ego mitto vos. Hoc cum dixisset inspiravit et ait illis : Accipite Spiritum sanctum (Idem, Epist. LXX1).

lien (1), de S. Athanase (2), de S. Ambroise (3), de S. Cyrille d'Alexandrie (4), de S. Léon (5), d'Ailuste (6), de S. Jean Damascène (7), du concile de Pavie tenu en 850 (8).

XXV. A ces autorités voici ce que répond M. Maultrot: « Corgne cite un grand nombre de textes des saints Pères qui, rapportant les paroles de S. Jean, disent que J.-C. a donné aux apôtres, le pouvoir de remettre les péchés. C'est une vérité dont personne ne doute. Mais les saints Pères ne disent pas que ce pouvoir ait été donné aux apôtres seuls, que l'assemblée fut composée des seuls apôtres, qu'il n'y eut aucuns disciples. Tous les passages accumulés sont de l'érudition perdue.

Il faut que M. Maultrot n'ait pas bien lu les textes auxquels il entreprend de répondre, puisqu'il prétend que les Pères ne disent pas que les paroles de J.-C. s'adressent aux seuls apôtres. S. Firmilien dit positivement: In solos apostolos insufflavit; S. Ambroise dit que c'est aux onze apôtres, comme aux plus parfaits, qu'a été conféré le pouvoir de remettre les péchés : Illis undecim quasi perfectioribus. S. Jean Damascène est aussi précis; il fait connaître ceux que J.-C. a choisis, et en quel nombre quos et quot elegerit, et quando præcipuos undecim discipulos. Le concile de Pavie attribue le pouvoir conféré dans cette circonstance : Solis episcopis apostolorum vicem tenentibus. Mais quand nous ne trouverions pas l'application des paroles de J.-C., faite par quelques Pères aux seuls apôtres exclusivement, ne le serait

(1) Et iterum in Evangelio quando in solos apostolos insufflavit Christus dicens: Accipite Spiritum sanctum, etc. (Firmilian Epist. ad. S. Cypr., inter epist. S. Cypr. LXXIII).

(2) Et propterea insufflavit ipsum in faciem apostolorum dicens: Accipite Spiritum sanctum, etc. (S. Athanas., de Incarnal., contra Arianos 9).

(3) Spiritum autem sanctum vel illis undecim quasi perfectioribus insufflavit.... ibi enim remittendorum gratia tributa est peccatorum (S. Ambros. in Lucam, lib. x, no 180).

(4) Sanctis apostolis insufflans et dicens: Accipite Spiritum sanctum (S. Cyrillus Alex. in Joan. lib. x11).

(5) Et remittendorum peccatorum etiam tunc apostoli acceperunt potestatem, quando post resurrectionem suam Dominus insufflavit et dixit: Accipite Spiritum sanctum; quorum remiseritis, etc. (S. Leo, serm. 74).

in

(6) Cum igitur sancti apostoli... promentis teneritudine et formidinis infirmitate una sabbatorum, clausis foribus propter metum Judæorum residentes metuerunt exire, veniens Dominus et stans in medio eorum, sufflavit et dixit eis: Accipite Spiritum sanctum, etc. (Ailustus, comment. super Evang. secund. Joan. cap. LVI, inter opera S. Gregorii tom, iv, pag. 753 edit. bened).

(7) Quomodo autem hanc dignitatem et potestatem jis contulerit cognoscamus quos et quot elegerit et quando præcipuos undecim discipulos cum fores essent clause, simulque essent intus omnes, ingressus ipse et in medio eorum consistens insufflavit, et dixit · Accipite Spiritum sanctum, quorum remiseritis peccata etc. (S. Joan. Damasc., de Conf., no 12).

(8) Solis episcopis apostolorum vicem tenentibus per manus impositionem specialiter in Ecclesia conceditur quod tunc apostolis ad ipsos Domino dicente concessum est: Accipite Spiritum sanctum etc. (Conc. Regioticinense, an 850. can. 7).

elle pas suffisamment, parce que tous disent que le pouvoir de l'absolution a été donné, dans cette occasion, aux onze apôtres, et qu'aucun auteur ne rapporte qu'il s'y soit trouvé des disciples, et qu'ils y aient participé? Que l'on nous cite donc un Père, un concile, un auteur ancien qui témoigne que, outre les apôtres, il y avait des disciples. L'unanimité des Pères assurant que c'étaient les apôtres qui étaient alors avec J.-C., le silence de tous sur l'assistance des disciples à cette apparition, montre évidemment qu'ils ont cru que J.-C. ne s'est pas montré ce jour-là qu'aux apôtres. Personne, avant Tournély, n'avait imaginé que J.-C. eût parlé aux disciples.

XXVI. Le raisonnement de Juenin rentre dans l'explication que nous venons de donner. Les paroles du Sauveur conféraient le pouvoir judiciaire dans le tribunal de la pénitence aux apôtres, qui étaient présents, et qui étaient alors prêtres, et, de plus, à tous ceux qui devaient par la suite recevoir la prêtrise. Ce principe est vrai. Mais il est également vrai que ces paroles ne s'étendaient pas, pour le moment, à ceux qui n'étaient pas prêtres. Or, les soixante et douze disciples ne l'étaient pas alors. Nous l'avons prouvé, et la plupart de nos adversaires n'en disconviennent pas. Il est possible que, dans la suite, les apôtres aient ordonné prétres quelques-uns des soixante et douze disciples. Dans ce cas, ce ne sera pas comme élant du nombre des soixante et douze, mais comme prêtres; ce ne sera pas en vertu d'une mission reçue de J.-C., mais en vertu de l'ordination qu'ils auront reçue de ses apôtres, qu'ils auront exercé le ministère de la pénitence. Ainsi ceux d'entre eux qui ont élé ordonnés diacres, selon le rapport de S. Epiphane, en ont exercé les fonctions, non pas parce qu'ils étaient du nombre des soixante et douze, mais parce qu'ils avaient été promus au diaconat. Le raisonnement de Juenin ne pourrait avoir quelque valeur, qu'en suppo sant que les soixante et douze étaient prêtres, en sorte que les paroles du Sauveur s'étendaient sur eux. Il ne répond donc pas à notre preuve, qui consiste à dire : les soixante et douze disciples n'étaient pas prêtres; ainsi les prêtres ne leur succèdent point.

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XXVII. Les solutions que donne Drouin ne sont pas plus satisfaisantes. La première pèche en ce qu'elle confond les missions des apôtres, que nous avons distinguées. Les apôtres n'étaient pas prêtres, sans doute, lorsque J.-C. les choisit et les envoya, pour la première fois, annoncer aux bourgades de la Judée que le royaume de Dieu approchait. Mais ils avaient été faits prêtres dans la cène. Lorsque J.-C., au moment de s'élever dans les cieux, les envoya prêcher sa doctrine et ses préceptes à toutes les nations, et les revêtant de toute la puissance qui lui avait été donnée au ciel et sur la terre, les assura de son assistance continue et élernelle. C'est, comme nous l'avons montré, cette dernière mission qui s'est perpétuée dans les évêques et par le caractère qu'ils

reçoivent dans leur consécration, et par leur succession dans les siéges qu'avaient fondés les apôtres. Il importe peu que les douze disciples choisis par J.-C. aient eu le titre d'apôtre, qui signifie envoyé, avant que la prétrise leur fût conférée. Ce n'est pas au titre d'apôtre que les évêques succèdent, c'est au caractère et à la juridiction épiscopale. Drouin dit, et Habert aussi, que S. Paul avait été fait apôtre et avait travaillé pour l'Evangile avant d'avoir reçu la prêtrise et l'épiscopat. D'abord le fait est très-douteux, et nous avons eu occasion de voir qu'il est incertain dans quel temps ce grand apôtre a reçu l'ordination. Mais en supposant vrai qu'il a annoncé les vérités divines avant son ordination, on ne peut rien en conclure. Un laïque peut exercer et exerce journellement les fonctions de catéchiste, surtout dans les missions parmi les infidèles, et nous ne savons pas d'ailleurs, quelles fonctions S. Paul a exercées avant d'avoir reçu l'ordination. Drouin ajoute que S. Mathias a été élevé à l'apostolat sans qu'on voie qu'il eût été ordonné prêtre alors. L'écrivain sacré, qui a rapporté l'élection de S. Mathias, a passé sous silence la circonstance de son ordination. Il ne dit ni qu'il ait été ordonné prêtre, ni qu'il ait été ordonné évêque. Cela ne prouve point qu'il ne l'ait pas été. La seconde réponse de Drouin consiste à dire que les prêtres ont succédé à la juridiction et non à l'ordination des soixante et douze disciples. Comme elle rentre dans celles que donnent Habert, l'abbé de la Chambre et M. Maultrol, nous les examinerons toutes ensemble.

XXVIII. Habert dit aussi que si les soixante et douze disciples n'ont pas été ordonnés prétres, ils n'en avaient pas moins le pouvoir de juridiction. Nous examinerons incessamment cette partie de sa réponse. Il révoque en doute ce que dit S. Epiphane, que plusieurs des sept premiers diacres avaient été choisis parmi les soixante et douze disciples. Quanquam Bellarminus, dit-il, non ostendat quomodo post trecentos annos in notitiam sancti Epiphanii venerit. Nous pourrions lui demander à notre tour comment, après sept cents ans, les premiers écrivains qui ont avancé que les prêtres avaient succédé aux soixante et douze disciples, ont pu en être informés ? Il est bien étonnant que les mêmes personnes exigent une croyance entière pour un fait, raconté après sept siècles, quand il leur est favorable, et qu'ils se refusent à en croire un qui leur est contraire, sur le fondement que le saint Père qui le rapporte est postérieur de trois, siècles à l'événement.

Habert, convenant de l'absence des soixante et douze disciples lors de l'apparition de J.-C. rapportée au chapitre XX de S. Jean, dit que les paroles du Sauveur ont dû s'étendre sur eux comme sur S. Thomas, S. Mathias, et S. Paul. Nous avons expliqué comment ces paroles, instituant un pouvoir sacerdotal de sa nature, et le conférant à tous les prêtres, ont dû s'étendre d'abord à S. Thomas, qui avait été fait prêtre avec les autres et ensuite à tous les autres qui ont reçu le sacerdoce. Ce

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