Sayfadaki görseller
PDF
ePub

n'est pas le titre d'apôtre qui a conféré à S. Mathias et à S. Paul le pouvoir de remettre les péchés, c'est leur promotion à la prêtrise, leur ordination qui les a rendus capables de ce ministère. Les soixante et douze disciples qui, de l'aveu d'Habert, n'ont point été ordonnés, n'ont pas dû y participer.

XXIX. L'abbé de la Chambre prétend qu'on ignore si les soixante et douze disciples étaient ou n'étaient pas prêtres, lorsqu'ils reçurent leur mission, et que nous n'avons pas de lumières sur leur état foncier et intérieur. Il est évident qu'à cette époque ils n'étaient pas prêtres, puisque la prêtrise n'était pas instituée. Le ministère qu'ils reçurent n'est donc pas le même que celui des curés, qui exige nécessairement pour toutes ses fonctions la prêtrise. C'est là l'objet de la question, puisque c'est sur cette mission qu'on établit la succession des uns aux autres, et qu'on ne peut pas l'établir sur autre chose, attendu qu'on ne connaît des soixante et douze disciples que leur mission. Le même auteur prétend que les soixante et douze disciples avaient l'autorité d'annoncer les vérités catholiques, de discerner les bonnes doctrines d'avec les mauvaises, et d'interposer leur jugement sur les disputes qui s'élevaient à cette occasion. L'objet de celle assertion est de donner un fondement au système de nos presbytériens modernes, qui veulent faire les prêtres et spécialement les curés juges de la foi comme les évêques. En donnant cette juridiction aux soixante et douze disciples, en faisant descendre d'eux les curés, on établit son système. Mais le pouvoir de juger les propositions doctrinales, attribué aux soixante et douze disciples, n'est pas plus réel que la succession des curés. Les apôtres ne reçurent ces pouvoirs d'annoncer toutes les vérités à tous les peuples, et de juger avec autorité de la doctrine, que lorsque J.-C., remontant dans les cieux, les charga de prêcher son Evangile à toute créature, d'apprendre à toutes les nations à garder ses préceptes, et leur promit d'être avec eux tous les jours jusqu'à la consommation des siècles: et on veut que les soixante et douze disciples, que l'on convient avoir été d'un ordre inférieur aux apôtres, eussent reçu tous ces grands pouvoirs dès le commencement de leur carrière? De quoi aurait servi alors une telle autorité? Tant que J.-C. est resté sur la terre, tout le pouvoir d'annoncer et de juger la doctrine était concentré dans lui seul. Če n'est que lorsqu'il a quitté la terre qu'il a fallu confier à d'autres cette juridiction. Il a fallu alors une puissance visible qui le remplaçât. Aussi n'est-ce qu'alors qu'il a investi ses apótres de l'autorité dont il s'agit. Conférée plus tôt, elle eût été sans objet. On ne trouve dans le discours de J.-C. aux soixante et douze disciples aucun mot qui annonce cette collation si étendue de pouvoirs. Il n'y a dans une mission quelconque que ce qu'y met celui qui la donne. Les pouvoirs de l'envoyé sont strictement restreints aux termes employés par le commellant. Nous ne voyons dans celle des

soixante et douze que l'envoi aux lieux où J.-C. devait aller, pour annoncer que le royaume de Dieu s'approchait. Il n'y a dans ces expressions ni charge d'annoncer tout l'Evangile, ni pouvoir de juger la foi, ni juridiction pour prononcer sur les disputes doctrinales. Sans doute ce qui fonde l'assertion de l'abbé de la Chambre est ce que dit J.-C. à ses disciples sur le tort et sur le malheur de ceux qui refuseront de les entendre. Il annonce que Tyr et Sidon sont moins coupables et que Sodome sera moins punie qu'eux. Celui qui vous écoute, ajoute-t-il, m'écoute moi-même. Mais celui qui vous méprise, me méprise ; et celui qui me méprise, méprise aussi celui qui m'a envoyé. Ces expressions sont évidemment relatives à la mission que J.-C. vient de donner, et ne l'amplifient pas. Il vient de charger les soixante et douze d'annoncer sa venue aux lieux où il doit aller. Il les instruit de ce qu'ils doivent faire dans les lieux où on les recevra, de ce qu'ils doivent dire dans ceux où on refusera de les entendre. Il déclare ensuite ce qui arrivera aux hommes qui ne se rendront pas à cet avertissement qu'il leur envoie. Ce n'est que de cet avertissement qu'il s'agit ici. Il ne parle que de ceux qui l'auront reçu et de ceux qui l'auront rejeté. Ceux qui auront écouté ce que les soixante et douze disciples leur apportent de sa part, c'est-à-dire que le royaume de Dieu est proche, l'auront écouté lui-même. Ceux qui auront méprisé leur avis l'auront méprisé lui-même, ainsi que celui qui l'a envoyé. Il ne s'agit point dans tout cela de comparaisons de doctrines, de décisions sur les disputes qui s'élèvent, de juridiction donnée aux soixante et douze disciples il s'agit uniquement de ceux qui croiront ou qui ne croiront pas le fait qu'il charge d'annoncer, c'est-à-dire l'approche du Messie.

XXX. Venons enfin à la grande solution que M. Maultrot explique d'après Habert, Drouin et l'abbé de la Chambre. Elle consiste à dire que les curés remplacent les soixante et douze disciples, non pas en ce qu'ils sont prêtres, mais parce qu'ils ont une juridiction conforme à celle qu'avaient les soixante et douze; qu'ils ont, comme eux, une juridiction émanée de J.-C., subordonnée de même à celle des successeurs des apôtres, et qui leur donne le droit qu'avaient les soixante et douze d'aider les apôtres dans leurs fonctions sacrées. J'observe d'abord que cette réponse ôte au système que l'on que appui ; le seul fondement de l'opinion veut défendre son principal et même son uniqui donne des successeurs aux soixante et douze disciples est le grand nombre d'auteurs qui l'ont soutenue depuis le huitième siècle. Or nous verrons dans le paragraphe suivant, où nous examinerons leur témoignage, que la plupart de ces auteurs, et spécialement tous les anciens, disent que ce sont les prêtres, qui ont été institués sur le modèle des soixante et douze disciples, qui tiennent leur place, qui leur succèdent; que saint Thomas, l'un des principaux docteurs que l'on allègue, déclaro

[ocr errors]

même formellement que ce ne sont pas les seuls curés, mais tous les prêtres qui ont la forme des soixante et douze; enfin que le premier auteur qui ait appliqué cette suc-. cession aux seuls curés est Gerson, dans le quinzième siècle. Mais, comme je l'ai déjà observé, si ce sont tous les prètres et non pas seulement les curés qui ont succédé aux soixante et douze disciples, il est clair que le titre de la succession, l'objet dans lequel ils succèdent, est l'ordination qui est commune à tous les prêtres, et non la juridiction que tous n'ont pas. Dans ce cas, c'est ce qui les constitue prêtres, et non pas ce qui de prétres les rend curés, qui les fait succéder aux soixante et douze. Ainsi ceux qui admettent le système de succession des soixante et douze disciples, en disant que c'est la juridiction qui forme cette succession, tombent en contradiction avec leur propre principe. Ils bâtissent leur système sur le fondement que ce sont tous les prêtres en vertu de leur ordination, qui succèdent aux soixante et douze disciples; et immédiatement après, ils font écrouler ce fondement en établissant que ce ne sont pas tous les prêtres qui sont successeurs, mais les seuls curés, que ce n'est pas l'ordination, mais la juridiction, qui fait succéder. Et c'est l'inconvénient où tombent presque tous les systèmes qui n'ont pas pour base la vérité.

Quest-ce que cette prétendue succession réduite à ces termes? On ne peut pas dire qu'elle soit semblable à celle des évêques relativement à celle des apôtres. Les évêques succèdent aux apôtres, et dans le pouvoir d'ordre et dans le pouvoir de juridiction. Si les curés ne succèdent aux soixante et douze disciples que dans le pouvoir de juridiction et non dans celui d'ordre, ils n'héritent donc pas de tous leurs pouvoirs, comme les évêques de tous ceux des apôtres; ils ne succèdent donc pas de même, et nous avons vu que M. Maultrot lui-même reconnaît que les évêques ont toute l'autorité des apôtres et n'en ont pas davantage, mais qu'il n'en est pas de même des curés? Comment peut-il Vonc persister à soutenir que les curés succèdent aux soixante et douze disciples de la même manière que les évêques aux apôtres ? Les premiers défenseurs du système de la succession des prêtres aux disciples étaient plus conséquents. Ils croyaient que les soixante et douze disciples avaient été prétres. D'après cette opinion, ils étaient fondés à assimiler les deux successions, les prêtres possédant tout ce qu'avaient eu les disciples, comme les évêques tout ce qui avait été donné aux apôtres.

Dans le raisonnement que nous examinons on distingue, dans les curés, le pouvoir d'ordre de celui de juridiction, et on fait descendre des soixante et douze disciples le second et non le premier. Pour y répondre, éclaircissons ce que c'est que la juridiction curiale, et voyons si elle peut être séparée du pouvoir d'ordre. On raisonne des curés comme des évêques. Dans ceux-ci le pouvoir de juridiction est séparable dų pouvoir d'ordre, on voit

tous les jours des évêques communiquer leur juridiction à de simples prêtres. Saint Grégoire le Grand à confié la sienne a des sousdiacres. Mais ce que l'on appelle la juridiction curiale est-elle de même transmissible? Un évêque, outre ses fonctions sacrées, qui exigent l'ordre et le caractère épiscopal, a une juridiction extérieure proprement dite. Il a une juridiction contentieuse, une juridiction volontaire. Il peut déléguer l'exercice de l'une et de l'autre à des personnes qui n'aient pas le caractère épiscopal. Mais la juridiction d'un curé n'est autre chose que le droit d'exercer la totalité des fonctions dépendantes de son ministère. Or toutes ces fonctions exigent le pouvoir d'ordre, elles ne peuvent être exercées que par un prêtre. La célébration du saint sacrifice, la prédication publique, l'administration solennelle du baptême exigent l'ordre sacerdotal. Le pouvoir d'ordre ne suppose pas la juridiction curiale, et peut en être séparé, puisqu'il y a des prêtres qui ne sont pas curés, mais le pouvoir de juridiction curiale ne peut être exercé que par ceux qui ont reçu l'ordination sacerdotale. Un curé ne peut déléguer que des prêtres pour exercer sa juridiction curiale, au lieu que l'évêque peut déléguer sa juridiction épiscopale à d'autres qu'à des évêques. La juridiction d'un curé ne peut être exercée que par un prêtre. Donc les soixante et douze disciples qui, de l'aveu de nos adversaires, n'étaient pas prêtres, n'ont pu exercer la juridiction curiale: donc les curés n'ont pu les remplacer, leur succéder dans cette juridiction.

XXXI. Habert propose contre ce raisonnement une objection. Le pouvoir de juridiction ne suppose pas le pouvoir de l'ordre. On le voit dans un curé qui. n'est encore ni prêtre, ni diacre, et qui peut cependant faire ce qui dépend de la juridiction. Cet argument d'Habert pèche en ce qu'il conclut de l'ordre nouveau, maintenant établi dans l'Eglise, à l'ordre primitif institué par J.-C. Les lois canoniques actuelles permettent de conférer le titre d'une cure à un homme qui n'est pas encore prêtre. Dans ce cas, le pourvu ne peut pas encore exercer le ministère de curé, mais il a acquis le droit de l'exercer un jour, lorsqu'il aura été promu à l'ordre sacré. Ainsi on dit qu'il a le fond de la juridiction curiale, qu'il en a le titre, mais qu'il n'en a pas l'exercice. Prétend-on que J.-C. en avait agi de même avec les soixante et douze disciples, qu'il leur avait conféré un titre sans fonctions actuelles, qu'il avait séparé dans eux le titre de juridiction de son exercice; que, ne les élevant pas au sacerdoce, il leur avait donné cependant droit à un ministère qui suppose le sacerdoce? Ce serait une idée bien extraordinaire. J.-C n'a donné droit à des fonctions sacrées, qu'en conférant en même temps la capacité, et en imposant l'obligation de les exercer. S'il avait donné aux soixante et douze disciples le droit au ministère des curés, il leur aurait nécessairement donné tout ce qui est nécessaire pour le remplir. Dès qu'il ne leur a pas conféré le sacerdoce qu'exigent les fonctions cu

riales, il ne leur a pas donné non plus le titre de ce ministère. Ce n'est donc pas plus à la juridiction qu'à l'ordination des soixante et douze disciples que succèdent les curés. Mais comme cette idée de juridiction curiale peut paraître trop abstraite et en même temps trop vague, reprenons les éclaircissements plus positifs et plus détaillés que donne M. Maultrot, des objets dans lesquels les curés succèdent, selon lui, aux soixante et douze disciples.

XXXII. Les curés, dit-il, ne ressemblent pas aux soixante et douze disciples, en ce qu'ils sont prêtres. Ils leur ressemblent dans tout le reste.

Observons que l'état de la question est ici dénaturé. Il ne s'agit pas de ressemblance, mais de descendance.

En quoi consiste cette ressemblance qui a fait regarder les curés comme successeurs, en un sens très véritable, des soixante et douze disciples? C'est principalement en trois choses: 1o en ce que les disciples ont reçu leur mission de J.-C. en personne, aussi bien que les apôtres. Mais ce ne peut pas être parce que la mission des soixante et douze disciples leur avait été donnée par J.-C. en personne, qu'elle s'est perpétuée dans les prêtres. J.-C. a très-bien pu donner une mission qui ne fût que locale et momentanée. Il a pu envoyer pour un objet particulier des hommes qui, dès lors, ne devaient pas avoir de successeurs. Certes, c'est un raisonnement singulier que celui-ci. J.-C. a personnellement envoyé les soixante et douze disciples: donc ils ont eu des successeurs qui sont les curés.

2, ajoute M. Maultrot, en ce que les curés sont inférieurs aux évêques, comme les disciples étaient inférieurs aux apôtres. A cet égard, il y a une grande différence, et le mot inférieurs fait ici équivoque. Les curés sont non-seulement inférieurs aux évêques, ils leur sont encore subordonnés. Ils sont soumis à leur juridiction, ils travaillent sous leur inspection. Mais où a-t-on vu que les soixante et douze disciples fussent dans la même dépendance des apôtres? C'est une assertion purement gratuite, une idée qui n'a aucun fondement ni dans l'Ecriture Sainte, ni dans la tradition. La mission des soixante et douze paraît un peu moins étendue que la première mission des apôtres ; mais on ne voit aucune trace de subordination des uns aux autres. Les soixante et douze disciples n'étaient donc pas inférieurs aux apôtres de la même manière que les curés le sont aux évêques?

3, poursuit toujours le même auteur, en ce que les disciples étaient les coopérateurs des apôtres, comme les curés le sont des évêques. C'est le même principe que nous venons de réfuter. Les disciples étaient chargés d'un ministère assez semblable à celui des apotres, mais qu'on nous dise où on a pris cette idée de coopérateurs! Les uns et les autres exécutaient, chacun de leur côté, les ordres. qu'ils avaient reçus de leur divin Maître; mais on ne voit nulle part que les disciples aient reçu aucun ordre d'autre que de lui. XXXIIL Cet embarras, pour montrer en

quoi les curés succèdent aux soixante et douze disciples, fait bien voir l'impossibilité d'établir cette descendance. Car enfin, en succédant à quelqu'un, il faut bien leur succéder en quelque chose. Il faut qu'un objet quelconque soit transmis de l'un à l'autre. En dernière analyse, M. Maultrot paraît faire consister la succession singulièrement dans le ministre de la prédication: J.-C. envoie aujourd'hui des prêtres pour précher l'Evangile et remplir les autres fonctions de l'ordre sacerdotal, comme il a envoyé autrefois les disciples pour précher l'Evangile sous les apótres. C'est singulièrement dans cette collation de pouvoir reçu de J.-C. que les curés ressemblent aux soixante et douze disciples.

D'abord si c'est le ministère de la prédication qui fait succéder les curés aux soixante et douze disciples, ce ne sont plus les seuls curés qui sont leurs successeurs, ce sont tous les prétres employés à ce ministère. Dès qu'un ecclésiastique reçoit une approbation pour prêcher, il devient successeur des soixante et douze disciples. Voilà encore une variation dans le système, ou plutôt voilà encore un système nouveau, et qui n'est pas plus aisé à soutenir que les autres.

Où prend-on que les disciples ont été chargés de prêcher l'Evangile ? Nous avons vu que leur mission se bornait à annoncer un seul point: Appropinquavit in vos regnum Dei. Les apôtres, dans leur première mission, avaient reçu la même charge d'annoncer la proximité du royaume de Dieu. Ils avaient été si peu chargés par là de prêcher tout l'Evangile que, dans la dernière mission, J.-C. leur confia ce ministère : Prædicate Evangelium omni creaturæ... docentes eos servare omnia quæcumque mandavi vobis. S'ils avaient reçu ce pouvoir antérieurement et dès le temps de leur élection, il eût été inutile que J.-C. le leur conférât au moment de son ascension. Si les apôtres eux-mêmes n'avaient pas été chargés, dans leur première mission, du ministère entier de la prédication, et d'annoncer tout l'Evangile, comment peut-on prétendre que des disciples, dont la mission était moins étendue et était d'un ordre inférieur, en avaient été revêtus ? Les soixante et douze disciples n'étaient, ainsi que nous l'avons dit, que les précurseurs particuliers de J.-C., dans les lieux où il devait aller comme S. Jean, l'avait été vis-à-vis de toute la nation. Il y a bien loin de là à la fonction des curés, d'annoncer aux peuples qui leur sont confiés, toutes les vérités de l'Evangile. Il est impossible de soutenir que l'un de ces ministères est la suite et la continuation de l'autre. Si l'on veut que l'ordre des curés succède aux soixante et douze disciples, parce que ceuxci annonçaient la venue de J.-C., que l'on dise donc aussi qu'ils succèdent à S. JeanBaptiste qui, avant les soixante et douze disciples, avait rempli le même ministère. Mais quand même, contre l'évidence des faits, nous accorderions que les soixante et douze disciples avaient été chargés d'annoncer toutes les vérités de l'Evangile, pourrait-on

[ocr errors]

dire pour cela que les curés sont leurs successeurs? Passons en ce moment sur l'intervalle de plusieurs siècles, que nous avons remarqué entre les uns et les autres et qui interrompt la continuité de cette succession. Supposons qu'il y ait eu des paroisses et des curés dans les premiers jours de l'Eglise: mais, outre le ministère de la prédication, les curés sont chargés envers leurs paroisiens de beaucoup d'autres fonctions spirituelles et l'on ne voit pas que les soixante et douze disciples les aient jamais exercées. On ne peut pas dire d'un ministère qu'il succède à un autre, parce qu'une seule partie de ce ministère, une de ses nombreuses fonctions, a été exercée par le ministère antérieur. Les diacres distribuaient autrefois aux fidèles la sainte eucharistic: les curés la distribuent aujourd'hui à leurs paroissiens. En parlant de ces principes, il faut que M. Maultrot soutienne que les curés sont aussi les successeurs des diacres. Succéder à un autre, c'est occuper sa place, c'est avoir l'ensemble des mêmes droits, c'est être chargé des mêmes fonctions. Opposons, sur cela, l'abbé de la Chambre à M, Maultrot, dans le passage que lui-même a cité. Qu'est-ce que tenir la place d'un autre? N'est-ce pas jouir de toute son autorité, de tous ces droits, de toutes ses prérogatives? N'est-ce pas pouvoir prendre connaissance de toutes les affaires dévolues à son tribunal, et pouvoir en porter le jugement qu'il en aurait porté lui-même? N'est-ce pas, enfin, avoir le droit d'exercer tous les les actes de juridiction qu'il aurait lui-même exercés? En rapprochant cette notion, qui ne doit pas être suspecte à M. Maultrot, du point auquel il réduit la succession des soixante et douze disciples, il est évident que les curés ne sont pas leurs successeurs. Après avoir établi, par plusieurs raisonnements, que les soixante et douze disciples, n'ont eu pour successeurs ni les prêtres, ni les curés, et résolu les objections de nos adversaires contre nos preuves, il reste à examiner celles qu'ils prétendent donner de leur système, qui consiste dans le grand nombre d'auteurs ecclésiastiques qui l'ont soutenu.

[blocks in formation]

J. Nos adversaires prétendent avoir en leur faveur toute la suite de la tradition. It est donc nécessaire d'examiner les témoignages qu'ils nous opposent. Je continuerai de suivre dans cette discussion M. Maultrot, comme étant l'auteur le plus récent, et qui a recueilli le plus grand nombre d'autorités favorables à son système (1). Jen'ai pas à craindre, en le suivant, d'affaiblir la difficulté.

Toute la tradition, dit-il, a dit que ces soixante et douze disciples étaient la figure des curés, qu'ils étaient leurs successeurs,

(1) Toute cette discussion sur la tradition est tirée de l'ouvrage, déjà cité, de M. Maultrot, l'Institution

étant établis sur le même modèle, tenant la même place, exerçant le même ministère.

II. A la suite du second concile de Tolède, en 531, on trouve une lettre de l'évêque Montan, écrite aux prêtres du territoire de Palenza. Il se plaint de ce qu'ils osent bénir le saint chrême et dédier des églises, fonctions qui ont toujours été réservées aux évêques : Revolvatur manibus vestris, o presbyteri, sacratissimus Numeri liber in quo vestri officii in septuaginta seniorum personis auspicatus est honor, et invenietis quorum negotiorum vobis prærogativa concessa est. Adjutores suos Dominus nostri laboris secundo gradu esse voluit, non temeratores sacrarum quarumdam rerum permisit (1).

III. Suivant le vénérable Bède, sicut duodecim apostolos formam episcoporum exibere simul et præmonstrare nemo est qui dubitet, sic et hos duo et septuaginta figuram presbyterorum, id est secundi ordinis sacerdotum gessisse sciendum est (2).

IV. Téodulphe, évêque d'Orléans, a publié, en 797, un capitulaire adressé aux prêtres de son diocèse: Obsecro, fratres charissimi...... obsecro fraternitatem vestram...... scitote vestrum gradum nostro gradui secundum et pene conjunctum esse: sicut enim apostoli episcoporum in Ecclesia, ita nimirum presbyteri cæterorum discipulorum Domini vicem tenent; et illi tenent gradum summi pontificis Aaron, isti vero filiorum ejus (3).

V. Le pape Léon III: Hæc omnia illicita sunt chorepiscopis qui ad exemplum et formam septuaginta discipulorum esse noscuntur, vel presbyteris qui eamdem gestant formam (4).

VI. Ce texte du pape Léon III, poursuit M. Maultrot, donne droit d'employer le canon 13 du concile de Néocésarée, en 315: Presbyteri ruris in ecclesia civitatis episcopo præsente vel presbyteris urbis ipsius, offerre non possunt, nec panem sanctificatum dare, calicemque porrigere. Si vero absentes hi fuerint, et ad dandam orationem vocentur, solidare debebunt. Chorepiscopi quoque ad exemplum quidem et formam septuaginta videntur esse, ut comministri autem propter studium quod erga pauperes exibent honorentur (5). On chicane sur ce texte, parce qu'il n'y a que le nombre de soixante et dix, et que le mot de disciples n'y est pas. Au moyen de quoi on se croit autorisé à substituer aux disciples choisis par J.-C. les soixante et dix vieillards choisis par Moise. Les paroles de Léon III, qui compare les chorévéques aux soixante et dix disciples, portent à croire que le concile a entendu parler des soixante et dix disciples envoyés par J.-C., d'autant plus qu'il est douteux si les disciples étaient au nombre de soixante et dix ou de soixante et douze, comme on le voit dans une divine des curés, chap. 5, art. 3, distinct. 1, tom. II, pag. 462 et suiv.

(1) Concilium Toletanum, an. 531. Epist. Montani episc. ad fratres territorii Palentini. (2) Beda, in Luc cap. x, 1.

(5) Theodulphi, Aurelian. episc., capitul 1.

Inter opera S. Leonis. Epist. olim LXXXVIII. Vid. Quesnelle, dissert. x1, inter. opera, S. Leonis. (5) Conc. Noecæsariense, an 315, can. 15.

note de Tillemont (1). Les chorévêques étaient des prêtres, et par conséquent le concile de NéoCésarée a regardé les prêtres comme établis sur le modèle et sur la forme des disciples.

VII. Suivant la glose ordinaire: Sicut in apostolis est forma episcoporum, sic in duo el septuaginta forma est presbyterorum (2). VIII. Riculphe, évêque de Soissons, a publié, en 889, des constitutions adressées aux prêtres de son diocèse. Attendite ergo quia nobiscum sollicitudinem gregis dominici percepistis, et in sacerdotali ministerio secundi ordinis et dignitatis locum possidetis. Et sicut nos, licet immeriti, apostolorum vices in hac ecclesia agere debemus, ita et vos quoque septuaginta duorum discipulorum nobiscum ministerium in hac plebe exercere oportet. Nam et in veteri lege Moyses et Aaron locum summi pontificis tenuerunt, et filii quoque Aaron officium sacerdotale in secundo gradu sortiti sunt. Ad vos enim plebium pertinet cura et sollicitudo, et ex vobis pendet eorum salus, utilitas atque animarum profectus (3).

IX. Hincmar, archevêque de Reims, a écrit au pape Jean VIII, une lettre sous le nom de l'empereur Charles II, sur les appels des jugements ecclésiastiques. Sicut Dei virtus, Christus, et Dei sapientia ordinem ac dignitatem apostolorum et septuaginta discípulorum in carnis præsentia distinxit, ut lectio sancti Evangelii patenter ostendit, ita idem ipse per quem reges regnant, et conditores legum justa decernunt, sacris legibus et canonibus Spiritu Sancto conditis, et totius mundi reverentia consecratis ordinem et dignitatem episcoporum qui locum in Ecclesia tenent apostolorum, et presbyterorum qui subrogantur loco septuaginta discipulorum et in administratione, et in honore, sicut et in Veteri Testamento, inter summos pontifices, et inter minoris ordinis sacerdotes disdiscrevit (4).

X. Hugues de Saint-Victor enseigne que, Sicut in apostolis forma est pontificum, ita in duo et septuaginta discipulis forma est presbyterorum secundi ordinis (5).

[ocr errors]

XI. La doctrine de Pierre Lombard est la même Christus duodecim elegit discipulos prius quos et apostolos vocavit, quorum vicem gerunt in Ecclesia majores pontifices. Deinde alios duo et septuaginta discipulos designavit, quorum vicem in Ecclesia tenent presbyteri (6).

XII. C'est aussi l'opinion de Gratien. Majorum et minorum sacerdotum discretio in Novo Testamento ab ipso Christo sumpsit exordium, qui duodecim apostolos tanquam majores sacerdotes et duo et septuaginta discipulos quasi minores sacerdotes instituit... Hanc eamdem formam apostoli, sicuti in singulis civitatibus, episcopos et presbyteros ordinarunt (7).

(1) Thillemont, list. Eccl. tom. 1, pag. 461.
(2) Glossa ordin. in Evangelio Luce, cap. x.
(3) Riculfi Suession. Episc. Constitutio. cap. 1.
(4) Hinemari opera tom. II, pag. 769.

(5) Hugo a S. Vict., Ann. Elucid. in Luc. I. Iv. c. 1.
(6) Sententia lib. iv, Dist. 24. art. 9.
(7) Dist. xxi, in principio,

XIII. Fulbert, évêque de Chartres: Moyses dux populi secundis adjutoribus septuaginta viris de eodem populo sustentabatur, per quos forma presbyterorum exprimitur qui nunc in Ecclesia novissima pontificale onus in se suscipientes regendis populis invigilant. Porro sumens de spiritu Moysis illis septuaginta senioribus dedit per quos populum sibi commissum per quadraginta annos judicavit, quia dux noster Dominus Jesus Christus quos ad prædicationis officium missurus erat in mundum spiritualium dona charismatum infudit (1).

XIV. Le pape Jean XXII, dans son décret contre Marsille de Padoue, lui reproche d'avoir enseigné l'égalité de pouvoir entre les évêques et les pretres. Le pape s'étend beaucoup pour prouver la supériorité des évêques. In Novo Testamento pontificum et simplicium sacerdotum ab ipso Christo ex eo assumpsisse videtur exordium quod duodecim apostolos quorum typum gerunt pontifices, ac duo et septuaginta discipulos instituit quorum typum gerunt simplices sacerdotes. Constat autem ex multis quæ de ipsis in sanctis leguntur Evangeliis, quod apostolorum et discipulorum auctoritas dispar fuit (2).

XV. S. Thomas était convaincu de la même vérité. Il la regardait apparemment comme importante, puisqu'il l'a établie en différents endroits. En voici quelques-uns :

Formam duo et septuaginta discipulorum non solum tenent presbyteri curati, sed quicumque alii minores ordinis qui epíscopis in eorum officio subserviunt (3).

Ecclesiæ, id est ad presbyteros, qui teBaptizare pertinet ad minores principes nent locum duo et septuaginta discipulorum Christi (4).

Christus post designationem duodecim apostolorum quorum personas gerunt episcopi, designavit duo et septuaginta discipulos quorum locum sacerdotis tenent (5).

Apostolis succedunt episcopi qui habent specialem curam gregis Domini; alii autem sacerdotes succedunt duo et septuaginta discipulis (6).

XVI. C'est l'observation de S. Bonaventure que: Sicut in apostolis forma est episcoporum, sic in duo et septuaginta discipulorum forma est presbyterorum (7).

XVII. Il serait étonnant que Gerson, le zélé défenseur du second ordre, se fût écarté de l'opinion commune. Il enseigne que : Status curatorum succedit statui duo et septuaginta discipulorum Christi (8). Discipuli quibus suc cedunt curati secundum glossas et canones fuerunt ordinarii hierarchæ (9).

(1) Fulbertus Carnot. Epist. 2.

(2) Thesaurus anecdotorum, tom. II, col. 711. (3) S. Thomae Summa 2-2 quæst. 188 art. 4, ad 5um. (4) Ibid. 3° part. quæst. 67. art. 2. ad. 2. (5) Idem in Epist. ad Philippenses, Lect. 1, cap. 1. (6) Idem in Epist. 2. ad Lect. 1, cap. 1.

(7) S. Bonaventura in cap. x. Evang. Lucæ. (8) Gerso de Stat. Eccl. de stat curat. cons. 1. (9) Ibid. Quæst. de Conc. Evang. et stat. person sub. finem.

« ÖncekiDevam »