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comme ayant déchaîné sur l'Église de France un plus grave péril que la Séparation elle-même. Cet article me prêtait des sentiments qui ne sont pas les miens, des opinions que je réprouve tout le premier. En conséquence, j'ai aussitôt écrit une lettre de rectification pour protester de ma soumission filiale à l'autorité ecclésiastique et pour rétablir mes idées grossièrement dénaturées.

Le journal en cause, par une tactique que les honnêtes gens et les tribunaux ont compétence pour apprécier, n'a pas voulu consentir à l'insertion de ma réponse. De ce côté, l'affaire n'est peut-être pas close. Mais, en attendant la solution qu'il me conviendra de lui donner en temps opportun, je voudrais user du droit que j'ai de répondre dans la Vérité Française. Celle-ci, en effet, a reproduit, il y a quelques jours, certaines communications de la Semaine religieuse de Nancy qui me font un devoir de ne pas laisser plus longtemps durer l'équivoque.

On m'a présenté à plusieurs reprises comme attaquant la foi et la hiérarchie, voulant amoindrir le dogme et presque le faire disparaître, prenant plaisir à renverser la tradition de l'Église et les bases mêmes du Christianisme. Tout cela est faux, purement et simplement. Je ne suis à aucun degré de ceux qui veulent minimiser la foi ou rompre avec la tradition authentique.

Quant à mes rapports avec la hiérarchie, on peut être assuré qu'ils resteront toujours, quoi qu'on fasse, exactement ceux d'un catholique soumis cordialement, sans restriction ni réserve. Ma résolution de fidélité à Dieu, à Jésus-Christ, à l'Église n'est liée au sort d'aucun système, fût-ce le mien. Je crois fermement et je confesse en toute simplicité de cœur ce que croit et enseigne la Sainte Église catholique apostolique romaine, non point pour telles ou telles évidences rationnelles que j'y trouve, mais à cause de la parole de Dieu, qui ne peut ni errer ni tromper. Et ma certitude repose inébranlable, par la grâce divine, sur une expérience

de vie plus forte que tous les discours.

Sur le fond du débat, je ne puis évidemment m'expliquer ici. Force m'est bien de renvoyer aux Revues où paraîtront mes réponses détaillées. Mais on m'a prêté tant d'erreurs et de sottises, on a si étrangement défiguré mon attitude et ma pensée, que je juge nécessaire de produire les brèves déclarations qui suivent.

J'avais rappelé quelques objections bien connues en les déclarant ruineuses pour une certaine conception théorique du dogme: on m'a fait dire qu'elles ruinaient irrémédiablement le dogme lui-même. J'avais critiqué certaines preuves et certaines méthodes apologétiques: on m'a fait dire qu'il n'y avait pas d'apologétique possible. J'avais écrit qu'il ne s'agissait en aucune manière << de modifier le contenu du dogme ni même son interprétation religieuse traditionnelle, mais seulement de déterminer la modalité du jugement dogmatique et la qualification qui lui convient »; j'avais ajouté que la réalité objective qui correspond au dogme « contient de quoi justifier comme raisonnable et salutaire la conduite que celui-ci prescrit »: on m'a fait dire que le dogme se réduisait à une simple recette sans valeur de vérité, que nous avions, par exemple, à nous comporter à l'égard de Jésus comme s'il était ressuscité sans croire qu'il le soit en effet. J'avais parlé d'une « relation nécessaire entre les dogmes et la pensée » et j'avais prévenu que le mot pratique ne signifiait nullement pour moi démarche aveugle: on m'a taxé d'agnosticisme (en même temps d'ailleurs que de rationalisme, ce qui ne s'accorde guère).

Après tant de contre-sens, et de si énormes, j'en passe, table pensée.

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et

qu'il me soit permis de rétablir ma véri

Les dogmes sont pour moi des affirmations positives, des affirmations notifiant des existences objectivement réelles, des affirmations irréformables parce que révélées et dès lors infaillibles. Je me suis demandé seulement de quel ordre est la vérité dogmatique? quelle est la modalité des affirmations correspondantes et comment il convient de la qualifier? sous quelles espèces nous

sont notifiées par elles ces réalités existantes qui constituent leur objet? sur quoi porte au juste l'adhésion absolue qu'elles exigent? Et j'ai répondu : la vérité dogma-tique, en tant que telle, est d'ordre vital, non spéculatif; les affirmations correspondantes énoncent des faits, des données, non des théories; elles nous présentent leur objet sous les espèces de l'attitude, de la conduite, de l'action requises par lui de notre part; et c'est uniquement sur le sens pragmatique et moral ainsi entendu que porte l'obligation d'adhérer par un acte de foi divine et catholique, sous la menace de censure avec la note d'hérésie.

Est-ce à dire que le dogme n'ait aucun rapport avec notre pensée, aucune valeur pour la connaissance, bref aucune existence intellectuelle? Nullement. Par cela seul qu'il pose des objets, des données, qu'il énonce des faits, le voilà qui existe au regard de l'intelligence: il lui apporte une matière et une direction. Comment se rait-il sans valeur pour la connaissance, alors que c'est d'un être raisonnable qu'il règle l'attitude et l'action? Le moral ne serait-il affaire que de sentiment ou de geste sans nul rapport à la pensée? De fait, nous savons. bien: 1o qu'on peut parler des dogmes et s'entendre quand on en parlė; 2° que les dogmes peuvent être pris. pour point de départ et matière de tout un corps de théories. Pour pratique et morale qu'elle soit, leur signification n'en est pas moins une véritable signification. Mais il importe de noter deux choses: 1° les dogmes pris en tant que tels appartiennent à l'ordre de la connaissance pratique, de la connaissance de fait détachée de toute théorie explicative, de cette connaissance qui se borne à désigner les objets par les réactions vitales. qu'ils provoquent en nous: comme les termes employés dans les définitions dogmatiques ne sont pas eux-mêmes dogmatiquement définis, c'est toujours au sens courant, usuel, commun, qu'il faut les entendre, non en un sens proprement philosophique; 2° les spéculations théologiques sont parfaitement légitimes et valables (et mêmenécessaires pour qui veut être un chrétien philo

sophe), mais elles restent affaire de discussion libre, sauf les cas où le dogme jouant son rôle négatif intervient en sa qualité de fait, de donnée, comme critère des théories: il serait inadmissible que l'adhésion de foi proprement dite, avec son caractère absolu et irréformable, aille à des élaborations qui demeurent soumises à tous les changements et à toutes les faiblesses de l'esprit humain.

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En terminant, permettez-moi, Monsieur le Directeur, de poser une simple question. Oui ou non, les laïcs ontils le droit et même le devoir de réfléchir leur foi, de travailler sous la surveillance paternelle de l'autorité compétente à la penser de leur mieux, d'essayer de la traduire dans un langage compris des adversaires parmi lesquels ils vivent et qu'ils s'efforcent de conquérir au Christ et à l'Église? Ont-ils le droit d'exposer aux théologiens que la force des choses condamne peut-être un peu à rester à l'écart, loin des âmes incroyantes quelles difficultés rencontre l'œuvre d'apostolat dont eux, les laïcs, supportent les premiers le poids et l'effort? Et quand ils ont ainsi demandé respectueusement aide et assistance, après avoir produit leur témoignage en toute sincérité de cœur, n'ont-ils pas le droit de se plaindre qu'on leur réponde par des attaques et non par des explications, qu'on déconsidère leur foi devant les incrédules qu'ils sont seuls à pouvoir atteindre directement, et qu'on donne en apparence des armes à ceux de leurs ennemis qui comparent la doctrine catholique à une poudrière où l'introduction de la moindre lumière est interdite parce qu'elle risque de faire tout sauter?

J'avais entendu répéter à l'envi: « Nous ne demandons que la discussion, nous ne désirons que l'examen des esprits sincères ». J'avais pris, je prends encore ces déclarations au sérieux, me refusant à n'y voir que de simples formules. En conséquence j'avais cru, je crois encore pouvoir interroger, poser des questions, solliciter des éclaircissements. Un fidèle aurait-il moins de droits au respect qu'un incrédule? Or, je le demande aux hommes de bonne foi, à ceux qui ne pensent pas

que prêter aux gens des intentions occultes soit un procédé avouable en critique, je le demande à tous ceux qui savent lire: ai-je fait autre chose qu'énoncer un problème, ouvrir une discussion, proposer une matière à la réflexion des théologiens, sans prétention aucune à clore moi-même un débat dont je n'ai voulu au contraire que provoquer le commencement? J'ai le regret de constater qu'on m'a répondu surtout par des attaques, et par des attaques parfois calomnieuses. On a semblé prendre à tâche de faire croire qu'il suffisait de trente pages signées par un croyant quelconque pour bouleverser toute l'Église et que le christianisme était en péril parce qu'un inconnu avait posé une question. Ce n'est pas d'un très bon exemple et c'est en outre un peu ridicule. Je persiste à penser que quelques réponses précises et calmes eussent mieux fait l'affaire et qu'un peu d'esprit chrétien n'eût pas été déplacé dans une discussion sur le christianisme.

Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'expression de mes sentiments les plus distingués.

Edouard LE ROY.

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