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Pour moi,relisant ce qui fut écrit et me sentant prêt à l'écrire encore, je déclare avec M. Fonsegrive (1); • Avons-nous eu tort de dire cela tout haut et, catholiques, d'avoir eu assez de confiance dans notre foi, dans la puissance de la vérité, pour avoir osé parler franc, parler net, même parler fort? Aurions-nous montré pius de respect pour nos croyances en parlant timidement et tout bas comme on parle au chevet des moribonds ?» Il faudra bien qu'on en prenne son parti. Nous ne sommes ni des protestants dissimulés ni des rationalistes honteux. Nous ne cherchons que la plus grande foi toujours, sans concessions ni marchandages. Nous ne voulons être à aucun degré des rebelles ou même des excentriques. Mais nous croyons assez fermement pour ne pas craindre de regarder les faits en face et de dire clairement ce qu'ils nous montrent; et nous attachons à la parole divine assez de prix pour vouloir la penser avec toutes les puissances de notre âme, assurés d'avance que nous y trouverons sans autres limites que nos propres limites la vie et la lumière. Nous nous sentons d'ailleurs assez protégés par le magistère vivant de l'Église pour garder la paix intérieure la plus complète à travers nos plus hardies enquêtes. Nous sommes enfin assez sûrs de notre obéissance à l'autorité légitime pour ne pas redouter de courir les risques méritoires qu'il y a toujours à vivre. Mais l'obéissance que nous entendons donner n'est pas une simple obéissance de formules et de gestes; c'est une obéissance profonde, qui nous prenne tout entiers, cœur, volonté, intelligence ; en

1. Quinzaine du 1er janvier 1906, p. 30.

un mot, une obéissance d'hommes raisonnables et d'hommes libres, non d'esclaves ou de muets.

Cependant, aussitôt paru l'article Qu'est-ce qu'un dogne? une vaste controverse commença, qui se poursuivit de plus en plus violente pendant une longue année ('). Non seulement les revues s'en mêbèrent comme c'était leur rôle naturel, mais les journaux quotidiens. Car, après m'avoir reproché d'ouvrir une discussion sur un tel sujet devant un public instruit, mais non spécialiste, on n'eut rien de plus pressé que d'en mettre les débats sous les yeux d'une foule qui n'avait plus cette fois ni compétence ni culture. L'organisation du scandale fut parfaite, et l'affaire copieusement exploitée par ceux qui se font de l'orthodoxie un monopole ou une enseigne et que l'on retrouve toujours les mêmes aux trousses de quiconque se permet de penser.

Aux polémiques ainsi conduites je ne répondrai pas. Leurs auteurs, en dépit des prétentions qu'ils affichent, ne représentent rien dans l'Église; et comme d'autre part ils ne discutent pas, mais condamnent et anathématisent, qu'ils remplacent le raisonnement par l'injure, la calomnie ou la dénonciation, ils ne représentent rien non plus au point de vue intellectuel. Ce qui nous sépare d'eux, beaucoup plus qu'une question de critique, c'est une question de moralité.

Heureusement d'autres interlocuteurs ont fait entendre leur voix: des interlocuteurs loyaux, désintéressés, esprits larges et cœurs droits, faisant effort pour comprendre et ne cherchant que le royaume de

1. Voir la Note I à la fin du volume.

Dieu, le bien des âmes, la lumière de la vérité. Le présent livré leur est dédié, à eux et à tous ceux, connus ou inconnus, qui leur ressemblent. A-t-il besoin de se justifier autrement que par ces paroles de Fénelon qu'il peut prendre pour devise: « Tout chrétien, loin d'entrer dans des disputes, doit au contraire s'expliquer de plus en plus, pour tâcher de contenter ceux qui ont eu de la peine sur ses premières explications ? Si ce motif ne suffisait pas, je dirais que je ne puis rester indifférent en face des opinions qu'on m'a prêtées; trop de gens n'ont eu connaissance de mon article que par d'incomplètes analyses, par des bruits tendancieux ou par des réfutations capables de les troubler; il faut que je donne un texte authentique, avec les gloses que la publicité des polémiques a rendues nécessaires. J'espère d'ailleurs avoir assez attendu pour que les esprits aient eu le temps de se calmer.

Au reste je m'en tiens à mon attitude initiale. J'ai voulu poser une question, rien de plus: les commentaires et réflexions qui l'accompagnent ne sont que pour en éclaircir le sens et la portée, pour montrer aussi qu'on n'y a point encore suffisamment répondu, pour fournir enfin un thème précis aux discussions et aux recherches: qui osera trouver làdedans matière à une accusation d'hérésie? Et maintenant je considère mon rôle sur ce point comme terminé ; j'ai dit ce que j'avais à dire; la question est posée, et nul ne fera qu'elle ne le soit point; les idées feront désormais leur chemin toutes seules, et nul ne les arrêtera. A l'avenir de répondre. Peutêtre verrons-nous bientôt une fois de plus ce qui fut d'abord jugé téméraire et scandaleux finir par être

universellement accepté comme une chose toute simple et toute banale.

Le présent volume contient la reproduction telle quelle de mon premier article et des défenses que j'en ai déjà publiées à peine si j'y ai fait quelques corrections de pure forme ou si j'y ai ajouté çà et là en guise d'éclaircissements deux ou trois très courtes notes. Le reste de l'ouvrage constitue une réponse globale inédite à diverses objections et un dévelop pement explicatif de ce que je m'étais borné tout d'abord à indiquer sommairement. A dessein je laisse le livre non composé, purement documentaire, simple recueil de mémoires où l'on trouvera un moment d'une pensée sous la forme même où il a été vécu, sans arrangement d'après coup. Cela explique certaines répétitions comme aussi certains défauts d'équilibre dans les développements. Mais c'était la seule manière de marquer qu'en effet je n'ai voulu que poser une question, non pas soutenir une thèse catégorique et définitive.

Toutefois, avant de clore cette préface, il faut que j'écarte quelques griefs généraux qu'on a cru devoir à plusieurs réprises articuler contre moi.

On m'a reproché d'abord de ne point parler la langue spéciale de la théologie scolastique. Il est certain que j'ai cru préférable de parler français. Mais eston bien sûr que ce soit par ignorance? Ne serait ce pas plutôt parce qu'il y a des langages qui supposent et impliquent toute une philosophie? Au surplus, peut-être n'est-il pas mauvais de parler aux gens un

langage qu'ils entendent. Or on ne saurait nier qu'aujourd'hui l'emploi du langage scolastique soit moins une aide qu'un obstacle. A quoi bon dès lors, quand on s'adresse à des modernes avec le désir d'en être compris, s'obstiner à se servir d'un tel discours? Va-t-on prétendre que la terminologie de l'École est indissolublement liée à la raison ou à la foi? On m'a dit que, faute de m'y tenir, je devenais inintelligible aux théologiens. Je ne puis croire que ceux-ci soient à ce point. étrangers au monde aujourd'hui vivant. Quelles que puissent être leurs habitudes et leurs préférences, je ne doute pas qu'avec un peu de bonne volonté, faisant passer le souci des âmes avant l'orgueil de caste ou l'esprit de système, ils n'arrivent à entendre le langage de tout le monde. Et pour le reste que leur demandé-je de si difficile? Ne pas chicaner sur chaque mot; tenir compte du contexte; fuir le petit jeu puéril qui consiste à extraire des propositions comme si le moindre membre de phrase était l'énoncé d'un théorème isolable; bref, chercher à comprendre plus qu'à réfuter: c'est tout simplement savoir lire. Sans doute mes idées sont imparfaites, leur expression lest aussi : j'en suis convaincu d'avance. Mais de qui n'est-ce point le cas? Toute recherche implique risque d'erreur. Je réclame le droit de n'être pas infaillible, sans que pour cela il me soit interdit de penser et d'écrire.

On m'a reproché ensuite et le reproche serait plus grave, s'il était fondé d'être un artisan de scandale, de troubler la foi des simples. Quelques uns ont même eu la charité de dire que je m'y appliquais. Étrange illusion! Il y a beau temps qu'en France les

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