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passion n'obéit pas elle-même, d'une manière détournée, à la loi des contrastes; mais elle ne nous concerne pas, puisque nous cherchons simplement les lois du « torrent actuel de la conscience », tel qu'il apparaît à l'introspection.

L'application de la loi des contrastes à la vie émotionnelle a reçu en ces derniers temps une démonstration éclatante, fournie par des faits anormaux.

La psychasthénie, en rapport intime avec la neurasthénie mais non identique avec elle (1), semble constituée par une atrophie relative de l'émotivité. Les objets perdent leur valeur émotionnelle. Il nous paraît probable que la «< psychasthénie la << psychasthénie », l'insuffisance mentale, consiste fondamentalement en une faiblesse dans les opérations synthétiques de l'intelligence. Les éléments mentaux présentés n'évoquent plus les éléments associés ordinaires qui leur constituent un halo finement nuancé; pour cette raison ils n'ont plus la même valeur émotionnelle, et l'affectivité paraît atteinte. Tous les objets usuels, et même les personnes les plus proches et les plus chères, deviennent complètement indifférents. Cependant le souvenir des émotions antérieures subsiste; le malade se sent changé, diminué, incomplet (incomplétude de Janet); et d'autre part les objets sont à peine reconnus, et paraissent aussi irréels que s'ils étaient simplement peints sur un tableau. Souvent alors une vague angoisse, et un violent désir d'émotions s'emparent du sujet (2). Il lui faut sortir de cet état de stagnation et d'indifférence. Il lui faut du changement, du contraste dans sa vie interne, et pour aboutir à ce résultat, il en arrive à se décider au suicide, à se mettre de propos délibéré dans de très

(1) Déjerine et Gauckler. Les manifestations fonctionnelles des psychonévroses.

(2) Ce fait semble bien établir que l'affectivité n'est pas attaquée primairement, car cette angoisse et ce désir sont bien des émotions.

gros embarras, à commettre des vols sans aucun profit. Il se donne ainsi une secousse émotionnelle pour reconquérir, au moins momentanément, l'intégrité de sa nature (1). Mais il lui faut, pour vivre, des secousses violentes, et il met ainsi en lumière, grossi et souligné, le besoin de contraste qui forme le fond de nos états affectifs.

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Le contraste dans la vie totale. — Sur ce dernier point il est manifestement inutile d'insister. Ce qui est vrai pour chacun des états mentaux qui se succèdent dans la conscience se vérifie encore de l'évolution de notre mentalité, dont les phases se mesurent par des périodes beaucoup plus longues. Les éléments de notre vie consciente, si tant est qu'on puisse parler ici d'éléments, s'emboîtent comme des satellites, des planètes, des soleils dans une gravitation immatérielle. Nous ne disons pas qu'il y ait retour périodique, bien qu'on l'ait prétendu. Mais il y a certainement subordination de plusieurs mouvements psychiques, dont le plus large mesure la fécondité de notre existence et caractérise notre vie. Chaque pensée, avec son cortège d'émotions et de tendances, vit et évolue, non dans un état, mais dans un courant psychique; et celuici même passe sans cesse, en révélant mille teintes différentes, et se trouve entraîné dans le tourbillon total de la vie, qui malgré son unité nous montre une richesse de formes, une plasticité qui échappe à toute description. La vie psychique n'est pas un état, mais une trajectoire. Pour vivre, il faut changer.

Personne n'ignore que les vies particulières se spécialisent, qu'elles s'enferment dans un moule étroit d'idées et d'opérations. C'est même là une condition essentielle de la fécondité. Il y a de pauvres petites âmes qui ne conçoivent plus rien au delà de l'étroite

(1) Janet rapporte un cas très instructif dans le JOURN. DE PSYCHOL. NORM. ET PATHOLOGIQUE, 1911, p. 97: « La cleptomanie et la dépression mentale ». III SÉRIE. T. XXI. 13

spécialité, dans laquelle les circonstances les ont enfermées. Mais c'est là une véritable mutilation. Si l'on veut conserver une àme complète, il faut périodiquement passer de la spécialisation, qui est la forme sociale de la vie psychique, à la vie intégrale qui affirme les droits et les exigences de l'individu. L'impérieux besoin de ces grandes alternances proclame que la marche générale de notre existence, aussi bien que ses aspects particuliers, est régie par la « loi des con

trastes ».

Il ne nous appartient pas de déterminer ici la manière dont on peut s'assurer le passage à la vie intégrale, malgré les exigences de la spécialisation. Ce problème, ainsi que la possibilité de dominer la « loi des contrastes » dans la vie affective par une initiative volontaire, nous ferait passer sur le terrain de la psychologie appliquée et de la morale, dont l'accès nous est interdit en ce moment.

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Contentons-nous de conclure que la loi des contrastes » ou « des relativités » s'applique à notre existence psychique et à toutes ses modalités. Il y a là un caractère qui distingue radicalement le monde de la conscience du monde des réalités externes. chaque chose n'est qu'elle-même, se juxtapose à toute autre en maintenant les limites de son individualité. Dans le monde de la conscience ce qui est, ce qui fait vivre, c'est la différence des êtres; notre âme chevauche en quelque sorte sur les séparations du monde physique, et prépare ainsi les « synthèses » qui sont le résultat de sa fonction la plus caractéristique.. - A ce titre la loi des contrastes n'est pas indépendante; elle est un aspect particulier, une phase préparatoire à la << loi de synthèse ».

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P. M. DE MUNNYNCK, O. P. Professeur à l'Université de Fribourg (Suisse).

FERDINAND VERBIEST

DIRECTEUR DE L'OBSERVATOIRE DE PEKING

(1623-1688)

C'est avec une certaine appréhension, j'allais dire un sentiment de regret, que j'imprime ces quelques pages. Verbiest, malgré sa célébrité, est mal connu. Missionnaire au sens propre du mot, il le fut fort peu. Directeur de l'observatoire impérial de Péking, voilà son grand titre de gloire! Mais Verbiest, membre de la Compagnie de Jésus, fut aussi recteur de la maison. de Péking, et vice-provincial de la Chine. Comme supérieur religieux, il eut à résoudre les problèmes les plus graves, et dut surmonter des difficultés que seule sa Correspondance inédite mettra peut-être un jour en lumière. Or, ce Verbiest-là, on ne le connaît pas, et je suis néanmoins dans la nécessité de n'en pas parler aujourd'hui.

J'ai pour cela plusieurs raisons.

D'abord, tout en ayant déjà réuni sur mon héros un grand nombre de pièces importantes et inconnues, je suis loin cependant de les posséder toutes; des fonds d'archives entiers me restent encore à dépouiller. Puis, les querelles religieuses auxquelles il fut mêlé, impossibles à traiter en quelques pages, sortent du cadre d'une revue scientifique et doivent être réservées pour un journal d'histoire ecclésiastique. Enfin leur étude

suppose la publication de la Correspondance de Verbiest; travail long, difficile, qui est loin d'être prêt.

Pour parler de Verbiest, j'eusse préféré attendre. Mais les flamands de la West-Flandre se préparent à lui élever un monument dans son village natal. Comment refuser de leur dire, à cette occasion, un mot de leur illustre compatriote? De le suivre dans ses voyages? De le montrer à la tête de l'observatoire de Péking? Même à ce point de vue restreint je possède cependant trop de pièces pour avoir la prétention de les épuiser. Aussi bien ai-je tout à gagner, en publiant quelques documents nouveaux en entier, plutôt qu'en cherchant à les résumer tous. Je laisserai parler Verbiest luimême le plus possible (1).

I

<< Moi, Ferdinand Verbiest, écrit-il, de sa main, dans l'Album des novices de la province Flandre-Belgique de la Compagnie de Jésus (2), je suis né à Pitthem, le 29 octobre 1623, de Josse Verbiest,bailli et receveur de Pitthem, Coolscamp, etc. et d'Anne Van Heeke, sa femme légitime. J'ai fait d'abord, chez les Pères de la Compagnie de Jésus à Bruges, un an d'humanités dans les figures; puis, j'ai achevé, en quatre ans, les quatre

Toutes les pièces

(1) Dans les notes bibliographiques, nous désignons par : AR, les Archives générales du Royaume, à Bruxelles. · sont empruntées au fonds jésuitique, province Flandre-Belgique ; BB, la Bibliothèque des Bollandistes ;

BR, la Bibliothèque Royale de Belgique ;

P, les Archives de la Propagande, à Rome;

SJ, les documents en possession de la Compagnie de Jésus.

A moins d'indication contraire, toutes les pièces manuscrites citées sont en latin; nous n'en donnons qu'une traduction.

(2) La collection de ces manuscrits est à la Bibliothèque du noviciat de la Compagnie de Jésus, à Tronchiennes. Les notices y sont données par ordre des dates d'entrée au noviciat.

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