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Cette même année acheva de disperser le groupe estudiantin auquel il était resté fidèle nonobstant son élévation à la chaire professorale. Depuis 1868, nous avions, les uns après les autres, conquis brillamment le diplôme d'ingénieur honoraire des Ponts et Chaussées ou d'ingénieur civil. L'esprit qui anima, réchauffa et soutint nos coeurs malgré les sécheresses inhérentes à nos austères études ne disparut point. Il s'était développé en inspirant des réunions scientifiques où chacun apportait son contingent d'étude sur des sujets parfois très divers. L'auteur de ces lignes en eut l'initiative; Paul Mansion fut le parrain et le principal promoteur du Cercle Leibniz. Ce nom illustre était celui d'un savant de premier ordre, d'un inventeur en hautes mathématiques, qui ne trouva jamais, -au contraire, - la moindre opposition entre la Foi et la Raison. Puis, saisi comme par un scrupule, notre ami remplaça le nom de Leibniz par celui de Cauchy. Ce dernier, illustre mathématicien aussi, professait la foi catholique, tandis que Leibniz, si larges, élevées et saines que fussent ses conceptions philosophiques et religieuses, appartenait à la Réforme protestante.

Sous l'influence des membres du Cercle Cauchy de Gand établis çà et là en Belgique, des cercles du même nom furent installés et fonctionnèrent régulièrement à Anvers, à Nivelles, à Bruxelles, à Mons, à Louvain et ailleurs. Le R. P. Carbonnelle s'intéressa à ces réunions de la jeunesse. Il y donna lui-même des conférences sur ses recherches originales ou sur des questions philosophiques touchant aux Confins de la Science et de la Philosophie. Avec des fervents des Cercles Cauchy: Philippe Gilbert, le grand et regretté professeur de Louvain, le Docteur Lefebvre, de célèbre mémoire, le comte François van der Straten Ponthoz, gentilhomme d'oeuvres religieuses et scientifiques, Léon 't Serstevens, qui consacra sa vie trop courte au

relèvement de l'agriculture, le R. P. Carbonnelle accepta l'idée qu'Alphonse Proost, le promoteur de la science agricole en Belgique, et le soussigné suggérèrent et défendirent, savoir: grouper les Cercles Cauchy en une association pour l'extension et la diffusion de la science.

Telle fut l'origine de la Société scientifique de Bruxelles. Paul Mansion assista aux réunions préparatoires et prit une part active aux débats d'où sortirent les propositions à soumettre à la première assemblée générale concernant la devise de la Société, son titre, ses statuts et règlement d'ordre. On peut dire, écrit Mansion dans son beau rapport présenté à l'assemblée du 10 avril 1901 sur les travaux de 1875 à 1901, que « le 17 juin 1875, la Société était virtuellement fondée ».

VIE DE FAMILLE

Quatre ans auparavant, le samedi 26 août 1871, Paul Mansion s'était marié avec Mademoiselle Cécile Belpaire, sœur de l'un de nos intimes amis d'université, feu Théodore Belpaire, mort beaucoup trop jeune le 20 octobre 1893, tandis qu'il remplissait, à Gand, les fonctions d'Ingénieur en chef, Directeur du Service technique provincial de la Flandre Orientale. Madame Paul Mansion appartenait à une famille de quatre enfants dont le père, Alphonse Belpaire, mort jeune aussi, avait épousé Mademoiselle Élisabeth Teichmann, la seconde des quatre filles de l'Inspecteur général des Ponts et Chaussées Teichmann. Celui-ci, devenu Ministre et puis Gouverneur de la Province d'Anvers, a laissé de grands souvenirs, après avoir fourni une carrière des plus remarquables. Son gendre, Alphonse Belpaire, dans le cours de quelques années passées au Corps des Ponts et Chaussées, s'est illustré par des publications

techniques où l'érudition profonde se joint à l'originalité de l'esprit. On lit encore avec fruit son Mémoire sur l'amélioration du Rupel (1845); sa Notice sur les cartes de mouvement de transport en Belgique pendant les années 1834 et 1844 (1847), au cours de laquelle il usa des cartogrammes à bandes inventés par lui, tandis que l'ingénieur français Minard les découvrait aussi de son côté ; son Étude sur la plaine maritime depuis Boulogne jusqu'au Danemark (1855), faisant suite à l'étude de son père Antoine Belpaire sur la plaine maritime depuis Anvers jusqu'à Boulogne.

Les cérémonies et fêtes du mariage de notre savant ami ne se sont pas effacées de la mémoire de ceux de ses amis qu'il y avait conviés, à Anvers : Constantin de Burlet; feu le baron Verhaegen et le soussigné.

Cette union bénie consacrait son entrée dans une famille, établie en un site charmant, spirituelle, joviale, sincère, pratiquant une piété avertie : la naturelle simplicité. Combien rarement ici-bas, l'idéal de beauté, de bonté, d'intelligence, de tendresse apparaît aux yeux ravis, touche le coeur d'un frisson de pur amour, soulève l'âme jusqu'à des hauteurs sereines où elle perçoit comme un écho des célestes harmonies! Notre ami sut, avec la grâce de Dieu, pénétrer et vivre en conquérant dans ce cercle assez fermé. Nous nous en réjouîmes; nous goûtàmes, pendant deux ou trois jours, après le départ des jeunes époux vers l'Allemagne et l'Italie, quelque chose du charme intime qui devait rejaillir sur leur vie conjugale de quarante-huit années. Elle n'aurait pas été sérieusement chrétienne, si la souffrance, noblement acceptée, ne s'y était point frayė un passage. Des huit enfants qui sourirent à leurs parents, un ange s'est d'abord détaché. Deux filles et un fils le suivirent, plus tard, après avoir enrichi les leurs du parfum de leurs qualités et de leurs vertus.

IIIe SÉRIE. T. XXVII.

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Quatre restent deux, l'un chef de famille, l'autre prêtre, se distinguent, comme leur père, dans des chaires d'Université; un troisième suit la carrière d'ingénieur industriel; une fille, imitant sa sainte et héroïque grand'tante, Constance Teichmann, a consacré sa jeunesse aux soins des malheureux. Durant les terribles années de guerre, elle a honoré à jamais sa vocation charitable au chevet des blessés et des morts pour la grande Patrie belge.

Mansion s'était voué d'une façon toute particulière, avec sa femme très érudite, à l'éducation et à l'instruction de ses enfants. Il dirigea les études de ses fils jusqu'à à leur entrée dans les classes des Humanités latines. Il leur enseigna, lui-même, les mathématiques, le dessin et les premiers éléments du latin. Il fit plus à l'égard de ses filles. Il les poussa très loin dans l'instruction privée qu'elles reçurent.

A ceux-là et à celles-ci, il inculqua, avec une assiduité sans pareille, l'admirable méthode qu'il mit au service de ses rares facultés intellectuelles. Il se complaisait à construire lentement, patiemment, avec sûreté, ces édifices vivants dont les fondements reposent sur le roc d'une union indissoluble et sur la pierre angulaire de l'Église.

RELIGION ET PHILOSOPHIE.

On n'élève point ainsi la jeunesse sans entretenir, en soi, le feu sacré de l'amour divin. L'âme humaine participe à l'essence de Dieu, dont elle est une créature de choix. Elle est aimée de Lui infiniment; elle Lui doit un amour qui, pour rester fini, n'en est pas moins. capable de progrès. L'âme de Mansion n'était guère mystique; en dehors de la prière, qu'il pratiquait avec ferveur, il ne s'adonnait point aux recherches expérimentales des contemplatifs; sa méthode était.

celle de l'École. En philosophie, il était disciple d'Aristote plutôt que de Platon ; en religion, il suivait le bienheureux Albert le Grand et Saint Thomas d'Aquin, de préférence à notre Jean de Ruysbroeck l'Admirable et à Saint Jean de la Croix. En nous exprimant ainsi, nous n'avons point la prétention, quoique son intime, d'affirmer qu'il ne lui arrivait point d'élever son esprit de pénitence jusqu'aux élans de la mystique et de mêler ceux-ci aux raisonnements de la scolastique. C'est le secret de son âme jusqu'au fond de laquelle il eût été indiscret à nous, simple ami, de pénétrer.

Dès le Collège communal de Huy, M.J. Poumay, son professeur de littérature, auquel il voua toujours beaucoup de reconnaissance, lui recommanda les œuvres d'Auguste Nicolas et de Joseph de Maistre; elles firent sur lui une grande impression. Il ne la laissa point s'effacer. Il estimait, jeune encore, que les catholiques avaient d'autant plus de devoirs à remplir envers leur raison qu'ils avaient le bonheur de posséder la foi. Tout le long de sa carrière, ce fut une pensée dominante à laquelle il conforma sa volonté, ses sacrifices, ses études, ses œuvres, ses enseignements en famille, à l'Université et dans le monde.

Les œuvres du R. P. Gratry, de Tandel, du Cardinal Newman, la Summa conciliorum de Caranza-Silvius, les Prælectiones dogmaticæ du R. P. Perrone, S. J., la Summa Summa St Thoma comptèrent surtout parmi ses livres de chevet avec les Evangiles et les Vies des Saints.

Parmi les traités d'apologétique dont il lut un grand nombre, il distingua, hautement, l'Apologétique récente de M. l'abbé Verhelst. Il en fit, pendant la guerre, une analyse approfondie qui ne tardera sans doute pas à être publiée.

Il lisait aussi, car sa lecture était immense comme sa mémoire, les ouvrages philosophiques. Encore étu

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