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se heurter contre une volonté inébranlable, plus forte que la mort elle-même, et qu'il fallait céder. Persécuter le Pape, c'était faire un martyr, sans échapper au scandale; essayer de le gagner, c'était peine inutile: il fallait à tout prix, et dans quelques heures, consentir au mariage religieux.

Mgr Fesch, grand aumônier de l'empereur, fut chargé de faire la cérémonie, pendant la nuit, dans la chapelle des Tuileries, avec le plus profond secret, en présence de Talleyrand et du maréchal Berthier.

Avant la cérémonie, Mgr Fesch se présenta au Pape, et lui dit avec un profond respect :

« Très Saint Père, je peux me trouver dans un tel cas où j'aurai besoin de tous les pouvoirs de Votre Sainteté.

Eh bien! » répondit le Pape, « je vous les donne tous. >>

Le curé de la paroisse n'assista pas, il est vrai, à la célébration du mariage dans la chapelle des Tuileries; mais cet empêchement n'était-il pas levé par les pouvoirs extraordinaires et sans condition que le Pape avait accordés au grand aumônier pour valider le mariage de l'empereur ?

Est-il vraisemblable que Mgr Fesch, décidé à répondre au désir du Saint-Père et aux desseins de l'empereur, en bénissant l'union légitime de l'impératrice Joséphine avec Napoléon, ait oublié cependant de remplir une condition essentielle à la validité du sacrement?

Ces questions furent agitées plus tard, lorsque l'empereur, trompé dans ses espérances et douloureusement surpris de n'avoir pas d'héritier, demanda au tribunal ecclésiastique, dont M. Émery faisait partie, de prononcer la nullité du mariage contracté, en présence du grand aumônier, dans le mystère de la chapelle des Tuileries.

La cérémonie du sacre eut la solennité et l'éclat que l'on pouvait attendre; mais, jusqu'aux pieds de l'autel, dans la pompe d'une fête qui devait avoir un caractère exclusivement religieux, Napoléon ne craignit pas d'affirmer son indépendance à l'égard du vicaire de Jésus-Christ.

L'histoire de l'Église nous apprend que, depuis l'origine des siècles chrétiens, les empereurs de France et d'Allemagne sacrés par le Pape ont reçu des mains du Souverain Pontife la couronne, symbole de leur puissance bénie de Dieu. Le cardinal Consalvi n'avait pas manqué, au cours des négociations, de rappeler cette tradition chrétienne au cardinal Caprara; dans une note diplomatique, datée du 7 août, il l'avait invité à ne pas la négliger, en réglant, avec l'agrément de Sa Sainteté, les détails de la cérémonie du couronnement de l'empereur.

Mais Napoléon trompa l'attente et les desseins de Consalvi. D'une main décidée, il prit lui-même la couronne, et la posa sur sa tête, au grand étonnement de Pie VII, dont les ordres étaient méconnus.

Une protestation était inutile: elle aurait irrité. l'empereur, sans lui causer des regrets. Le doux Pontife garda le silence; il se contenta d'exiger que l'acte inconvenant de Napoléon, infidèle à sa promesse, qui blessait gravement la dignité pontificale, ne fût pas mentionné au Moniteur,

V

Pendant son séjour à Paris, Pie VII reçut les hommages du clergé, visita les églises, et prodigua aux fidèles accourus pour le vénérer les témoignages touchants de sa tendresse paternelle. Une lettre de M. Émery à l'évêque d'Alais nous apprend avec quelle faveur il fut reçu lui-même par le Souverain Pontife.

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« Vous êtes bien bon », écrit M. Émery, « de prendre intérêt à ma santé et à mon existence dans ce monde. Cette dernière m'est bien pénible; elle ne le serait pas, si j'avais comme vous le bonheur de vivre dans la solitude. Le service de M. SaintPapoul s'est très bien fait, Il y avait une trentaine d'évêques. Aucun des constitutionnels n'y a manqué. Je m'informerai des anciens évêques. Je sais déjà un fait; c'est que, lundi dernier, étant à l'archevêché, M. de Juigné y vint en soutane violette et avec sa croix, et nous dit qu'il venait de voir Sa Sainteté.

« J'ai rendu mes devoirs au Saint-Père avec le clergé de Paris. Quand mon tour vint d'aller au baisement des pieds, - et il vint fort tard, parce que je n'avais pas été averti assez à temps, M. le cardinal de Belloy me nomma. Alors le Pape me sourit très gracieusement, et me dit des choses très aimables, à ce qu'on m'a rapporté, car je ne distinguai point ce qu'il daigna me dire. M. le cardinal Fesch lui avait parlé de moi la veille, et de Saint-Sulpice, et m'a dit qu'il voulait me présenter, Mais il me suffit d'avoir reçu la bénédiction du Saint-Père.

«Le curé de Saint-Sulpice se présenta un quart d'heure après moi, et, à ce nom de Saint-Sulpice, il fut accueilli très gracieusement. Les marguilliers de Saint-Sulpice, au nombre desquels se trouvent des sénateurs et le premier président Séguier, ont prié le Pape d'honorer Saint-Sulpice de sa présence. Il a promis d'y venir dire la messe le dernier dimanche de l'Avent (1). »

Le Pape sortit de France et rentra dans sa ville éternelle, avec le regret de n'avoir rien obtenu de l'empereur, en reconnaissance du témoignage éclatant de haute bienveillance qu'il venait de lui accorder, malgré l'étonnement des vieilles cours de l'Europe et malgré l'opposition respectueuse de quelques membres du Sacré Collège. Il ne savait pas encore qu'il verrait un jour son palais envahi

(1) Lettre du 15 décembre 1804.

par les troupes impériales, et que, prisonnier de celui que sa main venait de sacrer empereur, il franchirait encore une fois la frontière de France, et expierait dans une détention rigoureuse son dévouement héroïque à la cause de l'Église et de la justice.

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