Sayfadaki görseller
PDF
ePub
[ocr errors]

M. Émery profila de cette situation pour former à peu de frais les deux grandes bibliothèques du séminaire, à Paris et à la campagne, et le fonds prin. cipal de la bibliothèque du séminaire de Baltimore. « Il faut bien », disait-il souvent, << nous procurer des livres, puisque la révolution nous a dépouillés de tous ceux qui nous restaient une bibliothèque est indispensable au séminaire. »

Il acheta à des prix insignifiants, les œuvres des Pères de l'Église les plus célèbres, des commentaires sur l'Écriture sainte, les traités des canonistes et des théologiens les plus renommés, et une grande quantité d'exemplaires de la Bible et du Nouveau Testament.

<< Comme il était très bon connaisseur », raconte M. Garnier, avec une simplicité touchante, «< il ne manquait point de découvrir les livres les plus utiles. Un jour, ayant trouvé un ouvrage qu'il ne connaissait pas, il s'assit sur un tas de vieux papiers pour l'examiner à loisir. Après l'avoir lu attentivement il me dit : « Voilà un ouvrage plein de recherches, à la composition duquel l'auteur a consacré toute sa vie; il faut empêcher qu'il soit détruit; je veux l'acheter. » Une autre fois, nous bouquinions ensemble, il démolit, par mégarde une haute pile de livres pour retirer un ouvrage qui était à la base. La pile tombe sur lui, un livre relié lui blessa la tête jusqu'au sang; on fût obligé d'appliquer une compresse d'eau froide sur la blessure. M. Émery, qui ne perdait jamais sa gaieté, me dit en souriant :

Où est le livre qui m'a blessé? Je veux l'acheter; s'il est bon, je lui fais grâce; s'il est mauvais, je le .jette au feu. »

M. Émery était heureux dans ses recherches: il eut ainsi la fortune de découvrir un jour des manuscrits inédits de Fénelon; il en fit l'acquisition, avec la pensée d'encourager plus tard un écrivain de mérite à publier la Vie et une édition complète des OEuvres du célèbre archevêque de Cambrai (1).

Il confia son projet à un homme qui avait un rare talent, de longs loisirs, un esprit sage et le culte des classiques du grand siècle : c'était M. de Bausset, évêque d'Alais, élevé plus tard, par la bienveillance du Saint-Père, à la dignité de cardinal..

[ocr errors]

Né à Pondichéry, le 14 décembre 1748, d'un père qui occupait une haute situation civile au service du gouvernement, Bausset revint en France tout jeune encore, embrassa l'état ecclésiastique, et

(1) M. Girardin, commissaire-priseur à Paris, prévint M. Emery que les manuscrits de Fénelon allaient être vendus. Ils furent d'abord achetés au nom de M. de Bausset, et celui-ci les céda ensuite à M. Émery. Il est certain, par la correspondance de M. Émery, que Mme de Campigny savait bien qu'on 'allait vendre ces manuscrits, et qu'il dépendait d'elle de les acheter ou de les revendiquer. Nous avons l'acte d'achat des

fut ordonné prêtre à l'âge de vingt-cinq ans. La distinction de son esprit et de ses manières, l'aménité de son caractère, ses rares dispositions pour les lettres, appelèrent sur lui l'attention de M. de Boisgelin, archevêque d'Aix, qui lui donna des lettres de grand vicaire et le retint dans son palais.

Député de la Provence à l'assemblée générale du clergé, administrateur du diocèse de Digne, il fut promu à l'épiscopat en 1784. Nous le retrouvons, en 1789, aux états généraux, déjà lié avec M. Émery, dont il écoute les conseils dans ses atta ques courtoises mais vigoureuses contre la constitution civile du clergé. Prisonnier à la maison dé la Bourbe, pendant la révolution, il en sort la vie sauve, et se retire, avec la pensée de renoncer à l'exercice de ses fonctions épiscopales, dans une maison de campagne, aux environs de Paris.

Il fut le confident et le meilleur ami de M. Émery. Dans ses épreuves et ses tristesses, dans ses ennuis et ses déboires, dans ses joies comme dans ses espérances, le cœur de M. Emery cherchait toujours le cœur de M. de Bausset, qui lui resta fidèle jusqu'à sa dernière heure. Il n'eut jamais pour lui ni réticence

manuscrits de Fénelon. M. Girardin, comme fondé de pouvoirs de M. Louis François-Charles de Salignac-Fénelon, aîné de la famille, dont la procuration est jointe à l'acte, les vendit pour 2400 fr. A la suite de l'acte est la reconnaissance de M. de Baússet, constatant qu'ils ont été payés des deniers de M. Émery, Lacte est du 24 brumaire an IX, qui correspond au 15 novembre 1800,

ni secret. Sa correspondance avec M. de Bausset, écrite au courant de la plume et dans un long épanchement de son âme, est le reflet de toutes les principales actions de sa vie. Le célèbre cardinal, qui eut la douleur de survivre à son illustre ami, aima ses enfants comme il avait aimé leur père : il ne cessa jamais de donner à la Compagnie de Saint-Sulpice les témoignages les plus touchants de son affection.

Le cardinal de Bausset, libre de la sollicitude épiscopale, avait tous les loisirs nécessaires pour répondre au désir de M. Émery et préparer sous sa direction la publication des OEuvres complètes de Fénelon.

Il ne fut pas facile à M. Émery de se procurer les manuscrits de l'archevêque de Cambrai. Ces papiers étaient entre les mains d'un huissier intelligent et intéressé, qui ne voulait pas laisser passer sans en profiter cette heureuse occasion de réaliser peutêtre un bénéfice considérable. Il assurait même que l'État voulait les acquérir à tout prix, mais qu'il craignait de n'être pas payé. M. Émery mena l'affaire avec prudence, et devint par adjudication publique acquéreur de ces manuscrits.

Il eut à souffrir quelques ennuis, dans cette circonstance, de la part d'une personne qui appartenait à la famille de Fénelon, Mine de Campigny. Cette femme aimait les vieux livres, et regrettait beaucoup d'avoir laissé vendre à un étranger, des papiers qui avaient pour elle une grande valeur. M. Émery consentit néanmoins à lui céder

quelques manuscrits qu'il apporta lui-même à la maison de Mme de Campigny. En recevant son paquet, la domestique lui répondit avec colère : « Voilà encore des pourritures pour madame! »>

D'où je conclus, disait avec esprit M. Émery, que cette domestique n'aime pas les vieux papiers, ce qui est très naturel, et que Mme de Campigny les aime beaucoup.

« L'affaire des manuscrits est enfin terminée, »> écrit M. Émery à l'évêque d'Alais, le 16 novembre 1800: « les manuscrits sont chez moi; le payement est fait, et je crois que la cession est en bonne forme. J'ai trouvé les manuscrits dans l'état où ils étaient lorsque je les ai examinés: mais ils étaient dans un état déplorable. Il s'agit maintenant de vous les faire parvenir. Si vous devez venir à Paris dans quelque temps, mon avis est de vous attendre, afin que vous puissiez jeter un coup d'œil sur l'ensemble, car ce n'est qu'après cet aperçu général que vous pourrez commencer par former un système. Si je trouve l'abbé Galard, chargé autrefois du dépôt des manuscrits et de l'édition, je désirerais lui montrer les manuscrits, afin d'avoir ses conseils et le plan qu'il avait conçu. Il peut donner sur le détail des manuscrits des renseignements très utiles, et il serait très à propos que vous le voyiez une ou deux fois.

.

« Voilà donc les manuscrits sauvés!

« Il me semble que toute espérance de reprendre vos fonctions est fort éloignée, et en même temps,

« ÖncekiDevam »