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je veux traiter de gré à gré, ou attendre la réquisition qui me serait faite. J'ai l'honneur de répondre à Votre Excellence que je désire traiter avec elle de gré à gré, et qu'elle sera maîtresse des conditions.

« Il me suffit de savoir que l'intention de l'em. pereur est que je renonce à la propriété de la maison. Sa majesté me trouvera toujours disposé à faire ce qui est en mon pouvoir, et que je croirai lui être agréable. Elle m'a comblé de bonté dans tous les temps. Je ne peux pas oublier qu'elle m'a offert sucessivement les trois évêchés d'Arras, de Troyes et d'Autun, et que, quand il a été question de nommer des conseillers de l'Université, elle a daigné, de son propre mouvement, jeter les yeux sur moi.

<< Elle me traita encore avec beaucoup d'affabilité, l'année dernière, dans l'audience qu'elle voulut bien m'accorder à Fontainebleau. Je lui dois une grande reconnaissance, et je ne peux qu'être douloureusement affecté de ce que, depuis cette époque, on a travaillé à me perdre dans son esprit. C'est apparemment en me faisant passer comme un ultramontain forcené... >>

Sous le coup qui le frappait si cruellement, et sans perdre sa dignité par une servilité indigne de son caractère, M. Émery était trop sage et trop chrétien pour faire une opposition systématique au gouvernement, et oublier les témoignages de confiance particulière, d'estime, de respect qu'il avait reçus de l'empereur.

L'heure de la séparation était venue. M. Émery rassembla la communauté déjà profondément émue par les premiers bruits de la douloureuse nouvelle, dans la salle des exercices, à l'heure de la lecture spirituelle; il exposa et commenta avec une émotion profonde, et d'une voix tremblante, les paroles d'adieu suprême de Saint Paul aux premiers chrétiens qu'il avait engendrés à la foi, et qui avaient reçu les premières tendresses de son âme. Il parla longuement de son dévouement à l'église romaine de la fidélité à la règle, du soin qu'il aurait de leur donner des professeurs soumis sans réserve à l'autorité de l'église, malgré les difficultés élevées par la haine des méchants, de la nécessité de rester inébranlables dans la fidélité d'une obéissance absolue et filiale à tous les enseignements émanés du Saint-Siège, et leur promit que sa pensée serait toujours au milieu d'eux.

Rien de plus touchant que cette scène, où ce grand vieillard qui avait blanchi dans les combats pour la défense de l'Église et la conservation de l'œuvre immortelle de ses pères, le cœur déchiré, les yeux pleins de larmes, interrompu par les sanglots de ses enfants, qui répondaient à sa propre douleur, à la veille de paraître devant Dieu, donnait à tous les siens, d'une voix émue, les derniers accents de sa tendresse et les suprêmes conseils d'un cœur rempli de l'esprit d'en haut.

Mais laissons parler un témoin, l'abbé de Mazenod, qui fut plus tard évêque de Marseille.

« Nous étions tous émus jusqu'aux larmes, L'avant-quart sonna pendant qu'il parlait encore. Gosselin, exact comme il l'a toujours été dans ses diver" ses fonctions, se levait pour aller sonner, M. Émery s'en aperçut et l'arrêta, en disant ces paroles mémorables pour un supérieur qui avait présidé, depuis tant d'années, à un si grand nombre d'exercices de la communauté : « C'est la première fois que je passe l'heure et que j'interromps l'ordre du règlement et ce sera la dernière. » Il acheva ce qu'il avait à nous dire, et on l'écoutait encore, L’émotion était à son comble. On était dans une sorte de perplexité. Chacun sentait qu'il manquait quelque chose à cette scène attendrissante. Ceux qui étaient à mes côtés me pressaient de prendre la parole. Teysserre, entre autres, me disait: Parlez donc au nom de nous tous. J'en sentais moi-même le besoin,

« C'est alors que me levant, je lui exprimai vivement les sentiments que tous les cœurs me dictaient. Je lui donnai le doux nom de Père, et je lui protestai, interprète de tous mes condisciples, que tous ses enfants seraient dignes de leur père dans les temps difficiles où nous nous trouvions.

<«< Je finis en le suppliant de nous bénir tous, avant de nous quitter. La scène fut courte, mais excessivement touchante. A ces derniers mots, toute la communauté, directeurs et élèves, se prosterne, et le saint vieillard, ému jusqu'au fond de l'âme, et presque troublé, car il fut sur le point de

380 M. ÉMERY ET L'ÉGLISE DE FRANCE

sé mettre à genoux comme nous, leva les mains au ciel et nous bénit. »

La douleur de ces adieux, exprimée avec cette simplicité touchante par un des fils les plus aimés de M. Émery, qui a laissé sur le siège épiscopal de Marseille la réputation d'une sainteté éminente, nous fait connaître l'esprit paternel qui régnait alors au séminaire et la tendresse filiale des élèves pour leur supérieur.

M. Émery se retira à Issy. En arrivant dans cette maison tranquille, il s'agenouilla aux pieds de Notre-Dame de Toutės-grâces, et confia à la bonne Vierge qui n'avait jamais cessé de le protéger, ses douleurs, ses épreuves et ses espérances.

« Dans la tempête que nous éprouvons, » disait cet homme de Dieu, « toute ma confiance est dans la Sainte Vierge, la mère Agnès, M. Olier, ses successeurs et tous les patrons du séminaire. »

Son âme éprouvée par de si grandes tristesses trouvait un refuge assuré et plein de consolations spirituelles dans un commerce plus intime avec les saints qui veillaient sur l'œuvre persécutée de M. Olier; elle attendait, sans découragement, des jours meilleurs.

CHAPITRE IX

LE DERNIER COMBAT

SOMMAIRE: M. Emery à Issy.

Il recouvre les bonnes grâces de l'empereur. Audience du 1er janvier 1811 et paroles, flatteuses de l'empereur. M. d'Astros et la colère de l'empereur.-M. Emery fait partie de la commission ecclésiastique de 1811. Ses embarras et ses ennuis. Projet de convocation d'un concile national. Le point principal du débat.- Séance extraordinaire dn 7 mars, aux Tuileries. Eloge de M. Emery par le cardinal Consalvi.

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I

Malgré son départ de Paris, et son exil passager dans la maison d'Issy, M. Émery n'avait pas cessé d'assister régulièrement aux séances du Conseil de l'archevêché et du Conseil supérieur de l'université de France. Souvent, à l'occasion de ses fréquents voyages à Paris, après la disgrâce de Fouché dont il n'avait plus à craindre le ressentiment implacable, il faisait de courtes apparitions au séminaire SaintSulpice et bénissait ses enfants, dont il n'avait pas le courage de se séparer, sans retour.

Au 1er janvier 1811, M. Émery se présenta chez l'empereur, avec tous les membres du Conseil supérieur de l'université, convoqués, pour offrir au chef de l'État l'expression de leurs sentiments de fidélité

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