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la même juridiction dont elle jouissait sous les empereurs païens. Il n'est jamais permis d'y donner atteinte, parce qu'elle la tient de Jésus-Christ (1). Avec quelle peine le Saint-Siège ne doit-il pas voir les entraves qu'on veut mettre à ses droits?

Le clergé de France reconnaît lui-même que les jugements émanés du Saint-Siège, et auxquels adhère le corps épiscopal, sont irréfragables: pourquoi auraient-ils donc besoin de l'autorisation du gouvernement, puisque, suivant les principes gallicans, ils tirent toute leur force de l'autorité qui les prononce et de celle qui les admet? Le successeur de Pierre doit confirmer ses frères dans la foi, suivant les expressions de l'Écriture; or, comment pourra-t-il le faire si, sur chaque article qu'il enseignera, il peut être à chaque instant arrêté par le refus ou le défaut de vérification de la part du gouvernement temporel? Ne suit-il pas évidemment de ces dispositions que l'Église ne pourra plus savoir et croire que ce qu'il plaira au gouvernement de laisser publier?

Cet article blesse la délicatesse et le secret constamment observés dans les affaires de la Pénitencerie. Tout particulier peut s'y présenter avec confiance et sans crainte de voir ses faiblesses dévoilées. Cependant cet article, qui n'excepte rien, veut que les brefs même personnels, emanés de la Pénitencerie, soient vérifiés. Il faudra donc que les secrets de famille et la suite malheureuse des faiblesses humaines soient mis au grand jour, pour obtenir la permission d'user de ces brefs? Quelle gêne! quelles entraves! Le parlement lui-même ne les admettait pas, car il exceptait de la vérification les provisions, les brefs de la Pénitencerie et autres expéditions concernant les affaires des particuliers.

Le second article déclare, « qu'aucun légat, nonce ́ou délégué du Saint-Siège ne pourra exercer ses pou

(1) D'Héricourt, Lois ecclésiastiques.

voirs en France sans la même autorisation. » Je ne puis que répéter ici les justes observations que je viens de faire sur le premier article : l'un frappe la liberté de l'enseignement dans sa source, l'autre l'atteint dans ses agents; le premier met des entraves à la publication de la vérité, le second à l'apostolat de ceux qui sont chargés de l'annoncer. Cepandant Jésus-Christ a voulu que sa divine parole fût constamment libre, qu'on pût la prêcher sur les toits, dons toutes les nations et auprès de tous les gouvernements. Comment allier ce dogme catholique avec l'indispensable formalité d'une vérification de pouvoirs et d'une permission civile de les exercer? Les apôtres et les premiers pasteurs de l'Église naissante eussent-ils pu prêcher l'Évangile, si les gouvernements eussent exercé sur eux un pareil droit ?

Le troisième article étend cette mesure aux canons des conciles même généraux. Ces assemblées si célèbres n'ont eu nulle part plus qu'en France de respect et de vénération, comment se fait-il donc que chez cette même nation elles éprouvent tant d'obstacles, et qu'une formalité civile donne le droit d'en éluder, d'en rejeter même les décisions?

On veut, dit-on, les examiner. Mais la voie d'examen, en matière religieuse, est proscrite dans le sein de l'Église catholique il n'y a que les communions protestantes qui l'admettent; et de là est venue cette étonnante variété qui règne dans leurs croyances.

Quel serait d'ailleurs le but de ces examens ? Celui de reconnaître si les canons des conciles sont conformes aux lois françaises? Mais si plusieurs de ces lois, telles que celles sur le divorce, sont en opposition avec le dogme catholique, il faudra donc rejeter les canons, et préférer les lois, quelque injuste ou erroné qu'en soit l'objet ? Qui pourra adopter une pareille conclusion? Ne serait-ce pas sacrifier la religion, ouvrage de Dieu

même, aux ouvrages toujours imparfaits et souvent injustes des hommes?

Je sais que notre obéissance doit être raisonnable, mais n'obéir qu'avec des motifs suffisants n'est pas avoir le droit, non seulement d'examiner, mais de rejeter arbitrairement tout ce qui nous déplaît.

Dieu n'a promis son infaillibilité qu'à son Église : les sociétés humaines peuvent se tromper; les plus sages législateurs en ont été la preuve. Pourquoi donc comparer les décisions d'une autorité irréfrayable avec celle d'une puissance qui peut errer, et faire, dans cette comparaison, pencher la balance en faveur de cette dernière.? Chaque puissance a d'ailleurs les mêmes droits; ce que la France ordonne, l'Espagne et l'Empire peuvent l'exiger; et comme les lois sont partout différentes, il s'ensuivra que l'enseignement de l'Eglise devra varier suivant les peuples pour se trouver d'accord avec les lois.

Dira-t-on que le parlement français en agissait ainsi? Je le sais; mais il n'examinait, suivant sa déclaration du 24 mai 1766, que ce qui pouvait, dans la publication des canons et des bulles, altérer ou intéresser la tranquillité publique, et non leur conformité avec des lois qui pouvaient changer dès le lendemain.

Cet abus, d'ailleurs, ne pourrait être légitimé par l'usage, et le gouvernement en sentait si bien les inconvénients, qu'il disait au parlement de Paris, le 6 avril 1757, par l'organe de M. d'Aguesseau : « Il semble qu'on cherche à affaiblir le pouvoir qu'a l'Église de faire des décrets, en le faisant tellement dépendre de la puissance civile et de son concours que, sans ce concours, les plus saints décrets de l'Église ne puissent obliger les sujets du roi. »

Enfin, ces maximes n'avaient lieu dans les parlements suivant la déclaration de 1766, que pour rendre les décrets de l'Église lois de l'État, et en ordonner l'exécution,

avec défense, sous les peines temporelles, d'y contrevenir. Or, ces motifs ne sont plus ceux qui dirigent aujourd'hui le gouvernement, puisque la religion n'est plus la religion de l'Etat, mais uniquement celle de la majorité des Français.

L'article 5 déclare qu'il y aura recours au Conseil d'État pour tous les cas d'abus. Mais quels sont-ils ? L'article ne les spécifie que d'une manière générique et indéterminée.

On dit, par exemple, qu'un des cas d'abus est l'usurpation ou l'excès de pouvoir. Mais, en matière de juridiction spirituelle, l'Eglise en est le seul juge; il n'appartient qu'à elle de déclarer « en quoi l'on a excédé ou abusé des pouvoirs qu'elle seule peut « conférer »; la puissance temporelle ne peut connaître l'abus excessif d'une chose qu'elle n'accorde pas.

Un second cas d'abus est la contravention aux lois et règlements de la République; » mais si ces lois, si ces règlements sont en opposition avec la doctrine chrétienne, faudra-t-il que le prêtre les observe de préférence, à la foi de Jésus-Christ? Telle ne fut jamais l'intention du gouvernement.

On range dans la classes des abus « l'infraction des règles consacrées en France par les saints canons... » Mais ces règles ont dû émaner de l'Église; c'est donc à elle seule de prononcer sur leur infraction, car elle seule en connaît l'esprit et les dispositions.

On dit enfin qu'il y a lieu à l'appel comme d'abus pour toute entreprise qui tend à compromettre l'honneur des citoyens, à troubler leur conscience ou qui dégénère contre eux en oppression, injure ou scandale public d'après la loi.

Mais si un divorcé, si un hérétique connu en public se présente pour recevoir les sacrements, et qu'on les lui refuse, il prétendra qu'on lui a fait injure, il criera au scandale, il portera sa plainte, on l'admettra d'après

la loi; et cependant le prêtre inculpé n'aura fait que son devoir, puisque les sacrements ne doivent jamais être conférés à des personnes notoirement indignes.

En vain s'appuierait-on sur l'usage constant des appels comme d'abus. Cet usage ne remonte pas au delà du règne de Philippe de Valois, mort en 1350; il n'a jamais été constant et uniforme: il a varié suivant les temps; es parlements avaient un intérêt particulier à l'accréditer: ils augmentaient leurs pouvoirs et leur attribution; mais ce qui flatte n'est pas toujours juste. Ainsi Louis XIV, par l'édit de 1695, art. 34, 36, 37, n'attribuait-il aux magistrats séculiers que l'examen des formes, en leur prescrivant de renvoyer le fond au supérieur ecclésiastique. Or cette restriction n'existe nullement dans les articles organiques. Ils attribuent indistinctement au conseil d'Etat le jugement de la forme et celui du fond.

D'ailleurs les magistrats qui prononçaient alors sur ces cas d'abus étaient nécessairement catholiques, ils étaient obligés de l'affirmer sous la foi du serment, tandis qu'aujourd'hui ils peuvent appartenir à des sectes séparées de l'Église catholique et avoir à prononcer sur des objets qui l'intéressent essentiellement.

L'article 9 veut que le culte soit exercé sous la direction des archevêques, des évêques et des curés. Mais le mot direction ne rend pas ici les droits des archevêques et évêques : ils ont, de droit divin, non seulement le droit de diriger, mais encore celui de définir, d'ordonner et de juger. Les pouvoirs des curés dans les paroisses ne sont pas les mêmes que ceux des évêques dans les diocèses, on n'aurait donc pas dû les exprimer de la même manière et dans les mêmes articles, pour ne pas supposer une identité qui n'existe pas.

Pourquoi d'ailleurs ne pas faire ici mention des droits de Sa Sainteté? A-t-on voulu lui ravir un droit général qui lui appartient essentiellement ?

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