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INTRODUCTION.

Le livre des Philosophumena, enseveli pendant plusieurs siècles dans un couvent de la Grèce, fut découvert et apporté en France en 1842 par M. Mynoidès Mynas, et déposé à la Bibliothèque impériale, où il serait peut-être rentré dans l'oubli sans les soins laborieux de de M. Miller et l'heureuse erreur où il est tombé en l'attribuant à Origène ; sous le patronage d'un si grand nom, il devait exciter la vive curiosité du monde chrétien et du monde savant. Par une préférence accordée à l'imprimerie anglaise, et qu'elle paraît avoir justifiée, le savant éditeur publia cet ouvrage à Oxford en 1851; il le dédia à M. Villemain, dont les lettres grecques et les lettres sacrées avaient souvent reçu de si glorieux services, et qui semblait recevoir d'elles, en cette circonstance, un juste tribut de reconnaissance par un de leurs plus éloquents interprètes, le savant catéchiste d'Alexandrie.

Quel fut l'étonnement et l'admiration des esprits cultivés, en apprenant la découverte d'un ouvrage d'Origène. On apprécia d'autant plus ce trésor littéraire, qu'il en portait d'autres renfermés en lui-même; il con

tenait des fragments encore inconnus de Pindare, d'Empédocle, d'Héraclite. Mais la curiosité des savants, qui est si pleine de charmes et si pacifique dans ses recherches, fit bientôt place à une critique passionnée et à des controverses religieuses. On avait remarqué dans cet ouvrage des invectives violentes contre un des successeurs de saint Pierre. Le pape saint Calliste était accusé d'escroquerie, d'immoralité et d'hérésie! Un pontife dont l'Eglise catholique vénère la mémoire et qu'elle invoque dans ses prières, avait corrompu, disait-on, la foi et les mœurs des âmes confiées à sa vigilance et altéré, dès sa source même, la tradition des vérités chrétiennes. Avec quelle joie et quelle triomphante fierté les églises réformées d'Angleterre et d'Allemagne allaient-elles accueillir cette protestation contre l'autorité du souverain pontife et l'infaillibilité de ses enseignements! Il est vrai que l'imagination ardente d'Origène avait pu l'entraîner dans de graves erreurs. Son orthodoxie n'était-elle pas douteuse? ses écrits n'avaient-ils pas été censurés au concile de Constantinople?

Mais à peine ces objections furent-elles soulevées, que déjà on découvrait avec surprise combien étaient faibles les arguments qui attribuaient à cet éloquent génie le livre des Philosophumena. Ce n'était ni son langage, ni sa manière d'écrire, ni ses opinions philosophiques, ni ses doctrines théologiques. M. Jacobi, le premier de tous, déclara que cet ouvrage appartenait à un écrivain de Rome (1); de nombreux idiotismes latins, revêtus

(1) Il publia, sur cette question, plusieurs articles qui parurent successivement dans une revue ecclésiastique de Berlin (du 21 juin au 29

d'expressions grecques, trahissaient son origine. L'auteur était un des êvêques suburbicaires de la Province Romaine; il y jouissait d'une haute autorité sous le pontificat de saint Calliste; tout désignait saint Hippolyte, évêque de Porto, un martyr et un docteur de l'Eglise, celui-là même dont le Vatican conservait la statue et vénérait la mémoire.

Cette opinion fut soutenue en Angleterre par le chevalier Bunzen, ambassadeur de Prusse (1), et peu après par le docteur Wordsworth, chanoine de l'église de Westminster (2). Elle fut accueillie avec enthousiasme par leurs coreligionnaires. Quelle consolation pour leurs âmes que d'entendre un martyr, un évêque, un docteur de la primitive Eglise, protester contre l'autorité du saint-siége, méconnaître son infaillibilité et justifier l'indépendance d'esprit et la révolte des réformateurs du xvi siècle et de leurs nombreux et mobiles disciples!

Le chevalier Bunzen s'était proposé de tracer, à l'aide du livre des Philosophumena, un tableau de la primitive Eglise et d'y faire paraître, comme dans un miroir,

juillet 1852), Deutsche Zeitschrift für Christliche Wissenschaft und Christliche leben.

(1) Hippolytus and his age, ouvrage en 4 volumes, publié à la fin de 1852. Dans le premier volume, le chevalier Bunzen examine l'authenticité de l'ouvrage et les raisons qui peuvent le faire attribuer à saint Hippolyte; dans le deuxième, il donne des aphorismes philosophiques et examine des documents historiques relatifs à saint Hippolyte et à son siècle; dans le troisième, il compose, pour la primitive Eglise, un livre deprières et des règles de discipline; dans le quatrième, il rassemble les liturgies des églises primitives.

(2) Saint Hippolytus and the Church of Rome, 1 vol. in-8°, publié en 1853, par Christ. Wordsworth.

l'image fidèle de l'église protestante. Cependant, ce n'était pas aux catholiques romains qu'il destinait ses enseignements et ceux qu'il prêtait à saint Hippolyte, mais c'était plutôt à ses frères d'Angleterre, auxquels il désirait inspirer des sentiments plus libres dans la foi et dans l'observance de la discipline. Aussi, une certaine défaveur accueillit son ouvrage. Plusieurs ministres anglicans crurent y remarquer une nouvelle et téméraire tentative d'un parti allemand, qui, sous le patronage du prince Albert, s'efforce depuis plusieurs années de dominer l'église d'Angleterre et de l'unir plus étroitement à sa sœur d'outre-Rhin, par la participation à un même rationalisme religieux qui est voisin du déisme et du scepticisme. Dans son ouvrage sur saint Hippolyte et l'Eglise de Rome, le docteur Wordsworth, usant de tous les ménagements d'une exquise politesse, rejeta comme légère la critique de l'honorable ambassadeur de Prusse, il s'indigna noblement contre certaines propositions impies, et après de longues dissertations sur l'authenticité des Philosophumena et sur saint Hippolyte, il s'adressa à nous avec une indulgente compassion et s'efforça de nous faire voir, dans ce livre nouveau, une lumière venue de l'Orient, qui avait brillé pour la première fois, en Angleterre, et qui devait nous tirer de la voie de perdition où nous étions égarés, pour nous conduire dans le chemin du salut et de la vie.

Les revues anglaises ne prirent qu'une faible part à la controverse. Le Quarterly review publia un essai litté– raire, dont l'intérêt était propre à reposer les esprits fa

tigués de discussions (1). Dans l'Ecclesiastic and theologian parurent deux savantes dissertations (2), où l'auteur (un disciple peut-être du Dr Pusey), réfutant les opinions de M. Miller, attribuait l'ouvrage qu'il avait publié à Caïus, prêtre romain que Photius appelle évêque des nations, et détournait les coups portés contre saint Calliste pour les faire retomber sur un hérétique du même nom.

Les catholiques demeurèrent longtemps témoins de ces débats sans y participer. Ils entrèrent enfin dans la discussion et soutinrent que saint Hippolyte, s'il était l'auteur de ce livre, l'avait composé dans des jours malheureux, où, révolté contre l'autorité du pontife romain, il avait adopté les funestes erreurs qui furent propagées dans la suite par la secte des Novaliens. Cette opinion fut défendue dans la Revue de Dublin (3), et peu après exposée de nouveau dans le Correspondant, mais rejetée et combattue par le savant et honorable M. Lenormant (4).

J'assistais attentivement à ces longues discussions et j'examinais le livre qui les avait suscitées, ainsi que les monuments du II. et du m° siècles, propres à jeter sur mes études quelques nouvelles lumières. Plus j'avançais dans mes recherches, et plus il me semblait que les titres de saint Hippolyte au livre des Philosophumena étaient contestables. L'opinion qui le lui attribuait me paraissait puiser toute sa force dans les préjugés religieux; en même temps, j'étais entraîné dans la

(1) Quarterly review, april 1851.

(2) Ecclesiastic and theologian, june, july, 1851.

(3) Dublin reivew, april 1853.

(4) Le Correspondant, mai 1853.

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