uns disent que la force est une propriété de la matière, qu'elle lui est inhérente et nécessaire (1). D'autres soutiennent que la force vient d'un agent extérieur à la matière, de Dieu. D'autres enfin, et c'est le plus grand nombre parmi les savants contemporains, avouent qu'ils ne savent rien sur la force; qu'ils ne veulent pas chercher, que c'est là un problème insoluble. J'espère vous montrer comment Moïse résout d'une façon grandiose et parfaitement conforme aux données de la science actuelle, cette question embarrassante (2).

Mais auparavant il est nécessaire que nous sachions comment les trois éléments constitutifs du monde, matière pondérable, éther et force, se comportent les uns par rapport aux autres pour donner naissance à tous les phénomènes de l'univers. Car ces trois éléments suffisent, dans la théorie moderne, que nous acceptons, à expliquer tout ce qui s'est passé et se passera dans l'ensemble de l'univers créé (3). Nous pourrons expliquer ensuite les passages de la Bible qui me paraissent répondre à la question: en quel état Dieu a-t-il créé la matière primitive?

(1) Moleschott emploie de longues pages à prouver cette assertion. (La Circulation de la vie, tome II, 18 lettre.) M. Hirn réfute cette doctrine.

(2) J'insiste peu sur la force et je ne parle presque pas des mouvements de l'univers, parce que j'aurai bientôt l'occasion de développer les questions relatives à ces mouvements.

(3) Il est bien entendu que je ne parle que de l'univers matériel.

HUITIÈME LEÇON

Rôle des éléments constitutifs dans la production des phénomènes de la nature.

Les trois principes élémentaires que la science admet aujourd'hui comme suffisants pour expliquer le monde, sa formation, ses évolutions successives et tous les phénomènes qui s'y passent sont 1o la matière pondérable; 2o l'éther, 3o la force. J'essaierai aujourd'hui de vous donner une idée de la manière dont ces trois éléments agissent les uns à l'égard des autres dans la production des divers ordres des phénomènes naturels.

Je vous ai dit déjà que les sciences qui s'occupent de la nature intime des corps et de leurs transformations diverses, physique, chimie, astronomie, cédent le pas à la mécanique, qui s'occupe des forces et du mouvement; d'après les savants les plus autorisés, tout ce qui se passe dans l'univers matériel, aussi bien pour la formation lointaine des soleils que pour la décomposition d'une goutte d'eau,

tout résulte des mouvements de la matière (1) et de l'éther, tout est mouvement.Tous les phénomènes sont dus à des mouvements variés des deux principes matériels, sous l'implusion de la force, force dont la somme ne varie jamais dans l'univers, qui n'est jamais en repos, mais agit constamment et universellement sur les principes matériels, de sorte que la matière est dans un mouvement perpétuel soit de vibration, soit de translation. C'est la théorie de ces mouvements qui se nomme la théorie dynamique (2). En outre, on admet que le mouvement qui se manifeste sous une certaine forme, par exemple sous forme de chaleur, peut, étant modifié, se manifester sous toute autre forme, par exemple sous forme d'attraction, d'électricité, de lumière, etc., en sorte que tous les phénomènes du monde, sans aucune exception, ne sont que des formes diverses du même mouvement des atomes. Cette hypothèse, fort belle et très-simple, prend le nom de corrélation des forces physiques ou transformation du

(1) Désormais, quand j'emploierai le mot matière seul, j'entendrai toujours parler de la matière pondérable.

(2) La théorie dynamique a pour auteur principal le docteur Mayer, de Heilbronn, en 1842; les savants qui ont le plus contribué à la vulgarisation de cette théorie sont MM. Joule, à Manchester; Colding, å Copenhague; Clausius, à Zurich; W. Thompson, à Edimbourg; Tyndall, à Londres; Hirn, à Colmar; Dupré, à Rennes; Cazin, à Versailles; le P. Secchi, à Rome.

mouvement; la même force suffit à expliquer tous les phénomènes.

Je vais entrer dans quelques détails qui vous feront saisir l'ensemble de ces théories, et nous serviront ensuite à comprendre le texte mosaïque, mis en regard des dernières découvertes de la science.

Les phénomènes du monde matériel sont excessivement nombreux et variés; toutefois on peut assez facilement les classer en quelques groupes à chacun desquels on assignait autrefois une cause spéciale, hypothétique et d'une nature inconnue.

Je vous ferai connaître d'abord ces groupes de phénomènes et leur explication ancienne, puis nous verrons comment on les explique dans la théorie dynamique.

10 Explication ancienne des phénomènes naturels.

On divise les phénomènes de l'univers en trois classes phénomènes physiques, chimiques et astronomiques (1).

1° Phénomènes physiques. 1o On remarque que les corps, abandonnés à eux-mêmes, tombent et se dirigent, dans leur chute, vers le centre de la terre;

(1) Je ne fais pas entrer dans cette division les phénomènes physiologiques et biologiques, parce qu'ils nécessitent un principe différent de ceux que nous avons étudiés : le principe vital, nous aurons à nous en occuper plus tard; je parle ici seulement de l'origine du monde inorganique.

cette propriété qu'ont les corps de tomber se nomme gravité ou pesanteur. Newton fut le premier à penser que la même cause qui fait tomber les corps à la surface de la terre, entraîne et maintient les planètes dans leurs orbites autour du soleil; la terre est attirée par le soleil, tombe sur le soleil, exactement comme une pierre est attirée par la terre. Newton appela attraction la cause qui produit ces phénomènes et dit que « tout se passe comme si les corps s'attiraient. » Cette attraction s'exerce, du reste, entre tous les corps matériels connus; on a formulé la loi de l'attraction en ces termes: tous les corps s'attirent en raison composée de leurs masses (1) et en raison inverse du carré de leur distance. Ce qui veut dire que si deux corps ont des masses dont le produit soit 2, 3, 4 fois plus grand, ils tomberont l'un sur l'autre avec une vitesse 2, 3, 4 fois plus grande; et que si la distance entre deux corps devient 2, 3, 4 fois plus grande, ils s'attireront avec une force 4, 9, 16 fois moins grande; car les nombres 4, 9, 16 sont les carrés de 2, 3, 4. On admettait, pour expliquer l'attraction, que les corps étaient doués de la propriété de s'attirer ainsi les uns les autres ; cette propriété s'appelait gravité quand il s'agissait des astres, et pesanteur quand il s'agissait des corps par rapport à la terre.

(1) Les mots raison composée indiquent le produit des masses, non leur somme.