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d'une grande réputation, fort aimé à Brest. Il est plus que moi en état de remplir le poste d'adjoint de la première division, puisqu'il possède toutes les parties de la marine, et qu'il en a une longue expérience. Je serai son chef de bureau, je travaillerai sous lui, j'y mettrai le même zèle et plus d'ardeur encore, s'il est possible, et vous aurez de plus les lumières, les talents et le travail de Kerguelen. Je vous fais cette proposition avec d'autant plus de satisfaction, que ma conscience m'assure que nous ne pouvons sauver la république que par le concours de toutes les

vertus.

Signé TAILLEVIS.

Le ministre m'écrivit le lendemain la lettre suivante:

Paris, 8 avril 1793, l'an II de la République.

Le ministre de la marine au citoyen Kergulen, capitaine de vaisseau.

>> Je vous préviens, citoyen, que d'après la renonciation volontaire du citoyen Taillevis, aux fonctions d'adjoint de la première d'vision, au ministère de la marine, et sur les

fémoignages qui m'ont été donnés de vos talents, de vos connaissances et de votre expérience consommée dans la marine, et surtout de votre patriotisme, je vous ai nommé pour le remplacer. Je me flatte que trouvant, dans cette nomination, une marque particulière de mon estime et de ma confiance, vous ne refuserez pas cet emploi, dans lequel vous pouvez être si utile et rendre d'importants services à la république. J'ai rendu compte au conseil exécutif du choix que j'avais fait de vous; il l'a confirmé. Le citoyen Taillevis s'est offert à travailler sous votre direction en qualité de chef de bureau. J'ai accepté sa proposition. Je puis vous assurer que vous trouverez en lui un coopérateur zélé, un travailleur ardent et un aide sûr, auquel vous pouvez, sans crainte, accorder une confiance entière.

Signé MONGE.

J'étais premier adjoint depuis huit jours, et chargé des mouvements de l'armée navale; j'avais donné au comité de salut public des plans importants, lorsque Cambon fit nommer le capitaine de vaisseau d'Albarade à la place de Monge. D'Albarade était marin; mais il

n'avait point assez de génie pour remplir cette place importante. Nous avions, en ce moment, deux armées, l'une dans la méditerranée, commandée par le général Truguet, qui, sous le ministère de Bertrand, avait été élevé rapidement au grade de contr'amiral; l'autre, dans l'océan, qui croisait entre Croix et Belle-Ile, sous les ordres de Morard de Galles, vice-amiral, dont le mérite est généralement reconnu. Pour m'éloigner, d'Albarade, qui est méfiant et jaloux des talents d'autrui, me chargea d'une opération délicate dont j'avais donné le plan. Je me rendis à Brest, où je me disposai à exécuter l'entreprise que j'avais tracée; mais au moment de partir, d'Albarade m'écrivit : » C'est avec

peine que je retarde la mission dont vous » êtes chargé; mais les circonstances impé>> rieuses où nous nous trouvons, exigent que » l'armée aux ordres du vice-amiral Morard » de Galles, soit renforcée. » Je fus désespéré de voir échapper l'occasion de rendre un grand service à ma patrie; mais craignant que l'armée qui croisait entre les îles de Groix et Belle-Ile ne fût attaquée avant mon arrivée, je partis sur-le-champ avec trois vaisseaux de ligne qui étaient en rade. La station

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donnée à notre armée était mauvaise politiquement et militairement. L'armée navale de la république ne pouvait y faire aucune prise. Elle pouvait au contraire être assaillie par des forces supérieures, qu'aucune retraite ne pouvait lui faire éviter, vu que la côte forme un golfe, sans la ressource d'aucun port; que celui de l'Orient ne peut recevoir dix vaisseaux de ligne, et que d'ailleurs on ne peut y entrer qu'à l'heure de la pleine mer ce qui est un grand inconvénient et dans un combat et dans une tempête. Il était donc absurde de tenir dans cette position périlleuse, pour la marine et pour l'état, toutes nos forces navales de l'océan. J'écrivis plusieurs lettres à d'Albarade; je lui marquais les dangers de la position, l'inutilité de la station, et les avantages qu'il y aurait à croiser sur les côtes d'Angleterre où l'on ferait des prises, ou à envoyer quelques vaisseaux protéger nos colonies. Toutes mes représentations furent inutiles; le ministre disait qu'il craignait une descente sur nos côtes. Il ignorait donc que le meilleur moyen d'empêcher l'ennemi de nous venir attaquer, était d'aller l'attaquer lui-même, en croisant sur ses côtes, et que c'était tout risquer de l'attendre sur

les

les nôtres, en lui offrant le double avantage de nous battre (comme il l'a fait il y a un an, avec des forces supérieures) et d'effectuer ensuite la descente.

Les équipages qui composaient notre armée, ennuyés de tenir la mer, sans faire de prises, sans se battre, et de naviguer ainsi, sans aucun avantage, depuis quatre mois, sans souliers, sans chemises, nourris presque toujours de salaisons, car le port de l'Orient, malgré tous les soins de l'agent maritime, Gautier, ne pouvait suffire à tout) voulurent retourner à Brest. La trahison de Toulon fut un prétexte; ils craignaient, disaient-ils, que le port de Brest ne fût livré avec la même infamie. Ces braves marins ne connaissaient pas le civisme, le courage et les vertus des Brestois, Ces bons marins oublièrent un instant leur devoir, et sommèrent, en quelque sorte, le général de Galles de se rendre à Brest. La situation de l'armée devenait critique. On hissa les huniers dans plusieurs vaisseaux, pour appareiller, et si l'armée s'était séparée, elle pouvait être prise partiellement. Le gé néral en chef assembla à son bord les généraux et les capitaines de l'armée, et permit aux équipages de chaque vaisseau, de députer

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