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la direction du mouvement, alors cela veut dire que le carré de l'hypoténuse est égal à la somme des carrés des deux côtés de l'angle droit. Si les molécules se précipitent l'une vers l'autre, c'est de l'amour; si elles s'éloignent, c'est de la haine. Si elles montent, c'est de l'ambition; si elles descendent, c'est de la honte. On ne s'imaginait pas qu'il y avait tant de choses dans les mouvements.

Mais les molécules des centres nerveux sont formées des mêmes éléments que les molécules des êtres inorganiques. Je vois un diapason qui vibre: peut-être pense-t-il à la vanité des choses humaines. Un autre vibre un peu plus lentement, c'est qu'il est dans l'admiration; un troisième vibre plus vite, c'est de plaisir. Le tonnerre gronde réellement, le vent gémit dans la cheminée et les flots sont furieux.

Mais, me répondra peut-être M. Soury, les mouvements simples d'un diapason ne sont point susceptibles d'être de la tristesse, de la joie, des pensées. Il faut pour cela les vibrations complexes des molécules compliquées des cellules nerveuses; il faut même des associations de neurones, c'est-à-dire des associations de cellules nerveuses avec leurs prolongements cylindraxiles et protoplasmatiques.

Mais pourquoi un mouvement compliqué pourrait-il atteindre la dignité d'action psychique, quand un mouvement relativement simple ne le peut pas ?

D'ailleurs, M. Soury ne considèrerait pas notre objection comme si absurde. « Pour expliquer, dit-il, l'origine de la vie et de ses propriétés psychiques, on a dû étendre aux derniers éléments de la matière, considérée comme la substance, comme l'être unique et universel, les propriétés supérieures que manifestent les êtres composés précisément de ces mêmes éléments. Si l'agrégat est sensible, c'est que la sensibilité était en puissance dans les parties qui le constituent. On incline donc à admettre que toute matière serait, au moins en puissance, capable de sentir, et que, dans certaines conditions, cette sensibilité

latente passe à l'acte. Cette obscure tendance à sentir et à se mouvoir d'après certains choix inconscients, se manifesterait dans les atomes, dans les molécules, et surtout dans les plastidules, ou parties élémentaires du protoplasma (1). »

Quoi qu'il en soit, si la pensée, l'amour, la haine, ne sont que des mouvements complexes et rien autre chose, ne vaudrait-il pas mieux les appeler mouvements complexes que de les appeler pensée, amour, haine? A quoi bon introduire des appellations qui entraînent des confusions?

Vous figurez-vous un auteur de mécanique qui, au lieu de dire mouvement de torsion, dirait rage, parce qu'on se tord dans la rage?

Je m'imagine bien ce que va me répondre M. Soury.. Il est très vrai, me dira-t-il, qu'en soi, objectivement, ce que j'appelle idée, sensation, n'est qu'un mouvement, une oscillation plus ou moins complexe de molécules. Mais ce mouvement m'apparaît à moi, dans ma connaissance, comme une idée, comme une sensation. Il n'y a qu'un phénomène, mais ce phénomène présente deux apparences, l'une subjective, l'autre objective.

J'aurais voulu que M. Soury explicitât son idée et la rendît claire. Explicitons-la nous-même, autant que nous pouvons la comprendre.

Je supprimerais d'abord l'expression d'apparence objective. Apparence suppose toujours quelque chose de subjectif. Un objet n'apparaît que pour autant qu'il y a un sujet qui le regarde. Il eût donc mieux valu opposer l'apparence subjective à la réalité objective.

Un même phénomène peut-il avoir une apparence subjective différente de sa réalité objective? Les savants ne répugneront pas à cette idée. D'après la plupart des physiologistes, en dehors de nous il n'y a pas de couleur rouge, verte, bleue, il n'y a que des vibrations de l'éther

(1) REV. GÉN. DES SCIENCES PURES et APPLIQUÉES, 30 janv. 1895, p. 65.

se succédant en nombre plus ou moins considérable. S'il n'y avait pas d'animaux doués de la vue, il n'y aurait aucune raison d'attribuer des couleurs à la matière.

Mais ces vibrations, qui ne sont dans leur réalité objective que de purs mouvements, ne nous apparaissent pas comme des mouvements, et même actuellement, après toutes les conquêtes de la science, il est encore impossible de percevoir directement ces mouvements, de les faire apparaître comme tels. Mais nous les percevons comme du rouge, du vert, du bleu, du violet.

Répondons maintenant nettement à ces deux questions. Existe-t-il dans l'éther des couleurs? Pourquoi, s'il n'en existe pas, dit-on cependant que les objets sont rouges, verts...?

A la première question, je réponds qu'il n'y a pas de de couleurs dans l'éther, qu'il n'y a que des vibrations.

A la seconde, je réponds que, prises au pied de la lettre, ces expressions objets rouges, verts, etc., sont fausses; elles ne sont légitimées que par une raison: c'est qu'il existe en réalité, en dehors des vibrations de l'éther, des sensations causées par ces vibrations et dans lesquelles on trouve des objets représentés en rouge,

vert, etc.

M. Soury, ce me semble, ne répudiera ni l'exemple, ni l'interprétation que j'apporte pour élucider sa pensée.

Voyons si cet exemple avec son interprétation peut rendre acceptable la théorie de notre critique sur les actions psychiques. Appliquons cette théorie à une action psychique bien déterminée, la plus psychique de toutes, la pensée.

Il n'existe donc dans mon cerveau, au moment où je pense, que des mouvements de molécules; mais ces mouvements de molécules, je ne les connais pas comme tels mais comme une pensée. En soi, ce sont des mouvements; dans ma connaissance, ils sont représentés comme une

pensée. C'est en vertu de cette connaissance seule que j'ai le droit de les appeler une pensée.

Mais cette connaissance par laquelle je me représente les mouvements moléculaires cérébraux comme une pensée, est elle-même une pensée, puisque c'est une connaissance.

Cette connaissance est donc aussi elle-même, en réalité, un simple mouvement de molécules; et ce mouvement de molécules, je n'ai aucun droit de l'appeler une connaissance sinon parce que j'ai une seconde connaissance qui me représente ce mouvement comme une connaissance.

Cette seconde connaissance, pour être appelée une connaissance, en demandera une troisième, cette troisième une quatrième... Et, en somme, il me faudra un nombre infini de connaissances pour que j'aie le droit d'appeler le premier mouvement une pensée, ce qui revient en d'autres termes à dire que je n'aurai jamais le droit de l'appeler ainsi, et que je dois la considérer uniquement comme un simple mouvement, tel que ceux qui se produisent dans la matière brute.

C'est comme si quelqu'un prétendait que les vibrations de l'éther sont appelées couleurs parce qu'elles apparaissent colorées dans une image matérielle elle-même, celle, par exemple, qu'on obtient au moyen d'une lentille. Comme cette image n'est elle-même qu'une vibration de l'éther, il faudrait, pour l'appeler colorée, faire intervenir une seconde image, et ainsi à l'infini. Ce qui amènerait comme conséquence qu'on n'aurait ainsi jamais le droit d'appeler les vibrations de l'éther des couleurs.

Si M. Soury niait les actions psychiques, s'il leur déniait toute réalité, on comprendrait peut-être plus facilement sa façon de parler. Mais il y a certaines actions psychiques qu'il ne nie pas, auxquelles il ne conteste pas une réalité objective. Telle la conscience. Il se refuse à accorder une conscience aux êtres vivants inférieurs : "aucune lueur de conscience..., aucune représentation consciente ne

traverse le protoplasma amiboïde d'un Protiste ou d'un Végétal (1) ». Il réserve la conscience « aux grands Singes anthropoïdes, aux Éléphants, aux Dauphins, aux Lézards, aux Oiseaux et aux Chiens, voire à des Invertébrés tels que les Fourmis. Mais qu'est-ce que ces rares espèces dans le gouffre sans fond du monde des vivants? Une goutte d'eau dans l'océan. Ni les Protozoaires dans leur ensemble, ni les Protophytes, ni les Végétaux, au milieu desquels vivent et passent presque inaperçus sur cette planète les dominateurs conscients des mers, des airs et des continents, n'ont atteint ni réalisé les conditions élémentaires de l'apparition de la conscience et cela à quelque degré que ce soit (2),

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Et par là il se sépare de Forel, qui voulait faire de la conscience l'apanage de tout ce qui a vie.

Si la conscience se trouve chez les êtres vivants supérieurs et ne se trouve pas chez les protistes ou les végétaux, il faut bien que M. Soury la considère comme quelque chose de réel. Sinon il n'y aurait en réalité aucune différence sous ce rapport entre les êtres vivants inférieurs et supérieurs.

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A son avis, cependant, la conscience n'ajoute rien, quand elle existe, à ces processus, pas plus que l'ombre au corps ".

En poussant un peu cette comparaison, M. Soury, qui nous a apparu, subjectivement peut-être, comme un matérialiste, pourrait bien nous apparaître objectivement comme un spiritualiste.

L'ombre est quelque chose de réel inutile de rappeler les souffrances et le désespoir de l'homme sans ombre. Cette ombre se meut avec moi. Voilà donc l'ombre en action. Mais cette action, toute réelle qu'elle est, n'a aucun équivalent mécanique. Pour me mouvoir, moi et mon ombre,

(1) REV. GÉN. Des sc. pures et appliquées, janv. 1895, p. 73. (2) Ibid.

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