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vérité et par conséquent point de droit en dehors du Christianisme et contre lui. C'est pour avoir méconnu ce principe de sens commun que le mouvement de 1789 a avorté si misérablement après une expérience de quatre-vingts ans et que le libéralisme aboutit fatalement, sous nos yeux, au socialisme ou au moins au radicalisme, qui en est comme l'essai préparatoire. M. Paul Ribot poursuit cette démonstration en analysant les éléments constitutionnels du pays tels qu'ils résultent de l'œuvre accomplie par la Constituante de 1791 et de celle de Napoléon 1". L'une et l'autre ont toujours pour donnée première le Contrat social de Rousseau l'enseignement essentiellement libéral donné au nom de l'Etat par l'Université impériale est notamment une cause permanente de scepticisme et de dissolution sociale; les divisions si profondes des classes dirigeantes actuelles le prouvent trop bien !

Heureusement, à côté de ces tendances désorganisatrices des lois et des forces gouvernementales, M. Ribot nous montre un ensemble de mœurs et d'idées qui luttent énergiquement contre elles et qui découlent de l'enseignement chrétien, à l'insu souvent même de ceux qui s'en font les organes, tant a été puissante l'action de l'Eglise dans la formation de nos sociétés modernes !

Malgré les progrès que le radicalisme fait dans les couches populaires, M. Ribot regarde la Révolution comme frappée, dès à présent, d'impuissance et il voit le commencement de la réorganisation sociale, dans le retour religieux considérable qui se produit au sein des classes supérieures; or, malgré tous les entraînements du suffrage universel, ce sont ces classes qui forment toujours les idées de la nation. Un signe extérieur très-digne d'attention c'est la vive répulsion que la République française de 1870 a inspiré à tous les peuples européens, tandis que le mouvement de 1848 avait exercé un entrainement presque universel.

Que sera cette restauration sociale? Voici une page de l'auteur qui en trace très-heureusement le programme :

<< Un peuple, quand on le prend dans son ensemble, sans tenir compte de son gouvernement, n'est pas une masse organisée, pouvant se suffire à elle-même; c'est, au contraire, une masse inorganique, qui ne veut rien, qui ne peut rien, quelque chose qui ressemble au chaos des premiers âges. Pour vous en convaincre, réfléchissez à l'état d'esprit dans lequel se trouvent les paysans et les ouvriers, lesquels composent la très-grande majorité de la nation. N'est-il pas visible que par eux-mêmes ils sont incapables de former une société ?

>> Qui est-ce qui met donc en œuvre cette masse organisée? Qui

est-ce qui pense, qui veut, qui agit? Quelque chose qui a des idées, qui a des intérêts; quelque chose qui les défend et qui, à un certain moment, peut se lever comme un seul homme.

>> Ce quelque chose, c'est l'autorité, l'autorité spirituelle d'abord, c'est-à-dire la religion, c'est-à-dire l'Eglise, qui donne à la société son idéal, c'est-à-dire son âme, et qui crée par là son unité intellectuelle et morale;

» L'autorité civile, c'est-à-dire le gouvernement qui lui donne son unité temporelle et qui la dirige;

» L'autorité hiérarchique ou aristocratique, qui n'est autre chose que la prépondérance accordée par l'Etat à ceux qui, plus que les autres, sont imbus des traditions religieuses, morales et politiques qui constituent la vie de la nation, et qui, par là même, sont plus propres à les propager et à les répandre dans la masse du peuple.

» La formation de ces trois autorités constitue le développement de la vie de la société; elles sont dans le corps social ce que sont ces premiers points solides qui sont le commencement de la vie dans la matière organique. Grâce à ces trois autorités, grâce au concours mutuel qu'elles se prêtent, la masse inorganique qui constitue la société s'anime progressivement; elle se pénètre de toutes les idées, de toutes les traditions qui font sa force et sa vie. »

Quant aux applications dans l'ordre politique et économique, le travail de reconstitution sociale est préparé par un grand nombre de travaux dont les plus saillants sont ceux de MM. Le Play, Pradié, Blanc-Saint-Bonnet. Les points sur lesquels s'accordent ces hommes éminents, qui ont travaillé sans communication entre eux, peuvent être considérés comme des bases définitivement acquises. Mais M. Paul Ribot le fait justement remarquer, toutes les excellentes coutumes qui, d'après les observations de M. Le Play, permettent aux familles et aux ateliers modèles d'assurer la paix et le bien-être de leurs membres, tels que l'usage intelligent du testament et le patronage exercé sur les ouvriers, reposent sur la pratique des vérités chrétiennes; par conséquent, c'est à l'Eglise, comme à la première source de vie, que les sociétés modernes doivent revenir pour reprendre le cours de leurs destinées troublées par la Révolution. Il faut signaler particulièrement les pages dans lesquelles l'auteur apprécie les tentatives de réorganisation de l'ordre économique de nos jours, dues aux œuvres catholiques contemporaines, notamment aux cercles d'ouvriers: elles abondent en observations judicieuses et éminemment pratiques.

Que M. Ribot nous permette, en terminant, une remarque qui prouvera au moins notre impartialité et le soin avec lequel nous l'avons lu. Il ne nous paraît pas faire à l'action d'un pouvoir politique, fondé sur le droit, une part assez large dans la reconstitution sociale, et cependant le sentiment vraiment populaire qui fait appel

si énergiquement à une tête et à un bras, est un indice des besoins réels des sociétés. Sans doute, ainsi qu'il le dit, c'est à tort que << bien des gens s'imaginent qu'il suffit de proclamer théoriquement » le droit pour qu'à l'instant même la société s'organise selon la >> justice par la force irrésistible de la raison » Mais nous voudrions voir nettement expliquée la proposition qui suit : « La société ne > consiste pas dans une doctrine à proclamer; elle est surtout un > fait ou plutôt une accumulation de faits » (p. 274).

Dans l'ordre social comme dans l'ordre religieux, on ne peut pas concevoir de faits tendant à constituer une nation sans une doctrine qui les inspire. Quoique toutes les formes de gouvernement puissent être légitimes en principe, à la condition d'observer la même loi morale dans leur action, nous n'admettons pas qu'il soit permis à un peuple déterminé, à la France par exemple, d'adopter indifféremment selon l'expédient du moment la république ou la monarchie, comme notre auteur le dit (p. 474). Non, cela n'est pas indifférent.

Il y a des règles certaines sur la stabilité politique et la constitution du pouvoir, qui découlent de la vérité morale unique A côté de l'Eglise, autorité spirituelle de droit divin proprement dit, il y a dans chaque pays un pouvoir de droit naturel, dont la forme est déterminée par la tradition propre à cette nation. Ce pouvoir a un droit propre, et qui dit droit dit par là-même un principe absolu qui n'est pas abandonné au hasard des faits, c'est-à-dire des volontés des sujets. L'histoire de tous les peuples, étudiée à fond, montre comment leur formation s'est toujours opérée sur une idée de droit, que des faits répétés, c'est-à-dire des efforts courageux et nettement déterminés, sont parvenus à faire triompher. La permanence du droit dans les innombrables évolutions par lesquelles les différentes nations ont passé depuis le commencement des siècles est assurément un des plus grands phénomènes moraux que l'histoire constate, et il relève singulièrement le spectacle parfois si douloureux des agitations humaines.

Mais il est possible que nous n'ayons pas bien saisi la pensée de M. Paul Ribot. Le second volume, qui traitera probablement ces sujets plus à fond, dissipera, nous l'espérons, ce malentendu. En tout cas, si sur ce seul point l'auteur de ce beau livre n'avait pu se dégager du flot des erreurs de 1789, nous n'en devrions pas moins apprécier la vigueur et la droiture avec lesquelles il a remonté le

courant dans l'ensemble. Peut-être même serions-nous plus heureux encore d'un nouvel allié si rapproché et si précieux que d'un compagnon d'armes de vieille date!

C. J.

DES CAUSES DE LA DÉCADENCE DE LA PROPRIÉTÉ FÉODALE EN FRANCE ET EN ANGLETERRE, par H. SUMNERMAINE, professeur à l'Université d'Oxford. - In-8° de 28 pages. E. Thorin. Paris, 1877.

Il y a peu d'étude plus importante et cependant moins avancée que l'histoire comparée de l'abolition des divers droits sur la terre, qui composaient la propriété féodale dans les différentes contrées de l'Europe. Ils ont partout aujourd'hui à peu près complétement disparu, mais dans des conditions absolument opposées. La France est le seul pays où cette transformation ait été violente. M. Doniol a essayé de traiter un côté de ce vaste sujet dans un volume publié, il y a deux ans, sous ce titre : la Révolution française et la Féodalité. Le principal mérite de ce livre est d'avoir servi d'occasion au substantiel travail de M. Sumner-Maine.

L'éminent historien et jurisconsulte établit l'identité de la tenure féodale roturière française, dans la dernière période de l'ancien régime, avec cette sorte de propriété qui existe encore en Angleterre sous le nom de Copyhold. L'une et l'autre dérivent de l'ancienne constitution locale qui, sous le nom de hof, de manor, de fief, fut le berceau de toutes les grandes nations européennes.

Pourquoi le Copy hold n'est-il pas devenu en Angleterre un sujet de division entre les classes, comme les droits féodaux l'étaient dans certaines provinces de la France? M. Sumner-Maine indique comme causes principales l'action de la justice royale, qui, en Angleterre, restreignit toujours le régime du Copyhold; puis le grand mourement d'absorption des petits domaines, qui s'est produit peu à peu, du xvi au xix siècle. En réalité, les plaintes qui s'élevaient en France seraient donc venues de la condition bien meilleure faite aux petits propriétaires si nombreux, dès cette époque, dans notre pays, comparée à celle qu'ils avaient dans le reste de l'Europe. M. de Tocqueville avait déjà dit à peu près la même chose dans son livre sur l'Ancien Régime et la Révolution. Cet aperçu donne une idée de l'intérêt que méritent toutes les contributions apportées à l'étude de ce grand problème social.

Le gérant, J. BARATIER.

1000 Grenoble, imprimerie BARATIER et DARDELET. 9265

DES

INSTITUTIONS ET DU DROIT.

(6 Année.)

DES PRINCIPES ET DES SOURCES

DE

LA LÉGISLATION ECCLÉSIASTIQUE

Discours prononcé à l'ouverture du cours de droit canon à la Faculté libre de droit de Toulouse, le 14 novembre 1878.

Dans une de ses fresques, l'un des chefs-d'œuvre de la peinture qui décorent les chambres du Vatican, Raphaël a représenté la Jurisprudence unissant, par les liens les plus étroits, la législation de l'Eglise à celle de la société civile. La science des lois, symbolisée par une reine d'une merveilleuse beauté, a son trône dans les nuées du ciel; mais sur la terre, son empire se divise en deux parties. D'un côté, à gauche, c'est la loi civile. L'empereur Justinien, assis sur son trône, reçoit des mains de Trébonien, le livre des Pandectes. Sur le panneau à droite, c'est la législation de l'Eglise. Elle est figurée par le pape Grégoire IX, siégeant sur le trône pontifical, et ayant à ses pieds l'illustre compilateur des canons ecclésiastiques, saint Raymond de Pégnafort; l'enfant de saint Dominique présente au grand pontife le volume des décrétales.

Quand son pinceau traçait ces admirables dessins, l'immortel artiste avait sous les yeux les grandes écoles du XVIe siècle; surtout l'université de Bologne, qui avait

6o ANN. 2o SEM. 6o LIV. DÉCEMBRE 1878.

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