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mais l'unité de caractère y est manifestement violée. Le personnage de Cinna n'est pas soutenu, et ses variations inexplicables lui ôtent la noblesse et parfois l'intérêt. Cette énergie romaine-espagnole, qui produit des effets si sublimes, approche quelquefois de la déclamation, ou même y tourne tout à fait la grandeur des sentiments et des pensées devient parfois une grandeur de parade, et, mal gré tout ce qu'on peut donner à l'idéal, cesse d'être naturelle, vraie, sincère. Mais enfin, et il n'est pas besoin de le démontrer ici, le nombre des beautés domine, et ces beautés sont d'un ordre à racheter tous les défauts. Polyeucte, joué en 1640, marque peut-être le plus haut point de perfection du génie de Corneille. C'est, avec le Cid, celui de ses ouvrages dont le plan est le mieux conçu; c'est le seul où il a su allier le pathétique gracieux et tendre à la force et au sublime. Le rôle de Pauline est, sous ce rapport, une création unique de son théâtre; car il avait plus de grandeur que de sensibilité dans l'âme, plus d'énergie que de souplesse. Il n'était réservé qu'au seul Racine d'unir presque constamment ces deux caractères.

A dater de cette époque, on ne trouve plus de progrès dans les travaux de Corneille; mais dans ses nouvelles œuvres, on remarque de nouveaux développements de son talent dramatique.Pompée et le Menteur, représentés presque simultanément, en offrent un double exemple. La conception de Pompée est imposante, et il est malheureux que le dialogue soit si souvent entaché d'enflure à la Lucain. On a mille fois remarqué l'originalité majestueuse du début, où l'exposition du sujet renferme le nœud de la pièce. Le personnage noble et touchant de la veuve de Pompée était encore une création, après les caractères de Pauline et d'Émilie.

Le Menteur, imité de la pièce espagnole de Pedro de Roxas, fut la première comédie de caractère que put citer notre littérature. Jusque-là, point de naturel, point de véritables pein

tures de mœurs; un amas d'extravagances qui n'avaient rien de réel, faisaient tout notre comique. Ramenant les deux scènes à la nature et à la vérité, Corneille montra, dans le Menteur, ce que devait être la comédie, comme il avait appris à ses contemporains, par le Cid, ce qu'était la tragédie. En un mot, dans l'espace de huit ans, il avait tracé la route à Racine et à Molière.

En 1645, parut Rodogune. Dans le cinquième acte de cette pièce, son talent se montra sous un aspect nouveau. Jusque-là, il avait produit ses grands effets par le ressort de l'admiration, quelquefois uni au ressort de la pitié, qui le rendait plus tragique : ici l'admiration a fait place à l'effroi; une affreuse incertitude obsède l'âme des spectateurs; des combinaisons savantes préparent et développent un des plus imposants spectacles de terreur qu'ait offerts le théâtre. Lorsque après Rodogune on trouve Théodore, représenté l'année suivante, on est confondu d'étonnement, et on se croirait arrivé au dernier degré de la décadence de Corneille, si l'année d'après (1647) ne nous apportait Héraclius, imitation originale de Calderon, où le poëte retrouve par intervalle son élévation et sa force. Héraclius fut suivi de Don Sanche d'Aragon, où quelques beaux traits ne peuvent racheter le défaut d'intérêt, et l'invraisemblance d'une fable plus faite pour le roman que pour le théâtre.

Andromède, pièce enrichie de divertissements et de machines, avait été jouée quelques mois auparavant avec un grand succès; et Corneille, qui avait déjà préparé la voie à Racine et à Molière, devint le précurseur de Quinault. Il y avait eu avant cette époque des pièces à machines, mais Andromède était bien supérieure à toutes celles qui avaient précédé, et inaugura en quelque sorte ce genre sur le théâ

tre.

Nicomède, représenté en 1652, nous offre un développement nouveau du génie de Corneille, dans le

personnage principal. Un heros, environné de périls qu'il ne repousse qu'avec l'ironie, telle est la donnée du premier rôle, mise en œuvre par le poëte avec une rare habileté. C'est le caractère comique du railleur, élevé, par la grandeur d'âme, par le rang et les dangers du personnage, à l'énergie, à la dignité, presque au sublime de la haute tragédie. Mais cet éloge ne s'adresse, bien entendu, qu'aux scènes où paraît Nicomède. Le reste n'est qu'un amas insipide de dissertations sur l'amour ou la politique.

Jusqu'ici, la carrière de Corneille n'avait été marquée que par des triomphes; il touchait au moment de faire l'essai des revers. La chute de Pertharite le surprit et l'affligea,comme une injuste disgrâce. Méconnaissant l'immense intervalle qui séparait ses chefs-d'œuvre d'ouvrages si peu dignes de lui, et se croyant autant de droits aux applaudissements qu'à l'époque du Cid, il accusa le public de légèreté et d'une cruelle inconstance. Il se retira du théâtre en répandant, dans des plaintes hautaines, l'amertume de son âme. Naturellement fier, ses longues prospérités l'avaient habitué à ne plus douter de lui, et l'avaient rempli d'un sentiment de confiance en ses forces qui maintenant l'aveuglait.

Cependant, loin de la scène, il fallait un aliment à son imagination. Le besoin de produire, et les sentiments de piété qu'il avait eus dès sa jeunesse, le portèrent à entreprendre un travail simple et facile, qui lui offrait des consolations et l'entretenait dans de sublimes espérances. Il se mit à traduire en vers Imitation de Jésus-Christ. Ses ennemis, que son échec et sa retraite n'apaisaient pas, répandirent le bruit que la traduction du premier livre de l'Imilation était une pénitence qu'un religieux lui avait imposée, en expiation d'une pièce immorale sortie de sa plume, l'Occasion perdue et retrouvée. On s'égayait sur cette histoire, où il n'y avait rien de vrai; car la piece n'était pas de Corneille, mais du sieur de Cantenac. On expliquait par d'autres suppositions également controu

vées, la publication des autres livres de l'Imitation; enfin, la cabale des mauvais auteurs cherchait à rendre Corneille ridicule. Cependant quelques critiques venus ensuite reproduisirent ces bruits, en paraissant y croire, d'où il résulta que d'autres critiques se mirent en devoir de les réfuter sérieusement. Les mémoires de Trévoux, de décembre 1724, traitèrent gravement cette affaire. M. Barbier, dans sa savante dissertation sur les soixante traductions françaises de l'Imitation, consacra plusieurs pages au même sujet. Quoi qu'il en soit, la version de Corneille eut un grand succès. Cependant elle n'est pas au-dessus des autres ouvrages qu'il composa hors du genre dramatique : quelques vers où l'on reconnaît sa touche originale et grande, y font succéder par intervalle l'admiration à l'ennui. Près de six années s'écoulèrent dans ce travail malheu

reux.

Corneille ne cessait de reporter ses regards avec regret sur le théâtre. Cependant, en défiance, non de luimême, mais du public, il redoutait autant qu'il désirait d'y reparaître. Les conseils du surintendant Fouquet le décidèrent, malheureusement pour sa gloire, à sortir de son repos. Il revint au théâtre en 1659, pour défigurer le plus beau, le plus pathétique sujet de la tragédie antique: il donna son OEdipe. Cette triste composition réussit cependant; et ce succès, si doux à un vieux triomphateur, le rengagea de plus belle dans la carrière. Il tenta un nouvel essai pour réunir le chant et la poésie, et l'opéra de la Toison d'Or excita des applaudissements dus en grande partie aux décorations. L'accueil favorable qui fut fait à Sertorius fut justifié du moins par des mots sublimes et une belle scène, derniers éclairs du génie. Sophonisbe, moins heureuse, ne fit point oublier, ou plutôt fit remettre au théâtre la tragédie que Mairet avait donnée sous le même titre, sept ans avant le Cid. Les hommes de goût purent encore s'associer au succès d'Othon, en considération d'une belle exécution et de

quelques mâles discours inspirés par Tacite. Mais Agésilas et Attila ne produisirent d'illusion sur personne, et ne parurent au théâtre que pour annoncer que le grand homme n'était plus. Bérénice, qui vint trois ans après, et que Corneille avait faite concurremment avec Racine, ne servit qu'à prouver que le sceptre de la tragédie était passé sans retour aux mains du dernier. Il faut encore nommer Pulchérie, où, quoi qu'en dise madame de Sévigné, admiratrice aveugle de Corneille, on ne trouve aucun souvenir de sa défunte veine, et Suréna, oublié aussitôt après sa nais

sance.

La vieillesse de Corneille fut triste ses revers, qu'il continuait à regarder comme une injustice, lui étaient d'autant plus sensibles, qu'il voyait un jeune et brillant rival s'avancer à pas rapides dans la carrière où il avait si longtemps régné seul. Il assista aux principaux triomphes de Racine, puisque sa vie se prolongea jusqu'en 1684. Il mourut à l'âge de soixante-dix-huit ans, en se plaignant de son siècle. Cependant son siècle ne lui avait préféré un autre génie qu'en comparant la dernière partie de son théâtre aux ouvrages de son successeur. Mais le Corneille qu'on avait applaudi cinquante ans auparavant, le Corneille du Cid et de Cinna, était toujours le premier aux yeux de presque toute la société du temps. Racine, non-seulement ne l'avait point surpassé, mais même n'avait pù l'égaler. L'admiration pour Corneille était même portée jusqu'à la partialité et à l'injustice par des gens dont l'esprit est célèbre, mais dont le goût n'était pas encore formé. Madame de Sévigné rappelant, à propos de Pulchérie, les anciens chefs-d'œuvre de Corneille, déclarait que Racine n'irait jamais au delà. On sait qu'en envoyant Bajazet à sa fille, elle disait que sans la Champmeslé, la pièce perdrait la moitié de son prix, et qu'elle regrettait de ne pouvoir envoyer l'actrice avec le livre. Fontenelle, qui, outre l'imperfection de son goût et de sa critique,

était encore aveuglé par ses liens de parenté avec Corneille, et par son inimitié contre Racine, déclare qu'audessus de Cinna et de Polyeucte, il n'y a rien, et, ce qu'il est beaucoup plus difficile d'admettre, présente Sertorius, Sophonisbe et Othon comme des chefs-d'œuvre. La Bruyère, qui dans son parallèle entre les deux grands tragiques, semble plus juste, se trompe cependant à chaque instant. C'est lui qui a contribué à accréditer cette erreur si longtemps répandue, que Racine n'était que le poëte des sentiments doux et tendres; qu'il excellait sans doute dans ce genre de pathétique, mais que pour les conceptions vigoureuses et les effets dramatiques, sublimes, il fallait s'adresser au seul Corneille, qui en avait gardé le secret. Dans le siècle suivant, la critique, plus éclairée, sut rendre une justice plus complète à Racine, sans faire tort à la gloire de Corneille, et sans même soulever une discussion de prééminence inutile et oiseuse, comme toutes les questions de ce genre. L'opinion de la Harpe, celle de Voltaire, nous donnent toutes les lumières que peuvent fournir le goût et la vérité pour l'appréciation d'un grand homme dont les œuvres sont souvent imparfaites. Il n'y a point à revenir sur ce qu'ont dit ces deux grands juges Le Commentaire de Voltaire n'est point trop sévère, malgré les reproches d'injustice et même d'envie qui lui furent adressés de son temps et dans le nôtre, lorsque les nouveaux réformateurs du théâtre, voulant se créer un point d'appui dans le passé, adoptèrent Corneille pour patron et l'opposèrent à nos autres gloires classiques. Que l'on cite un seul grand caractère, une seule scène dramatique, un seul beau vers que Voltaire ait méconnu. Il a signalé les pensées exagérées, les froides dissertations, les raisonnements subtils qui discutent les situations au lieu de les faire marcher, les expressions contournées, ou surchargées, ou obscures, les scènes insipides, où l'amour, jouant un rôle secondaire, tandis qu'il ne peut être intéressant qu'en ayant le

rôle principal, ne s'exprime que par des antithèses ou des analyses métaphysiques du cœur. Mais qui, plus que Voltaire, admire et fait admirer des caractères tels que don Rodrigue, Horace, Auguste, Pauline; des scènes comme le plaidoyer de don Diègue et de Chimène devant le roi, comme l'entrevue d'Auguste et de Cinna, le débat de Polyeucte et de Néarque, la prière de Pauline à Sévère? Qui sent mieux que lui les vers énergiques et enlevants qui font vibrer le cœur, les contrastes touchants de passions magnanimes, les mâles peintures de la grandeur antique, la mise en œuvre profonde et habile des matériaux fournis par l'his toire, tous les traits sublimes qui mettent la nature sous nos yeux, en l'idéalisant? Que, du reste, Voltaire trouve en beaucoup de parties de Racine autant de vigueur que dans Corneille, qu'il regarde Joad, Acomat, Roxane, Agrippine, comme des créations aussi énergiques qu'Auguste, Camille, Emilie, en admettant, bien entendu, les différences que deux génies différents doivent mettre dans l'expression de la force, y a-t-il là préoccupation, erreur, ou injustice volontaire? Mais on s'est plu à répéter de nos jours que Racine avait affaibli le drame par le goût dominant de l'élégance, et par l'expression douce des sentiments délicats et tendres. On a fait de Corneille le génie vraiment dramatique de notre théâtre, on lui a donné comme partage exclusif, en quelque sorte, le mouvement, l'action, la chaleur, la grandeur virile, la rude simplicité. On en a fait le poëte romantique de notre théâtre. Il fallait bien que les novateurs se ménageassent un grand antécédent, qu'ils eussent un grand nom à invoquer, qu'ils pussent se rattacher, dans le passé, à un ancêtre illustre. Dans ce but, on présentait Corneille comme un Shakspeare, frémissant d'impatience sous le joug étroit des unités, et brisant par moment ses entraves dans des élans de génie. Rien de plus faux qu'une telle idée. Il faut bien savoir que Corneille, loin d'être une victime impatiente du

code dramatique formulé alors, en fut, au contraire, un des apôtres les plus fervents et les plus convaincus. Qu'on relise, si l'on veut, les examens qu'il a faits lui-même sur ses pièces : il s'y fait, à plaisir, plus sévère qu'Aristote lui-même, et ne se révolte jamais contre la gêne des règles. On dit que, malgré ces règles qui l'étouffaient, il a mis dans ses ouvrages plus d'action que Racine. Cela n'est vrai, peut-être, que du Cid. Mais, du reste, dans ses meilleurs ouvrages, il n'est ni plus rempli d'incidents, ni plus vif dans la conduite; et combien de fois ailleurs il est plus lent, combien de fois il remplace l'action par des conversations mortes, et les événements par des raisonnements! Nous ne voulons pas défendre les unités comme le palladium de l'art; nous regrettons même que les unités de temps et de lieu aient été imposées au poëte avec une rigueur si sévère; mais il y a des vérités qu'il faut bien reconnaître aujourd'hui : c'est que les unités ne furent pas une invention de quelques rhéteurs engoués d'Aristote, mais une idée générale et unanime des hommes de lettres du temps, et une réforme théâtrale en rapport avec les besoins et les goûts d'une société qui se passionnait alors pour l'ordre, comme au seizième siècle elle s'était passionnée pour le désordre; c'est que Corneille se prêta de lui-même à ce joug et le consacra par son exemple et par ses préceptes; c'est que Corneille fut un poëte tout aussi classique que Racine; qu'il eut, il est vrai, quelque chose de plus fier, et que, dans ses moments sublimes, il enlève plus que lui; mais qu'il n'a pas été plus dramatique; que quand il est animé, agissant, rapide, comme dans les principales scènes d'Horace et de Polyeucte, il ne l'est pas plus que Racine dans les situations importantes d'Andromaque, d'Iphigénie et d'Athalie. Le temps est venu de se débarrasser des préjugés accrédités par l'erreur ou la mauvaise foi d'une secte littéraire. Sachons apprécier nos deux grands tragiques sans les séparer, sans ôter à l'un ce que nous donnons à l'autre,

sans faire de tout ce que nous aamirons chez l'un, autant de sujets de grief contre l'autre. Après cela, bien entendu, libre à chacun d'avoir une préférence pour Corneille ou pour Racine; mais cette préférence serait une sympathie individuelle pour l'un des deux génies: on la garderait pour soi, on ne pourrait l'imposer comme une décision générale et absolue, on ne pourrait la justifier par aucune des raisons, trop souvent alléguées, que nous avons réduites à leur juste valeur.

CORNEILLE (Thomas), frère du grand Corneille, naquit à Rouen en 1625. Il fit ses études chez les jésuites de cette ville avec les plus grands succès. Pendant sa rhétorique, il composa une comédie en vers latins, que son régent trouva excellente, à ce point qu'il la substitua à celle qu'il avait composée lui-même pour la distribution des prix. Thomas vint à Paris après ses études, et y embrassa la carrière du théâtre comme son aîné; comme lui il commença par travailler d'après le théâtre espagnol : les Engagements du hasard, sa premiere piece; le Feint astrologue, Don Bertrand de Cigaral, l'Amour à la mode, sont pris, tantôt à Calderon, tantôt à Roxas, tantôt à Salis. Dans ses premiers essais, il ne fit guère que charger le mauvais goût de ses modèles. Sa tragédie de Timocrate, qu'il fit jouer bientôt après, était plus originale, et révélait un perfectionnement dans son talent; cette pièce, qui du reste paraît très-faible à ceux qui la lisent par hasard aujourd'hui, eut un succès prodigieux. On la joua sans interruption pendant six mois, et Louis XIV alla la voir au théâtre du Marais. En peu de temps Thomas Corneille fit suivre Timocrate de Bérénice, la Mort de Commode, Darius, Stilicon. Le sujet de Bérénice, très-différent de celui qu'a traité Racine, est tiré du roman de Cyrus par mademoiselle de Scudéry. Cette œuvre était tout à fait conforme à la mode du temps; elle réussit fort bien, ainsi que Commode et Stilicon. Doué d'une fécondité inépuisable, Thomas Cor

neille fit représenter coup sur coup de nouvelles tragédies qui lui valurent presque toutes des applaudissements, mais dont on ignore aujourd'hui même les noms. Les seuls ouvrages qu'on connaisse de lui sont Camma, dont le sujet lui fut donné par le surintendant Fouquet; la comédie du Baron d'Albikrac, qui, bien intriguée, s'est soutenue longtemps au théâtre; le Festin de Pierre, qui n'est guère que la pièce de Molière mise en vers assez plaisants; Ariane, qui, représentée en même temps que Bajazet, soutint avec avantage la concurrence contre ce chef-d'œuvre. Il s'en fallait cependant que la tragédie de Thomas Corneille fût digne d'être mise en comparaison avec Racine; mais on y trouve encore des beautés de sentiment, des situations qui entraînent, un pathétique attendrissant. La versification en est lâche et souvent incorrecte, et toutefois on peut y noter beaucoup de vers heureux et naturels, où la passion y parle un langage facile et pur; quelques-uns même sont déclarés, dans le commentaire de Voltaire, dignes de Racine. Boileau fut trop sévère envers Thomas Corneille, en disant qu'il ne s'était étudié qu'à copier les défauts de son frère, et qu'il n'avait jamais rien su faire de raisonnable. Voltaire, sans être trop indulgent, a porté de lui un jugement qui lui assigne parmi les poëtes du dix-septième siècle un rang honorable.

Depuis longtemps Thomas Corneille sollicitait son entrée à l'Académie française. Il y fut appelé à la mort de son illustre frère, qu'il remplaça, et eut l'honneur d'être admis par Racine, dont le discours, trèsflatteur pour le récipiendaire, renferme un magnifique éloge du grand Corneille. L'Académie n'avait point publié son dictionnaire. Corneille entreprit cette publication, qui eut lieu par ses soins en 1694. Comme l'Académie n'avait pas jugé à propos de rapporter les termes des arts et des sciences, il composa de ces mêmes termes un dictionnaire qui parut ia même année comme supplément. Un

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